Alors que la sonnette d’alarme retentit déjà, Poutine fait encore monter la tension avec une visite en Biélorussie


Les exercices de l’armée biélorusse à la frontière avec l’Ukraine y sonnent l’alarme. Pour faire monter la tension, le président russe Vladimir Poutine se réunira lundi autour d’un café en Biélorussie.

Eric Brassem

Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a été plusieurs fois invité en Russie cette année. Juste avant l’invasion russe à grande échelle de l’Ukraine, il a été autorisé à assister à un exercice russe avec des missiles nucléaires, assis à côté de Poutine. Et même après cela, il s’est déjà rendu à quelques reprises pour souligner les liens étroits.

Il est grand temps d’y retourner. Lundi, Poutine se réunira à Minsk, la capitale biélorusse, pour discuter d’une coopération économique et militaire plus étroite, a annoncé le Kremlin. Plus tôt ce mois-ci, le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a visité le site. De quoi discuteront exactement Poutine et Loukachenko ? Une autre attaque dans le nord de l’Ukraine ?

Des exercices

La Biélorussie organise depuis mardi des exercices militaires à grande échelle, juste à côté de la frontière avec l’Ukraine. La contraction militaire n’a pas été annoncée et a laissé les dirigeants ukrainiens perplexes quant à son objectif.

En février, l’armée russe avait déjà ouvert son offensive sur Kiev depuis la Biélorussie. Cela a lamentablement échoué et l’armée biélorusse n’a pas participé. Loukachenko a jusqu’à présent refusé de déployer son armée en Ukraine.

La chance qu’il le fasse maintenant est faible, selon des analystes, dont le groupe de réflexion militaire américain Institut pour l’étude de la guerre. Loukachenko vient de faire transférer des chars et d’autres équipements en Russie. En outre, il n’y a actuellement pas un grand nombre de militaires russes en Biélorussie.

Loukachenko (2e g.) et Poutine (d.) plus tôt ce mois-ci au Kirghizistan.Photo Photo Nouvelles

Peu probable, mais quand même

Mais Loukachenko rend déjà un grand service à Poutine en menaçant simplement ce scénario improbable qui force l’Ukraine à garder des troupes dans le nord de toute façon. Ces unités ne peuvent donc pas lutter contre les occupants russes sur les fronts à l’est et au sud.

La direction militaire ukrainienne envisage sérieusement une offensive russe à grande échelle au début de l’année prochaine, également depuis le nord. « Je n’ai aucun doute qu’ils vont tenter une autre attaque sur Kiev », a déclaré jeudi le général ukrainien Valery Zaluzhny dans un communiqué. Les économistes.

Loukachenko ne s’est pas contenté de laisser son pays servir de tremplin russe en février : la Russie bombarde régulièrement des cibles ukrainiennes, comme des centrales électriques, depuis des bases biélorusses. La raison de cette servitude : Loukachenko doit en partie sa position à Poutine. Lorsque des soulèvements de masse ont éclaté en 2020 contre l’élection présidentielle truquée, Loukachenko a obtenu des prêts russes bon marché pour atténuer le coup des sanctions occidentales contre son régime.

Éliminé?

Pendant des années, Loukachenko a essayé de garder les lignes ouvertes avec l’Occident et de maintenir une certaine distance avec la Russie. Cette politique, qui a finalement sombré après la fraude électorale de 2020 et la répression qui a suivi, a été façonnée par le ministre des Affaires étrangères Vladimir Makei. Mais cet artiste de l’équilibre est décédé subitement ce mois-ci. Pas assez docile, éliminé par la Russie, donc soupçons non prouvés.

En tout cas, la Biélorussie ne peut pas être assez soumise à Poutine. Il pourrait également bénéficier de l’aide des troupes biélorusses en Ukraine. Mais la guerre est très impopulaire en Biélorussie – même dans l’armée, selon l’opposition biélorusse. Du côté de l’Ukraine, des centaines de Biélorusses se battent contre la Russie et des groupes biélorusses ont saboté les transports ferroviaires militaires dans leur propre pays.

Rêve eurasien ou cauchemar ?

Loukachenko risquerait son propre régime impopulaire en envoyant des soldats en Ukraine. S’il est renversé, Poutine serait également encore plus loin de chez lui. Ses rêves de Russie en tant que centre de pouvoir d’une grande alliance eurasienne sont déjà brisés par la résistance ukrainienne à son invasion, et la guerre a également semé le mauvais sang dans les républiques d’Asie centrale.

Si son allié la Biélorussie venait à disparaître, le rêve de Poutine se transformerait en cauchemar. Loukachenko peut également faire valoir cet argument, si Poutine insiste pour déployer son armée. La question est de savoir à quel point le président russe est sensible à cet argument. Après tout, avec sa guerre en Ukraine, il a prouvé que les risques ne le dissuadaient pas forcément.

Simultanément à l’annonce de la visite de Poutine, Loukachenko a réaffirmé que « la souveraineté et l’indépendance de la Biélorussie sont inébranlables ». Que le dictateur ait apparemment pensé qu’une telle déclaration était nécessaire en dit long.



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