Milan est la seule ville avec deux équipes championnes d’Europe : elle mérite deux installations. Au lieu de cela, le projet minimaliste habituel avance
Milan est la seule ville d’Europe à avoir deux équipes capables de remporter la Ligue des champions ou l’ancienne Coupe des champions : Milan l’a remportée sept fois, l’Inter trois. Madrid et Barcelone, Munich et Liverpool, Manchester et Lisbonne ne jouissent pas d’un privilège similaire, pas même Londres, qui compte toujours de nombreux clubs en Premier League (cette saison il y en a six, par exemple) : tous ont eu un club champion l’Europe, mais aucun n’en a eu deux. Bref, si on cherche la capitale du football continental, il faut faire un bout de chemin. C’est ici : à Milan.
En lisant les noms des villes que nous avons citées – mais on pourrait en ajouter bien d’autres – il y a un autre élément qui saute aux yeux : aucune d’entre elles n’a qu’un seul stade de football, elles en ont toutes plus. Et, absolument, aucun club qui a remporté la Ligue des champions n’est obligé de partager son usine avec un club cousin. L’équation est assez simple, on dirait élémentaire : une équipe, un stade. La situation est donc paradoxale : Milan, reine d’Europe grâce aux trophées européens de Milan et de l’Inter, est Cendrillon car ces deux grands clubs doivent coexister à l’intérieur du San Siro. Reine et Cendrillon à la fois : curieuse, certes ; déroutant aussi.
Cette situation revient sur le devant de la scène maintenant que la construction du nouveau San Siro, objectif de Milan et de l’Inter depuis des années, subit un nouveau ralentissement brutal. Tellement, trop brusquement, qu’il devient terriblement difficile d’imaginer la naissance de la nouvelle implantation milanaise dans cette zone non seulement dans un délai court ou raisonnable, mais aussi sur une longue période. Pour le moment, le projet semble destiné à se terminer dans une impasse. Après tout, comment peut-on imaginer réaliser un travail aussi important sans l’appui du gouvernement, mais plutôt devoir composer avec l’opposition ferme des représentants de l’exécutif ? Pourtant, les Rossoneri et les Nerazzurri n’ont pas abandonné, ils ont continué, gaspillant de l’argent et du temps pour tenter de faire tomber un mur trop fort. Quand ils se rendront compte que c’est un effort vain, ils essaieront de contourner l’obstacle en construisant le stade ailleurs, peut-être à Sesto San Giovanni, mais toujours ensemble : moitié moi et moitié toi. La moitié des coûts de construction, surtout : mieux vaut économiser.
La vraie question, comme mentionné, devient précisément celle-ci : la construction d’un stade pour deux. Deux clubs, deux équipes, deux supporters destinés à être ensemble. Un chemin différent de ce qui s’est passé au fil des ans dans toutes les villes d’Europe. Un choix modeste, qui ne devrait pas appartenir à de grands clubs comme Milan et l’Inter, avec un passé extraordinaire et un public formidable, capable de remplir San Siro même pour un huitième de finale aller de la Coupe d’Italie contre Parme (c’est arrivé hier). Devant tant d’histoire et tant de passion, Cardinale et Zhang entendent se partager les dépenses, si bien que tout sera divisé par deux, ou du moins sensiblement réduit. Évidemment aussi les revenus, qui devraient plutôt permettre aux deux sociétés de faire un saut de qualité.
Milan et l’Inter sont confrontés à la question du stade avec une mentalité ancienne et dépassée, et pas seulement à l’étranger mais aussi en Italie : à Turin, par exemple, la Juve et Toro jouent dans des stades différents, et Rome et la Lazio n’ont même jamais pensé à vivre ensemble dans la même installation planifiant leur avenir loin de l’Olimpico. Pourquoi cela se passe-t-il à Milan, le cœur économique de notre pays ? Parce que le Milan de Cardinale et l’Inter de Zhang ont une vision minimaliste de l’avenir. Et nous avons les signaux sous les yeux tous les jours : il suffit de regarder les difficultés avec lesquelles ils évoluent sur le marché.
11 janvier 2023 (changement 11 janvier 2023 | 07:16)
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