Qui est Marc Tarabella (ex-PS), eurodéputé et suspect dans le scandale de corruption au Qatar ?


Qui est Marc Tarabella ? Petit-fils d’un mineur italien, ancien leader étudiant, ancien employé de banque et autrefois le plus jeune et l’un des maires les plus populaires de Wallonie. Maintenant le chien mordu.

Anthisnes, Commune du Commerce Équitable. Quiconque entre en voiture dans le port d’attache de l’eurodéputé PS Marc Tarabella sait immédiatement où il en est. Ici, nous travaillons pour une bonne cause. Les Anthisnois sont en effet des gens un peu raides du « dehors », mais apparemment aussi préoccupés par les grands problèmes mondiaux de leur temps. Celui qui leur a appris à élargir leurs horizons porte l’écharpe de maire depuis 28 ans : le député PS Marc Tarabella (59).

La ferme du château La Chapelle.Image VR

Anthisnes compte 4 200 habitants, inégalement répartis sur quatre sous-communes et encore plus de hameaux. L’ensemble est un joyau bien caché du Condroz liégeois. La commune est un peu à l’écart des grands axes de circulation, comme la Route Du Condroz (RN63, Liège-Marche) et possède encore l’imposante place carrée et les fermes-château nécessaires.

Le berceau de Tarabella n’était pourtant pas là, mais à une vingtaine de kilomètres plus loin sur les rives de la Meuse, dans le bastion d’acier gris d’Ougrée. Le grand-père Tarabella est venu dans notre pays de Seravezza en Toscane en 1946 pour travailler dans la mine. Femme et enfants ont suivi un peu plus tard. L’un d’eux était Bruno, père de notre héros, né début 1963.

Ougree.  C'est là que se trouvent les racines belges de la famille Tarabella.  Image VR

Ougree. C’est là que se trouvent les racines belges de la famille Tarabella.Image VR

Au début des années quatre-vingt, Marc Tarabella et sa sœur Manuela appartiennent à la première génération à poursuivre leurs études. Après avoir obtenu un brevet de régent à l’école normale, il obtient une licence en sociologie à l’ULG. Intéressé par la politique dès son plus jeune âge, Tarabella lui a insufflé un nouveau souffle durant ses années étudiantes dans la section locale du mouvement étudiant socialiste. Cela ouvre des portes. En 1985, il rencontre le leader du PS Guy Coëme. Après ses études, il est repris par son cabinet lorsque Coëme devient brièvement Premier ministre wallon (1988). Après, Tarabella sert aussi l’excellence du PS Bernard Anselme.

Primus

Il se rend vite compte que l’existence d’un cabinard est trop incertaine pour un tout nouveau mari et père. Fin 1989, le jeune député PS — qui vient de devenir conseiller municipal dans sa nouvelle ville natale d’Anthisnes — passe un concours à la banque d’État de l’époque ASLK (CGER en français, entre-temps devenue BNP-Parisbas-Fortis, éd. .) Il finit premier de 3.500 candidats et devient « commis d’agence » à l’agence Liège Centre. Travail qu’il exercera pendant quatorze ans. Tarabella devient également déléguée syndicale.

CGER/ASLK Image Archives historiques BNP Parisbas Fortis

CGER/ASLKImage Archives historiques BNP Parisbas Fortis

Les clients ASLK de l’époque — l’agence Liège-Centrum était aussi « ma » succursale bancaire dans un passé vague et lointain — se souviennent encore de l’employé de banque toujours sympathique et jovial. Le jeune homme, équipé d’un point d’embon de départ et de ce qu’on appelle si joliment « un visage poupon » en français, un visage rond de garçon innocent. Trait physique qui est resté.

Jeune équipe

Le travail à la banque peut parfaitement se combiner avec le mandat de conseiller municipal. Et elle est idéale lorsqu’une nouvelle campagne locale se présente quatre ans plus tard (1994). La candidate Tarabella prend 40 jours de vacances — c’est facile à la banque — et parcourt personnellement toutes les maisons d’Anthisnes une par une. « Je voulais revoir tout le monde avant les élections », dit-il après les urnes. Avec 580 votes préférentiels, Tarabella devient maire à 31 ans, alors le plus jeune de Wallonie. Il va travailler à la tête d’une équipe très jeune — 33 ans en moyenne.

