Comment les experts de Première Vision évaluent-ils les tendances cuir et tissus pour la saison automne-hiver 2025-2026 ?
Le salon, qui s’est déroulé du 2 au 4 juillet au Palais des Congrès Nord Villepinte à Paris, était un événement quelque peu inhabituel en raison de sa proximité avec les Jeux Olympiques. Florence Rousson, la nouveau président de Première Vision, s’était attendu à une baisse du nombre de visiteurs en raison de dates contradictoires. Néanmoins, 937 exposants y ont participé.
Cela semble être une saison calme, une sorte de répit entre les deux tours des élections législatives françaises, qui se sont déroulées les 30 juin et 7 juillet. Mais en même temps, il est riche en nouveautés, comme le soulignent l’experte en cuir Carine Montarras, la directrice mode Desolina Suter et la chef de projet mode Lucie Jeannot de Première Vision.
Focus sur les tanneries pour la traçabilité du cuir
De nos jours, le cuir écologiquement responsable se résume moins au traitement spécifique ou au tannage d’un produit. Il est plutôt important de choisir une entreprise engagée et qui correspond à vos propres valeurs. Cela commence par la sélection de la tannerie. Le plus grand défi du secteur est la traçabilité. À mesure que les réglementations deviennent plus strictes, les entreprises sont de plus en plus tenues de rendre compte de leur impact environnemental. A l’avenir, il faudra certifier que les produits fabriqués en Europe ne sont pas liés à la déforestation. Même si ces données ne sont pas encore populaires, elles sont fondamentales.
Cuir sophistiqué : le tannage végétal en plein essor
Les acheteurs manifestent un fort intérêt pour les cuirs au tannage végétal, traditionnellement considérés comme rigides et difficiles à teindre mais moins nocifs pour l’environnement. Une nouvelle génération de cuirs souples, déclinés en différentes couleurs et finitions, comme le cuir d’agneau stretch tanné aux extraits végétaux, gagne du terrain. Des écorces d’arbres telles que le quebracho, les olives et la rhubarbe sont utilisées ici.
Cuir raffiné des Teintures de France
Pour l’AH 25/26, Première Vision a présenté une collaboration avec Les Teintures de France. Les versions techniques du cuir produites par l’entreprise de finition française présentent des gravures et perforations laser, des broderies numériques avec du fil blanc coloré lors de l’impression numérique et l’impression 3D de micro-picots.
Tissus : récupérés, portés ou upcyclés
L’AH 25/26 se caractérise aussi par le rapprochement des générations : ce qui est usé peut aussi être beau. Les anciennes références se mêlent aux nouvelles technologies pour recadrer le passé. Les matériaux incluent de la dentelle aux effets inhabituels et des soies apparemment usées, donnant l’impression que le tissu est en réalité perforé. L’offre comprend également des plis en relief, des tissus en laine à l’aspect usé et mangé par les mites et des matériaux présentant d’autres signes d’usure décoratifs. Les effets rappelant la maladresse du « Do It Yourself » sont fréquents. De nouveaux matériaux peuvent être vus ici ainsi que des matériaux anciens et recyclés.
Des tissus tangibles qui épousent le corps
Cette saison s’éloigne du fantasme du Metaverse et de l’intelligence artificielle vers une matière plus concrète et tangible. La relation avec le corps continue de se développer et redevient au centre du design. Le résultat est des tissus faciles à draper, qui présentent des mouvements fluides ou qui permettent des formes structurelles. Il s’agit notamment de qualités telles que le tricot, la soie, le jersey, le coton, le mohair chaud, le velours et le damassé. Dans le monde du sport, cette influence se retrouve en combinaison avec des matériaux techniques.
Des matières denses pour des silhouettes structurées
Des mélanges spéciaux de fils fins et des compositions denses rappellent les volumes structurés dans le style de la maison de couture espagnole Balenciaga. L’accent est mis sur l’utilisation de matériaux durables qui vont au-delà des effets de mode. La soie notamment est au centre de cette tendance, associée à des fibres naturelles comme le lyocell, le modal, le lin et le coton. Cela réduit le recours aux matières synthétiques et aux finitions chimiques, comme le démontrent les mélanges laine-cachemire et le cachemire Zibelinato, qui présente une brillance induite par le chardon et de légères ondulations. De telles approches montrent que la responsabilité écologique peut également être atteinte par la qualité et pas seulement par des certifications ou par l’évitement des raffinements.
Cet article a été initialement publié sur FashionUnited.fr. Traduit et édité par Heide Halama.