Paris veut inscrire l’avortement dans la Constitution


L’Assemblée nationale française vote le statut constitutionnel du droit à l’avortement.

Source : AP


« Ce soir, l’Assemblée nationale et le gouvernement n’ont pas manqué leur rendez-vous avec l’histoire des femmes », a déclaré le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti. Avec une majorité de 493 voix contre 30, les députés ont récemment voté en faveur d’un projet majoritaire du gouvernement qui assurerait une protection constitutionnelle de l’avortement.

La « Loi Veil » pourrait être annulée assez rapidement

L’avortement est légal en France depuis 1975. Simone Veil, alors ministre de la Santé, s’est battue avec acharnement pour cela. Cependant, la « Loi Veil » reste une loi simple qui peut être abrogée à tout moment.

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Ce qui est nouveau, c’est que son inclusion dans la Constitution rendrait beaucoup plus difficile pour les futurs gouvernements d’abolir les réglementations actuelles en matière d’avortement. Une réponse aux nombreux revers que les femmes d’autres pays ont dû accepter récemment. Aux États-Unis, la Cour suprême a annulé en 2022 l’arrêt « Roe vs. Wade », qui garantissait le droit à l’avortement dans tout le pays. La France veut emprunter une voie différente.

Il s’agit du libellé

Plus précisément, le projet prévoit un garantie de liberté, une « liberté garantie d’interrompre une grossesse ». Afin d’adapter la constitution en conséquence, l’Assemblée nationale et le Sénat doivent s’entendre sur la même formulation. Le vote au Sénat est prévu fin février.

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C’est déjà la deuxième tentative après des discussions houleuses sur la question de savoir s’il faut parler de « droit à l’avortement » ou de « liberté d’avorter ». Le gouvernement espère désormais utiliser le compromis de la « liberté garantie » pour obtenir la majorité au Sénat en faveur de l’amendement constitutionnel.

Le Sénat comme obstacle

Mais les réserves au sein du camp de droite sont grandes. L’influent président du Sénat, Gérard Larcher, a critiqué l’inclusion prévue de ce paragraphe dans la Constitution : « Je pense que la Constitution n’est pas un catalogue de droits sociaux et sociétaux », a-t-il déclaré à la chaîne d’information. franceinfo.

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L’homme politique républicain s’appuie également sur Simone Veil, qui soulignait dans un discours d’ouverture en 1974 que l’avortement devait rester une exception, « le dernier recours dans les situations désespérées ». Veil a également plaidé pour un équilibre entre la possibilité d’avortement et le droit d’un enfant à la naissance. Ils voient cet équilibre Républicains désormais menacé.

Il y a une grande approbation sociale

Le président Macron l’avait promis en octobre dernier : « En 2024, la liberté des femmes d’avorter sera irréversible ». La grande majorité de la population française soutient ce projet : selon une enquête de l’institut d’opinion IFOP, 81 % des Français sont favorables à l’inscription de l’accès à l’avortement dans la Constitution.

En 2022, 234 300 avortements ont été pratiqués en France, soit le nombre le plus élevé depuis 30 ans. Ils sont autorisés jusqu’à la 14ème semaine. Les frais sont à la charge de la caisse d’assurance maladie.

6 000 personnes protestent contre le statut constitutionnel

« Sans le contrôle des femmes sur leur corps, il ne peut y avoir d’égalité entre les femmes et les hommes », a déclaré Floriane Volt de l’association Fondation des Femmes la ZDF. La directrice du service juridique de l’association des femmes voit « maintenant l’élan pour reconnaître ce droit fondamental » grâce à l’approbation sociale.

Mais il y a aussi des voix dissidentes : à l’occasion de l’anniversaire de la « Loi Veil », plus de 6 000 personnes ont manifesté contre le projet à Paris l’avant-week-end dernier. Leur revendication : « Oui à la prévention, non à l’inscription dans la Constitution ».

Si le projet de loi passe au Sénat, le Congrès votera à Versailles début mars. Une majorité des trois cinquièmes est nécessaire pour donner un statut constitutionnel à la possibilité de l’avortement. La France serait le premier pays de l’UE et le seul au monde à aller aussi loin.



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