Rapport : les gouvernements européens piratent les téléphones des citoyens et personne ne vérifie


Il doit y avoir une surveillance européenne des écoutes téléphoniques par les États membres. Les dispositifs d’écoute clandestine sont aujourd’hui largement abusés : les pays invoquent leur sécurité nationale, alors que dans de nombreux cas ce n’est pas du tout le cas. C’est la principale conclusion d’un rapport que l’eurodéputée néerlandaise Sophie in ‘t Veld a présenté mardi matin.

Les logiciels d’espionnage tels que le Pegasus à l’origine israélien ne sont pas seulement utilisés contre des criminels ou des espions étrangers, mais aussi au sein de l’UE contre des journalistes et des membres de l’opposition. « Et pas par hasard ou par accident, cela fait partie d’un système », a déclaré l’eurodéputé D66 lors d’une conférence de presse.

VOIR. Installez un logiciel d’espionnage pour suivre les journalistes et les militants du monde entier via un téléphone. Cela ressemble à un thriller d’espionnage, mais selon les médias internationaux, c’est vraiment arrivé

In ‘t Veld (D66) a été envoyé pour enquêter par le Parlement européen après qu’il est apparu l’année dernière que des milliers de personnes, dont plusieurs hommes politiques importants tels que Charles Michel et le président français Emmanuel Macron, avaient été mises sur écoute. Et « entendu » est un mot trop vieux. Les logiciels espions peuvent être utilisés pour prendre le contrôle d’un smartphone et en extraire tout le contenu, y compris les documents, les images et les messages. « L’accès au système de la victime peut être manipulé et du contenu fabriqué planté. Le microphone et la caméra peuvent être activés à distance et transformer l’appareil en espion dans la pièce. Pendant tout ce temps, la victime n’est au courant de rien.

L’eurodéputée néerlandaise Sophie in ‘t Veld (D66) dans la salle plénière du Parlement européen à Bruxelles. © ANP

Le rapport mentionne la Pologne, la Hongrie, Chypre, la Grèce et l’Espagne comme les principaux utilisateurs lorsqu’il s’agit d’utiliser cette technologie contre leurs propres citoyens. Des membres de l’opposition et des journalistes en particulier en sont victimes, le rapport donne de nombreux exemples. « Le matériel obtenu peut être utilisé non seulement pour observer des actions, mais aussi pour faire chanter, discréditer, manipuler et intimider les victimes. »

À propos de la Belgique, il contient Rapport de 159 pages une demi-page. On peut notamment lire comment le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open Vld) a admis l’an dernier que les services de renseignement belges Pegasus pouvoir utiliser légalement espionner les smartphones des gens, sans confirmer si cela se produit réellement.


Devis

L’utilisation abusive de logiciels espions contre des journalistes, des militants et des politiciens de l’opposition est une attaque directe contre l’État de droit.

Jeroen Lenaers, CDA Parlementaire européen

En mai dernier, le gouvernement espagnol a admis que le téléphone du Premier ministre Pedro Sanchez avait également été piraté.

En mai dernier, le gouvernement espagnol a admis que le téléphone du Premier ministre Pedro Sanchez avait également été piraté. ©AFP

Le rapport sera débattu au parlement en décembre. Mais le président de la commission parlementaire qui s’en occupe, l’eurodéputé CDA Jeroen Lenaers, dit déjà que le rapport devrait susciter plus que l’attention des médias. « Une législation européenne est nécessaire pour l’utilisation de logiciels espions par les États membres. De plus, des règles d’importation et d’exportation doivent être introduites pour l’achat de logiciels espions. Il est également important que nous établissions le droit à la transparence pour les victimes d’opérations d’écoute électronique.

Lenaers utilise des mots similaires à son collègue du D66 : « L’utilisation abusive de logiciels d’espionnage contre des journalistes, des militants et des politiciens de l’opposition est une attaque directe contre l’État de droit », dit-il. « Il est donc grand temps que les États membres et la Commission européenne s’y mettent enfin. »

Trop en laisse États membres

La coopération entre les États membres ne suffit certainement pas pour résoudre ce problème, les États membres sont souvent eux-mêmes les contrevenants, cela doit se faire via les institutions bruxelloises et Europol, écrit In ‘t Veld dans son rapport. Les États membres ont également refusé de coopérer à son enquête. Elle a déclaré ce matin qu’elle attendait du Parlement européen qu’il fasse des propositions concrètes après avoir examiné son rapport. La question de savoir si ceux-ci seront effectivement introduits est une autre question : la Commission européenne a le droit d’initiative dans l’UE et, selon In ‘t Veld, elle est trop à l’initiative des États membres.

Elle s’en est montrée dure ce matin lors de sa conférence de presse : « Récemment, Elon Musk s’est emparé de Twitter. L’inquiétude est grande et le commissaire européen Thierry Breton a immédiatement prévenu Musk qu’« en Europe, l’oiseau volera selon nos règles ». La Commission est déterminée à lutter contre les attaques extérieures contre la démocratie. Mais quand les attaques contre la démocratie viennent de l’intérieur, la Commission reste silencieuse. Dès lors, la défense de la démocratie européenne n’est plus une affaire européenne, mais une affaire des États membres. La Commission montre du muscle à Musk, mais des gants de velours aux États membres qui utilisent des logiciels espions contre les citoyens. Ni la Commission ni les États membres n’ont répondu au rapport.



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