Poutine veut récupérer son tueur à gages qui est dans une prison allemande : un homme a assassiné sa cible dans une cour de récréation de Berlin sous le regard des enfants


Le président russe Vladimir Poutine souhaiterait récupérer un agent secret qui purge une peine d’emprisonnement à perpétuité en Allemagne pour le meurtre d’un ancien chef rebelle tchétchène. Et il donnerait beaucoup pour cela, écrit le ‘Wall Street Journal’.

23 août 2019. C’est vers l’heure du déjeuner que Zemlichan Changoshvili se promène dans le parc Kleiner Tiergarten, au centre de Berlin, en revenant de la mosquée. C’est très fréquenté, car en été, le parc avec son aire de jeux est un endroit apprécié des parents avec de jeunes enfants. Non loin derrière lui, un homme fait du vélo.

Près des balançoires, le cycliste sort soudain un pistolet avec silencieux de son sac à dos noir. Il tire sur Changoshvili dans le dos. Il descend ensuite et, très calmement, tire deux balles supplémentaires dans la tête de sa victime, qui repose au sol, sans défense. Parents et enfants regardent bouche bée.

Perruque

L’homme remonte alors sur son vélo et s’en va. Un peu plus loin, il s’arrête au bord de la Spree. Il change de vêtements et enlève une perruque. Il jette son déguisement à l’eau, avec son vélo et son arme. Puis il rase une partie de sa barbe. Deux passants l’aperçoivent et appellent la police. Quelques minutes plus tard, il est interpellé alors qu’il montait sur un scooter électrique.

La police berlinoise sur les lieux du meurtre. ©AFP

La police parvient à extraire les preuves de l’eau et à y trouver l’ADN et les empreintes digitales de l’homme. Mais il faudra encore deux ans avant que le tribunal puisse prouver qui il est réellement.

Après tout, le tueur à gages russe Vadim Krasikov (58 ans) affirme qu’il s’agit de Vadim Sokolov, un touriste innocent. Ceci est également indiqué sur son passeport et confirmé par l’ambassade de Russie à Berlin.

Démasquer

Cependant, lors de son procès, qui débutera en octobre 2020, le procureur allemand, avec l’aide du groupe de recherche « Bellingcat » et de la police ukrainienne, pourra le dénoncer comme un agent secret expérimenté de Moscou. Cela se fait, entre autres, sur la base de tatouages ​​et d’images de caméra d’un meurtre antérieur d’un homme d’affaires russe à Moscou, attribué à Krasikov. Ce meurtre a également été commis par un homme à bicyclette, qui a tiré sur la victime dans le dos et dans la tête.

Le procès contre Krasikov a suscité un grand intérêt médiatique en Allemagne.
Le procès contre Krasikov a suscité un grand intérêt médiatique en Allemagne. © EPA

Même si Krasikov et Moscou continuent de le nier, il est condamné à la prison à vie pour meurtre en décembre 2021. Sa fusillade a été qualifiée d’acte de terrorisme d’État. Le tribunal allemand parle d’un « message brutal » de la Russie à ses ennemis à l’étranger : ils ne sont pas en sécurité même là-bas.

Selon Moscou, Changoshvili aurait capturé la ville russe de Nazran avec un groupe de combattants tchétchènes en 2004. Cela l’a placé sur une liste russe de dix-neuf terroristes recherchés. En 2019, cinq d’entre eux avaient été tués ou se sont suicidés. Y compris Changoshvili.

Connexions

Peu avant le jugement, Poutine a ordonné un échange de prisonniers pour libérer Krasikov, selon un ancien responsable européen ayant des liens avec de hauts responsables du gouvernement russe. C’est quelque chose qu’il a également fait pour d’autres agents secrets. Les responsables occidentaux confirment que le nom de Krasikov est apparu à plusieurs reprises lors de discussions sur d’éventuels échanges de prisonniers.

Les États-Unis seraient disposés à utiliser Krasikov, par exemple, pour libérer le journaliste américain Evan Gershkovich (31 ans), détenu depuis mars dans une cellule russe pour espionnage. Selon la politologue russe respectée Tatiana Stanovaya, Poutine serait même prêt à abandonner le chef de l’opposition russe emprisonné Alexeï Navalny pour Krasikov : « Poutine est prêt à payer le prix fort, quelles que soient les inquiétudes qui pourraient surgir parmi ses loyalistes ou les services secrets», estime-t-elle.

Alexeï Navalny.
Alexeï Navalny. ©AP

Berlin n’a pas encore précisé si un échange de prisonniers avec Krasikov était possible. Les opposants ont suggéré l’année dernière qu’un meurtrier reconnu coupable ne pouvait pas être échangé.




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