Simon Sterck s’entretient avec les ministres du climat à Dubaï à l’âge de 18 ans : « Vous rencontrez tout le monde ici au petit-déjeuner »

Le sommet sur le climat de Dubaï semble voué à l’échec. Simon Sterck, le représentant de la jeunesse du Conseil flamand de la Jeunesse à l’ONU, reste toutefois prudemment optimiste. «Ce qui autrement prendrait un an peut être réalisé ici en quelques jours seulement.»

Anne De Boeck

« Non financé par l’industrie des combustibles fossiles. » L’avertissement apparaît en grosses lettres sur le badge d’entrée de Simon Sterck à Dubaï. Il a à peine 18 ans et pourtant, le représentant jeunesse de l’ONU au Conseil flamand de la jeunesse est déjà en troisième année de droit. Lors de la conférence sur le climat, le Louvain défend une politique climatique juste et ambitieuse en faveur de la jeunesse belge. Mais le vent contraire semble fort.

La conclusion finale provisoire ne mentionne pas une élimination progressive des énergies fossiles. Le sommet risque-t-il d’échouer ?

« Le texte est moins ambitieux qu’espéré. Dans la dernière version pour le moment (celui du lundi soir, ADB) affirme que nous pourrions réduire les combustibles fossiles, mais pas que nous le devons. Il n’est pas non plus question d’une élimination totale. C’est assez facultatif. Pourtant, le consensus scientifique est clair : il faut arrêter d’utiliser les énergies fossiles. J’espère que de nouveaux progrès seront réalisés lors de la dernière nuit de négociations.

À quel point êtes-vous déçu ?

« Cela me déçoit particulièrement que les données scientifiques ne soient toujours pas prises en compte. Que tant de pays écoutent le lobby des fossiles. La victoire de l’industrie pétrolière aura des conséquences majeures pour de nombreuses personnes, y compris pour ma génération. Nous paierons plus tard un prix bien plus élevé que celui désormais associé à la transition vers un monde plus durable. Si nous parvenons à stopper la hausse attendue de la température ne serait-ce que d’un dixième de degré, cela fera toute la différence.»

Le lobby pétrolier à Dubaï semble-t-il plus fort que prévu ?

« À ce sommet se trouvent environ 400 représentants de peuples indigènes qui risquent d’être durement touchés par le changement climatique. Dans le même temps, les lobbyistes du secteur pétrolier sont sept fois plus nombreux. Nous ne pouvons pas les exclure, car ils font partie de la solution. Mais force est de constater qu’ils sont très présents et tentent d’influencer le plus possible le résultat. D’où la clause de non-responsabilité sur mon badge. La jeunesse européenne, les scientifiques et la société civile tentent de réagir ensemble.»

Sera-t-il possible de faire une différence ?

« Bien sûr, nous ne sommes qu’une petite pièce du puzzle, mais nous influençons les négociateurs européens, qui tentent à leur tour de convaincre les autres dirigeants mondiaux.

« Ici, au petit-déjeuner, on rencontre tout le monde : les politiques, l’administration, l’industrie. Ensuite, vous vous asseyez l’un à côté de l’autre et partagez vos inquiétudes. Ce n’est pas un hasard si tout le monde ici a de petits yeux ; les gens travaillent tôt le matin jusque tard le soir. En ce sens, cette COP28 est un accélérateur. Une politique climatique qui, autrement, ne prendrait qu’un an, peut soudainement être réalisée en quelques jours seulement.»

Vous avez siégé aux côtés de nombreux hommes politiques belges, dont le Premier ministre De Croo. Est-ce que cela a apporté quelque chose ?

«Souvent, cette soi-disant participation des jeunes est principalement une séance de photos, mais dans ce cas, il s’agissait de conversations vraiment constructives. Par exemple, la ministre du Climat Zakia Khattabi (Ecolo) a promis de vérifier si nous pouvions inclure la participation des jeunes dans la nouvelle loi climatique. Pour que les jeunes puissent rencontrer tous les six mois le ministre du Climat ou le Premier ministre pour discuter de la politique climatique. Cela se produit déjà aux Pays-Bas.»

Que dites-vous aux jeunes déçus de ce sommet ?

« Ce n’est pas sympa d’expliquer aux jeunes ce qui se passe ici, parce que je constate qu’il y a une sorte de lassitude. J’essaie surtout de souligner qu’il est toujours logique de continuer à pousser le chariot. Par exemple, le Green Deal européen n’aurait jamais été aussi ambitieux si les jeunes n’étaient pas descendus dans la rue. Un message d’espoir donc. Il ne s’agit pas d’un espoir naïf, comme un souhait du Nouvel An, mais d’un espoir affirmé : continuer.»

Voyez-vous déjà des points lumineux ?

« Absolu. Par exemple, lors de ce sommet, un accord a été conclu sur la création d’un fonds de compensation. Les pays les plus pauvres pourront utiliser l’argent de ce fonds pour amortir les conséquences du changement climatique. L’année dernière, il y a eu deux semaines de discussions sur ce fonds, mais aucun accord n’a été trouvé. C’est maintenant. Mais c’est bien sûr à nous de voir ce que donneront réellement ces promesses.»

Vous défendez la justice climatique au nom du Conseil flamand de la jeunesse. Que veux-tu dire par là?

« La crise climatique menace de frapper injustement durement certains pays. Pour un archipel comme Vanuatu, les décisions prises lors de ce sommet sont véritablement vitales. La montée du niveau de la mer menace leur vie et l’environnement dans lequel ils ont grandi.

« Il y a aussi un aspect intergénérationnel. Non pas que nous voulions pointer du doigt les personnes âgées, mais le fait est que nous et nos futurs enfants subirons les conséquences de la politique climatique actuelle. Même si on enlève le CO2Si nous arrêtons les émissions aujourd’hui, les effets climatiques ne feront qu’empirer pendant encore trente ans. Quiconque ne fait pas preuve aujourd’hui d’ambition climatique est injuste envers les générations futures.»

La politique climatique belge est-elle équitable ?

« Certainement pas assez. Équitable signifie que vous ne vous contentez pas d’accorder de grosses primes pour des panneaux solaires, par exemple, si vous savez que vous soutenez principalement un petit groupe qui a déjà beaucoup d’argent. Ou qu’il faut d’abord mettre en place des transports publics solides avant de supprimer les voitures diesel.»



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