Totti et Ilary se séparent, le format joueur-tissu entre en crise et moi aussi je ne me sens pas très bien


Il y a des mariages qui marquent les époques. Quand commencent-ils et quand se terminent-ils : demandez à Henry VIII et Anna Bolena, par exemple. Si nous parlons des vivants, il est curieux que l’ère de la pandémie s’est ouverte avec la fin de l’amour entre Silvio Berlusconi et Francesca Pascale (mars 2020) et maintenant elle pourrait se fermer (du moins nous l’espérons) avec le mariage entre Cav. et Marta Fascina. Ou avec la séparation encore plus probable entre les «Pupone» et les «Letterina». Eh bien oui : Francesco Totti et Ilary Blasi seraient partis et déjà depuis quelques mois. Les confirmations officielles manquent mais ceux qui savaient s’empressent de chuchoter dans les bonnes oreilles. Et la presse spécialisée – le journalisme italien compte les professionnels les plus sérieux au monde, quand il s’agit de choses peu sérieuses – s’y vautre.

Si vous cherchez tous les détails sur « qui a trahi qui », pourquoi et comment, merci de changer de chaîne. Au final ça se résume à des détails et on s’intéresse plutôt au fond de l’affaire : après 20 ans d’amour, presque 17 ans de mariage (bon sang !), trois enfants et même une série télé sur son exceptionnalisme footballistique et exceptionnalisme du feeling avec elle, les rues de l’ancien numéro 10 de Rome et du présentateur Mediaset se partagent. Et, avec la fin de leur amour, le concept même d’union entre le joueur et le tissu meurt. Un modèle, un art de vivre ou, mieux encore, un format qui fait partie du patrimoine commun du pays depuis la fin des années 90. Lui doué par Dame Nature de bons pieds, elle d’une beauté olympique. Lui qui s’affirme sur le grand champ vert où naissent les espoirs, elle sur le petit écran où ils se réalisent.

Non seulement bons et beaux, Totti et Ilary, mais aussi merveilleux « athlètes d’eux-mêmes ». Le Capitaine est un personnage sur le terrain (qu’il s’agisse de donner des coups de pied à la cuillère ou de faire le geste de la lame) et même à l’extérieur, où il joue le rôle de l’adorable niais mais, entre une blague et une publicité, il a toujours quelque chose de significatif à dire. Ilary de l’aspect ornemental de la beauté de Bouche à oreille passe à la conduction intelligente de Hyènes. Ensemble, ils collectionnent les portraits d’un album photo trop beau pour être vrai : du t-shirt « 6 unica » à l’exultation avec le pouce fourré dans la bouche, du mariage à l’Aracoeli diffusé en direct sur Sky à la dédicace moqueuse adressée à la Petit homme Luciano Spalletti. Des scènes d’un mariage déjà mythique sur lesquelles la fiction J’espérais mourir en premier a fait tomber une nouvelle couche de mythologie.

Depuis près de 20 ans, ici en Italie, les grands garçons rêvaient d’être footballeur, les filles le tissu. Non seulement cela, mais aussi grâce à Totti et Ilary. Alors que Totti et Ilary se séparent, il faut se rendre compte que cette Italie n’existe plus, tout au plus est-elle devenue quelque chose de résiduel, comme le catholicisme en Angleterre après le mariage entre Henri VIII et Anna Bolena. Le web a tout changé, notamment chez les plus jeunes : le ballon a perdu de son attrait, la télévision n’est plus au centre de nos foyers, les bons footballeurs partent jouer à l’étranger et les showgirls ne se souviennent même plus de leurs noms. Le plus beau couple du monde est de Ferragnez mais, si vous rayez le marketing, il ne reste plus rien ou presque. Totti et Ilary se séparent, le format joueur-tissu entre définitivement en crise et moi non plus je ne me sens pas très bien. Nous ne sommes pas des romanistes et même pas de grands fans de télévision privée généraliste. C’est que Chiara Ferragni ne songerait jamais à prendre position contre l’employeur de son mari. Et Fedez ne lui marquerait jamais un penalty décisif contre l’Australie.



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