Il est très important pour Erik Dijkstra de nous rappeler la « grève oubliée ». De Hengelo, Haaksbergen à Heerlen, un demi-million de Néerlandais ont arrêté le travail en 1943. Il a écrit un livre sur le comment, le pourquoi et les conséquences de ces quelques jours de résistance massive Grève pour la vie et la mort et a réalisé une série télévisée éponyme en trois parties. Il était là lundi soir Khalid&Sophie pour nous rappeler la première diffusion le soir même. Khalid se demande pourquoi cette grève n’est pas obligatoire à l’école, et pourquoi il n’y a pas de journée nationale de commémoration, comme ce fut le cas pour la grève de février (1941) à Amsterdam. Une explication peut être que cette grève était quelque chose de la province. Les villageois qui n’avaient parfois jamais vu un soldat allemand pendant la guerre des années avant la grève, ont protesté.
La raison : la Wehrmacht a appelé tous les anciens soldats néerlandais à se présenter au travail en Allemagne. Ils avaient déjà « nos machines et nos matériels », raconte un descendant de gréviste. « Maintenant, ils voulaient aussi nos hommes. » Les employés de l’usine de machines Stork ont commencé : ils ont arrêté le travail le 29 avril, immédiatement après le déjeuner. La téléphoniste Femy Effrink a alors appelé toutes les usines à – « passer le mot » – à appeler tout le monde à faire grève également. Agriculteurs, commerçants, élus municipaux, au sommet, une grande partie du pays était plate. Douloureux de penser maintenant, après, en toute sécurité et en temps de paix, qu’il était possible d’offrir une résistance nationale lorsque les pères et les soutiens de famille néerlandais étaient menacés d’être appelés. Mais combien de pères, de mères et d’enfants néerlandais avaient déjà été emmenés sans révolte ?
À propos, il y avait un autre opérateur téléphonique, Gré Hekket des chemins de fer néerlandais, qui a appelé tous les chefs de gare à faire la grève dans un télex. Elle a été trahie, la direction NS l’a remise aux occupants qui l’ont capturée. Elle a survécu, mais a refusé de voyager à nouveau en train après la guerre.
Troncs d’arbres sur la route
Erik Dijkstra fait un joli tour de tous les lieux où la grève a laissé des traces dans la vie des gens. A commencer par Marum, Groningen, où Foppe de Jong (93 ans) n’évoqua jamais ce jour de 1943 qui allait marquer sa vie. Peu de temps avant sa mort, il raconte encore son « horrible secret » sur le meurtre de masse de Marum en mai.
Il y avait déjà du mécontentement parmi les mineurs de Heerlen avant la grève. L’occupant leur avait enlevé leur jour de repos dominical, la charge de travail était trop élevée et ils avaient déjà dû rendre leurs pigeons voyageurs. A Nieuwe Pekela, les réformés orthodoxes fréquentaient les communistes, ils ont fait sortir le maire du NSB de la mairie et l’ont jeté dans le canal. À Blauwhuis, en Frise, la grève est connue comme la grève du lait, les agriculteurs ont vidé leurs bidons de lait en signe de protestation.
Les rapports de la grève parvinrent à Hitler, qui ordonna une réponse énergique avant que le soulèvement ne se propage en Belgique et en France. Hanns Albin Rauter, le plus haut SS des Pays-Bas, a dû réprimer la grève. Il l’a fait en faisant fusiller ou arrêter sur place, pas trop mais juste assez de personnes – grévistes ou non – puis fusillées.
De même à Marum. Là, des techniciens allemands avaient rencontré des troncs d’arbres sur le chemin d’une position militaire. Foppe de Jong se souvient qu’à l’âge de 12 ans, il se tenait au bord de la route pour « jeter un coup d’œil ». Il avait été cloué au lit avec la tuberculose pendant trois ans, dit-il. « Je voulais aussi vivre quelque chose. » Être arrêté, ça lui semblait quelque chose. Son père l’a renvoyé, pour être lui-même arrêté un peu plus tard, avec quatorze autres hommes et Steven, 13 ans. Petit ami de Foppe. Il avait mis ces arbres sur la route. Mais moi, dit Foppe, j’y avais pensé.