La France va inscrire le droit à l’avortement dans sa Constitution


Débloquez gratuitement Editor’s Digest

Les législateurs français sont sur le point d’inscrire l’accès à l’avortement dans la constitution du pays, une première mondiale qui, selon les partisans de cette décision, était nécessaire pour empêcher toute restriction future des droits reproductifs.

Les 925 membres des deux chambres parlementaires françaises devaient se réunir lundi au château de Versailles pour un vote historique sur la modification constitutionnelle qui ajouterait un article spécifique garantissant la « liberté ». . . des femmes d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ».

Ce libellé rendra beaucoup plus difficile la limitation du droit à l’avortement, comme cela s’est produit dans des pays comme les États-Unis et la Pologne avec la complicité de gouvernements conservateurs, a déclaré Mélanie Vogel, sénatrice du parti Vert qui a codirigé l’effort.

« Le message est que la France considère que l’une des conditions d’une société libre et égalitaire est que les femmes puissent choisir quoi faire de leur corps », a-t-elle déclaré dans une interview.

Lorsqu’on lui a demandé si elle craignait que la montée de l’extrême droite en France n’entraîne des restrictions sur l’accès à l’avortement, elle a répondu que c’était impossible à prédire et qu’il valait donc mieux agir maintenant.

« Si vous voyez un camion foncer vers vous, vous n’attachez pas votre ceinture de sécurité lorsqu’il vous heurte. Le public français est très attaché au droit à l’avortement, nous disposons donc d’une fenêtre pour le faire dès maintenant afin d’éviter tout retour en arrière.

Des militants pro-avortement lors d’un rassemblement devant l’université de la Sorbonne à Paris. Faire de l’avortement un « droit garanti » dans la Constitution couronne une campagne de plusieurs décennies de groupes féministes et de femmes politiques © Michel Euler/AP

L’avortement a été légalisé en France en 1975 dans le cadre d’une proposition défendue par la ministre de la Santé, Simone Veil, une femme politique féministe de premier plan qui a eu l’honneur d’être enterrée au Panthéon de Paris après sa mort en 2017.

Les femmes peuvent subir l’intervention jusqu’à la 14e semaine de grossesse et les frais sont couverts par l’assurance maladie nationale.

Faire de l’avortement un « droit garanti » dans la Constitution couronne une campagne de plusieurs décennies de la part de groupes féministes et de femmes politiques, qui a pris une nouvelle urgence lorsque la Cour suprême des États-Unis a annulé Roe vs Wade, la décision juridique qui avait auparavant consacré un droit constitutionnel à l’avortement. avortement, en mai 2022.

Ce n’est qu’à ce moment-là que le président Emmanuel Macron est revenu sur sa position antérieure selon laquelle l’ajout du droit à l’avortement dans la constitution n’était pas nécessaire et que son gouvernement a appuyé de tout son poids une proposition déposée par des législateurs de gauche, dont Vogel.

Ce revirement est important car la procédure visant à modifier la Constitution française est beaucoup plus facile si l’exécutif la soutient, exigeant seulement une majorité des trois cinquièmes dans les deux chambres du Parlement au lieu d’un référendum national plus lourd.

La surprise politique est survenue la semaine dernière lorsque la chambre la plus conservatrice du Parlement, le Sénat français, a voté en faveur du changement (267 voix pour et 50 contre), bien que certains de ses dirigeants aient déclaré qu’ils pensaient que ce n’était pas une bonne idée. L’Assemblée nationale l’avait soutenu en janvier par une large majorité de 493 voix contre 30.

« Lorsque les droits des femmes sont attaqués partout dans le monde, la France se lève et se place à l’avant-garde du progrès », a écrit la semaine dernière le Premier ministre Gabriel Attal sur la plateforme de réseau social X.

Selon un sondage Ipsos réalisé en février, 78 pour cent des Français étaient favorables à l’ajout du droit à l’avortement dans la Constitution afin de garantir leur protection à l’avenir, ce chiffre atteignant 86 pour cent chez les femmes.

Aucun des grands partis politiques français ne s’oppose au droit à l’avortement.

Les groupes religieux et l’Église catholique s’étaient opposés à leur ajout à la constitution et ont exprimé leur tristesse face au résultat. CNews, chaîne d’information télévisée de droite contrôlée par le milliardaire conservateur Vincent Bolloré, a fait sensation la semaine dernière en diffusant un tableau plaçant l’avortement comme la première cause de mortalité dans le monde, devant le cancer et le tabagisme. La chaîne s’est ensuite excusée pour ce qu’elle a qualifié d' »erreur impardonnable ».

La dirigeante d’extrême droite Marine Le Pen a parfois fait des commentaires ambigus sur cette procédure, comme en 2012 lorsqu’elle a critiqué les soi-disant « avortements de complaisance » et s’est demandé si l’assurance maladie nationale devait les couvrir. Dans un livre de 2006, elle écrivait que « tout devrait être fait » pour minimiser le nombre d’avortements.

Mais en janvier, Le Pen et 45 autres députés de son parti, le Rassemblement national, ont voté en faveur du changement constitutionnel, tandis que 12 s’y sont opposés et 14 se sont abstenus. Les trois sénateurs du parti ont également soutenu le changement.



ttn-fr-56