Nous célébrons le fait que Mose travaille désormais. Mais les barrières ont été conçues pour les marées hautes, qui sont temporaires et ne peuvent pas constituer la solution à la montée chronique des niveaux d’eau. Le rapport 2021 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), l’autorité auprès de laquelle les gouvernements obtiennent les informations les plus fiables, prévoit que l’élévation du niveau de la mer se situera entre 44 et 76 cm au-dessus du chiffre, mais s’ajoutera à l’affaissement naturel du niveau de la mer. Sur le territoire vénitien, le niveau moyen relatif de l’eau de la lagune atteindra environ un mètre d’ici 2100.
D’ici là, une grande partie de la ville s’effondrera. En effet, les bâtiments qui ont tenu debout pendant des siècles s’effondreront car l’eau, s’élevant au-dessus de leurs bases en pierre presque imperméables, pénétrera dans les briques, les émiettera et usera les tirants de fer. Un observateur attentif peut déjà voir où cela se produit en ce moment.
Oubliez donc la provocation de Carlo Ratti dans ce journal du 17 août, dans lequel il propose de laisser Venise sombrer et de profiter ensuite de visites sous-marines de ses bâtiments : la réalité ne sera pas La Cathédrale engloutie, mais un cimetière de ruines et de décombres, un mémorial tragique de notre incapacité à surmonter nos petits intérêts actuels et à planifier l’avenir.
En fait, l’UNESCO critique vivement l’absence de tout plan stratégique pour la ville, qu’il s’agisse du tourisme, des effets du changement climatique ou de l’exode des Vénitiens. Cela n’a rien de surprenant, étant donné que la responsabilité de la ville et de sa lagune est partagée entre au moins huit autorités, de la municipalité à la région, en passant par la province, divers ministères romains jusqu’au Consorzio Venezia Nuova, sans compter l’influence du de puissants intérêts commerciaux comme l’aéroport et le port de Marghera.
Il ne fait aucun doute que l’Italie dispose des experts nécessaires pour élaborer un plan visant à sauver Venise, mais elle manque totalement de la structure législative et administrative nécessaire pour le faire. L’Autorité de la Lagune qui se forme ces jours-ci risque d’ajouter au chaos des autorités, à moins qu’elle n’ait un rôle clairement défini et largement accepté, un financement à long terme, des pouvoirs exécutifs à long terme et un droit au gouvernement central.