Sports d’hiver en période de changement climatique : pluie au lieu de neige et vertes prairies alpines


Les stations de ski européennes virent actuellement au vert sans précédent, en partie parce que les Alpes se réchauffent plus rapidement que la moyenne mondiale. Cela a des conséquences majeures sur les saisons de ski, constatent scientifiques et praticiens.

Niels Waarlo et Oscar van Putten

Un courant d’air persistant qui apporte de la chaleur des régions subtropicales provoque la variante hivernale d’une vague de chaleur dans certaines parties de l’Europe. Dans les vallées des Alpes battre des records de chaleur, jusqu’à 2 000 mètres d’altitude, la neige ne tombe pas. Certaines stations de ski sont fermées, en France même la moitié des pistes étaient fermées fin décembre, selon l’association professionnelle française DSF. D’autres essaient d’en tirer le meilleur parti avec des canons à neige.

Une conséquence du changement climatique ? Son rôle dans les extrêmes météorologiques individuels est souvent difficile à démontrer, explique Peter Siegmund, climatologue au KNMI. Dans tous les cas, il est clair que le climat se réchauffe également dans les montagnes, ce qui signifie que les semaines d’hiver pauvres en neige se produiront de plus en plus souvent.

Piste de ski à Schruns, Autriche.ImageAFP

Les Alpes se sont déjà réchauffées d’environ 2 degrés au cours des cent dernières années, soit le double de la moyenne mondiale, selon l’Agence européenne de l’environnement. Ce réchauffement très rapide est en partie dû à la disparition des neiges réfléchissantes et des glaciers : les surfaces sombres absorbent plus de chaleur que les surfaces claires. Les précipitations dans les zones de montagne devraient augmenter, mais elles tomberont de plus en plus sous forme de pluie plutôt que de neige. Pour chaque degré de réchauffement, la ligne de neige monte d’environ 150 mètres, selon l’agence de l’UE.

Les effets sont facilement mesurables dans les Alpes, comme l’a montré par exemple une étude à grande échelle en 2021 avec les données de deux mille stations de mesure, réparties sur toute la chaîne de montagnes. En dessous de 2 000 mètres, il y a en moyenne environ un mois de moins de neige que dans les années 1970, selon le rapport la publication dans la revue spécialisée The Cryosphere. À des altitudes plus élevées, il fait si froid que peu de différence était perceptible.

Piste de neige artificielle à Riggisalp, Suisse.  Image ANP/EPA

Piste de neige artificielle à Riggisalp, Suisse.Image ANP/EPA

Les montagnes sont des lieux où les conséquences du changement climatique se concrétisent à un stade précoce. «Le changement climatique est mon métier, mais maintenant cela devient personnel», écrit Reto Knutti, professeur de physique climatique à l’ETH Zurich, sur Twitter, sous-titrant une photo de la montagne où il a appris à skier lorsqu’il était enfant. Actuellement, il n’y a qu’une fine bande de neige.

Dans les décennies à venir, l’enneigement continuera très certainement à se dégrader, surtout en dessous de 2 000 mètres, selon le panel climatique international IPCC. Politique climatique ambitieuse ou pas : dans trente ans, des massifs comme les Alpes auront perdu environ un quart de leur masse neigeuse, est l’estimation.

La gravité de la situation dépend ensuite des émissions de gaz à effet de serre à venir. Mais dans tous les scénarios, les chaînes de montagnes perdent une masse de neige de plusieurs dizaines de pour cent, voire la majeure partie si les choses tournent mal. Une saison de ski sera de quelques semaines plus courte dans des décennies qu’elle ne l’est actuellement. Ce sont toujours des moyennes : même des années exceptionnellement enneigées se produiront probablement malgré un réchauffement climatique.

Les stations de ski situées plus bas seront particulièrement affectées par le changement climatique. Selon l’Agence européenne pour l’environnement, près de la moitié des stations en Suisse et un nombre encore plus important en Allemagne, en Autriche et dans les Pyrénées risquent d’attirer suffisamment de touristes et d’amateurs de sports d’hiver en hiver. Le secteur européen menace de perdre des milliards d’euros de chiffre d’affaires chaque année, même si les dégâts dépendent de la manière dont les stations parviennent à s’adapter.

Par exemple, l’utilisation de la neige artificielle jouera un rôle de plus en plus important, mais cela coûte beaucoup d’énergie et d’eau. Les vacances aux sports d’hiver déjà chères ne seront probablement pas moins chères. Une partie du plaisir du ski peut également se déplacer vers des pays plus nordiques, par exemple en Scandinavie, écrit le consultant suisse Laurent Vanat dans son rapport annuel international sur le tourisme de neige et de montagne.

Piste de ski en neige artificielle à Villars-sur-Ollon, Suisse.  Point d'accès d'image

Piste de ski en neige artificielle à Villars-sur-Ollon, Suisse.Point d’accès d’image

Il y a aussi des conséquences pour les compétitions sportives. Même dans le scénario le plus positif, seuls 13 des 21 sites où se sont tenus les précédents Jeux olympiques d’hiver auront de la neige fiable dans 30 ans, selon le GIEC.

Cela pourrait-il également signifier la fin des sports d’hiver dans des endroits désormais populaires ? Selon le GIEC, cette possibilité ne se cache que dans le scénario climatique le plus sombre d’ici la fin du siècle. Dans ce scénario, la politique climatique mise en place échoue complètement, la population mondiale explose et le développement des technologies durables est décevant. À moins que les stations de ski ne changent radicalement leur mode de fonctionnement, la grande majorité sera fermée d’ici la fin de ce siècle.





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