Le nouveau maire d’Anthisnes est sympathique et jovial. Le genre de politicien qui salue tout le monde — il connaît désormais tous les habitants de sa commune — et embrasse spontanément les dames sur la joue. Il passe à chaque fête ou rassemblement. Chaque retraité d’anniversaire reçoit une visite. Le dimanche, il se tient le long de la ligne au Royal Sporting Club provincial Anthisnois, matricule 1608 et seul fait marquant sportif, une défaite 1-3 en 1/8 de finale de la Coupe de Belgique en 1956 devant 3 639 spectateurs payants.

135 kilos

Un bon vivant aussi, 135 kilos à sec sur le crochet. Un homme qui aime le vin rouge italien et un bon restaurant italien, mais aussi « une chope » (verre de bière d’un demi-litre, ndlr) au (maintenant fermé) Café De La Coupole ou au Café Friterie du Centre. S’il brûle quelque part à Anthisnes, il y arrivera plus vite que les pompiers. L’étalage vestimentaire n’est pas pour lui. Côté intérieur c’est invariablement chemise, cardigan et jean un peu informe : côté tenue, Tarabella, c’est un peu la version wallonne de Guy D’haeseleer.

Lors des incendies à Anthisnes, Tarabella est souvent là avant les pompiers, Voici l'incendie fatidique du 20 février 2008 à Hody, qui a tué une femme et deux enfants.  Photo BELGA

Lors des incendies à Anthisnes, Tarabella est souvent là avant les pompiers, Voici l’incendie fatidique du 20 février 2008 à Hody, qui a tué une femme et deux enfants.Photo BELGA

Il a remporté la ceinture encore et encore en 2000, 2006, 2012 et 2018. Sa majorité de PS-Gemeentebelangen obtient généralement 2 voix sur 3, lui-même a des scores monstres. Celui de 2000 (1.255 votes préférentiels sur 2.648 bulletins de vote valables) a provoqué le malaise nécessaire chez d’autres anciens dirigeants PS de la région, comme son ancien mentor Guy Coëme (Borgworm), Anne-Marie Lizin (maire de Huy et sénatrice) et Robert Collignon (Amay et Premier ministre wallon). Ce dernier préfère voir son fils Christophe comme le nouvel homme fort. Après beaucoup de travail de coude dans le sprint vers la formation de la liste, la place de deuxième successeur sur la liste européenne est un prix de consolation pour Tarabella.

Deux nouveaux venus prometteurs dans le gouvernement Demotte (2007).  Gauche Tarabelle.  Image BELGAIMAGE

Deux nouveaux venus prometteurs dans le gouvernement Demotte (2007). Gauche Tarabelle.Image BELGAIMAGE

Puisque le député PS Michel Daerden continuera à s’occuper du budget wallon avec toutes ses compétences et son énergie, le maire d’Anthisnes peut aller dans l’hémisphère européen. Le premier des quatre versements, là. Une seule fois effectivement élu (en 2014). En 2009 il est suppléant de Jean-Claude Marcourt, en 2019 il réchauffe le siège de Paul Magnette. En 2007, il a également été brièvement ministre du gouvernement wallon.

En Europe, Tarabella s’intéresse aux problèmes agricoles — à l’intérieur, il a longtemps été président de la Fondation rurale de Wallonie — et à l’égalité des droits entre hommes et femmes. Il se sert aussi de son mandat pour « élargir » les horizons de ses concitoyens. A son invitation, des eurodéputés viennent jouer au football sur les terrains de son bien-aimé Royal Sporting Club Anthisnois. Le PS local emmène n’importe qui en excursion d’une journée à Strasbourg en bus pour une visite qui se termine par « le député » et la consommation d’une ou plusieurs « chopes » dans un café alsacien.

Évidemment, aucun chat à Anthisnes ne croit que son maire a fait quoi que ce soit de mal. « Ont-ils trouvé quelque chose chez lui peut-être ? Non. Ben, voila donc. Depuis le tapage, Tarabella a simplement présidé le conseil municipal en décembre. Comme si de rien n’était. L’opposition n’a jamais prononcé le mot Qatar. Ni lui-même.

Marc Tarabella en Europe.  Le PS local emmène n'importe qui en excursion d'une journée à Strasbourg en bus pour une visite qui se termine par « le député » et la consommation d'une ou plusieurs « chopes » dans un café alsacien.  Photo Belgique

Marc Tarabella en Europe. Le PS local emmène n’importe qui en excursion d’une journée à Strasbourg en bus pour une visite qui se termine par « le député » et la consommation d’une ou plusieurs « chopes » dans un café alsacien.Photo Belgique



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