Réduction des coûts ou adieu au gaz russe, c’est pourquoi il faut choisir à court terme


Réduction du coût des factures et indépendance vis-à-vis de la Russie sont deux objectifs cruciaux, mais à court terme, il est difficile de les concilier. Alors que les deux doivent être poursuivis, sur des pistes qui finissent par se rejoindre, à long terme. Évaluer en urgence une réduction de la consommation d’énergie mais en évitant de nuire aux grandes entreprises par le mécanisme de l’interruptibilité de l’approvisionnement en gaz. Et en valorisant le gaz issu de sources renouvelables. Selon Carlo Montella, avocat et responsable de l’équipe Énergie chez Orrick, il s’agit de la seule approche réaliste pour s’attaquer au problème énergétique, avec une longue expérience internationale dans le domaine du développement de projets et de l’acquisition et du financement d’actifs dans le domaine de l’énergie et des infrastructures. Montella partage donc pleinement la double stratégie promue par le gouvernement Draghi d’un plafonnement européen du prix du gaz russe, dont il est illusoire d’imaginer une rupture à court terme, et d’une diversification parallèle, dans le sillage de la Mission algérienne à laquelle le gouvernement italien fait face ces jours-ci.

Paix ou air conditionné, résumait il y a quelques jours le Premier ministre Draghi un peu brutalement, présumant toutefois que l’embargo de Moscou n’est pas sur la table pour l’instant. Mais dans quelle mesure la perspective d’une indépendance énergétique vis-à-vis de la Russie, invoquée par exemple par le secrétaire du Parti démocrate, Enrico Letta, est-elle réaliste ?

Indépendamment des jugements sur les mérites de l’embargo, je dirais dans un esprit de réalisme sain que nous ne pouvons tout simplement pas nous le permettre, car cela entraînerait un coût insoutenable, non seulement pour les familles, mais aussi pour les grandes entreprises énergivores qui l’économie va. En revanche, j’espère que la définition d’un price cap pourra être atteinte au plus vite au niveau européen, un plafonnement maximal du prix du gaz par l’Europe en tant que premier acheteur de gaz au monde, et donc dotée d’un pouvoir de négociation qu’aucun État membre ne peut avoir à lui seul.

On revient pour parler d’austérité, parmi les amendements au projet de loi décret il y a des amendements parlementaires sur les économies d’énergie sur les radiateurs, les climatiseurs, l’éclairage public. Dans l’hypothèse d’un embargo, à combien serviraient-ils ?

Dans le scénario, je le répète, totalement virtuel, d’une panne de gaz russe, il faudrait avant tout s’appuyer sur les stocks, remplis au maximum de leur capacité, maximiser l’importation de GNL (Gaz Naturel Liquéfié), des USA et au-delà , s’appuyant sur des plateformes flottantes de regazéification, pour saturer au maximum les gazoducs existants (Tap, Transmed) et limiter inévitablement la consommation. Éteindre les radiateurs et les climatiseurs n’est pas une réponse structurelle au problème, mais si nous étions obligés de rationner nous ne pourrions certainement pas partir des hôpitaux, des gares ou des grandes entreprises énergivores, pour des raisons évidentes d’impact socio-économique . Nous serions obligés de commencer par les familles et ensuite, par la suite, par les PME.

En réduisant la consommation, qu’adviendrait-il du prix de l’essence ?

La lutte contre les factures coûteuses et l’indépendance énergétique sont des binaires parallèles mais distincts, et nécessitent des réponses différentes. Paradoxalement, en cas d’embargo, du moins dans un premier temps, les prix du gaz pourraient même augmenter, ou du moins ne pas baisser.

La stratégie du gouvernement en cas de crise gazière est celle indiquée dans le Plan d’Urgence annexé à l’Arrêté Ministériel du 18 décembre 2019, qui prévoit diverses interventions selon trois niveaux : alerte précoce, alerte et urgence.

Il va dans le bon sens, prévoit entre autres des mesures de marché qui s’encadrent dans la diversification des sources d’approvisionnement, qui a eu lieu après 2019 mais seulement partiellement. Mais il doit aussi être intégré à des interventions favorisant la structure de production de gaz renouvelable. C’est un aspect très important. L’Italie peut produire du gaz vert, du biométhane à partir de Forsu (fraction organique des déchets solides urbains) ou à partir de déchets agricoles, des systèmes qui font fonctionner la chaîne d’approvisionnement nationale.



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