Vivaldi franchit une nouvelle étape dans la réforme des retraites. Un pas modeste, que les responsables notamment regarderont avec méfiance.
Après des négociations – remarquablement courtes –, Vivaldi a conclu lundi soir un nouvel accord de retraite. Selon le Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld), l’accord assure que “travailler rapporte plus”, que “les systèmes de retraite des salariés, des indépendants et des fonctionnaires sont harmonisés” et que “les coûts du vieillissement sont mieux maîtrisés” .
Pour faire en sorte que davantage de personnes travaillent plus longtemps, Vivaldi relance la prime de retraite à partir de 2024. C’est une décision de 2022 qui a maintenant été précisée. La prime de retraite, supprimée par le gouvernement Michel, vise à garantir que les personnes qui continuent à travailler après la retraite soient financièrement récompensées pour cela. Ceux qui travaillent trois ans de plus recevront un paiement unique pouvant aller jusqu’à 22 645 euros nets. (Le montant peut également être payé en versements mensuels.)
Au début de son mandat, Vivaldi a relevé la pension minimale à 1 500 euros nets par mois d’ici 2024, une promesse électorale des partis de la coalition de gauche. En raison d’indexations successives dues à une forte inflation, ce montant a déjà été atteint en début d’année. En échange, la « condition d’emploi » a été introduite en 2022, une nouveauté dans notre système de retraite.
Cette condition de travail a maintenant également été élaborée plus en détail. Comme prévu, il y aura une limite inférieure de vingt ans travaillés pour accéder à la pension minimale, mais avec des exceptions. Concrètement, il faut avoir travaillé au moins les quatre cinquièmes pendant vingt ans pour avoir droit à une pension minimum. Ce qui représente un total de 5 000 jours ouvrables. Les périodes de congé de maternité et de congé palliatif, entre autres, sont comptées comme des jours ouvrables. Il en va de même pour le chômage temporaire.
Régime de faveur
« Harmoniser les systèmes de retraite », c’est le meilleur euphémisme de la Wetstraat pour une économie dans le système par lequel les pensions des fonctionnaires augmentent avec leurs salaires.
Cette péréquation, dont ne bénéficient pas tous les agents de l’État, sera bientôt remplacée par une augmentation annuelle maximale de 0,3 % pour les pensions des fonctionnaires. De cette manière, la gauche au sein de Vivaldi évite une extinction totale, mais une économie est tout de même réalisée sur le système (2,4 milliards d’euros). Les libéraux en particulier ont pendant des années considéré la péréquation comme un régime privilégié indéfendable.
En contrepoids, le taux de la cotisation Wijninckx – la cotisation spéciale de sécurité sociale sur les retraites complémentaires du secteur privé – sera relevé de 3 à 6 %. La ministre des Retraites Karine Lalieux (PS) souligne dans un communiqué que les retraites les plus élevées contribueront davantage en conséquence : “La solidarité entre les hautes et les basses retraites a été renforcée.” Cependant, cette mesure n’entrera en vigueur qu’à partir de 2028 afin de ne pas violer les accords récents entre les partenaires sociaux.
Le nouvel accord sur les retraites comprend un total de 3 milliards d’euros de réformes. D’ici 2070, 0,5 % du produit intérieur brut (PIB) sera économisé sur les coûts du vieillissement. Les économistes soulignent que ces coûts augmenteront de pas moins de 5 % d’ici 2070. Le gouvernement fédéral se défend que la facture des retraites sous Vivaldi a augmenté de 0,4 %. Donc c’est surmonté. A lire : ce gouvernement n’aggrave pas le vieillissement.
La critique du nouvel accord est assez prévisible parmi les syndicats et les organisations patronales. ACV et VSOA trouvent dommage que Vivaldi ose toucher à la perequation. “Une série de dénigrement des fonctionnaires”, lit-on. Pour Unizo, cette intervention “aurait pu aller plus loin qu’un simple plafond”. Le ton de VBO est similaire : « Symboliquement, cet accord est plus puissant que l’impact lui-même ». Des efforts supplémentaires sont rapidement demandés aux employeurs.
L’Europe
Au sein de PS, on peut entendre que la moyenne des quinze dernières années a été de 0,25 %. L’impact du nouveau plafond de 0,3 % serait limité. En tout état de cause, un système a été imaginé dans lequel les fonctionnaires à faible pension ne seront pas concernés. Leur situation ne changera pas. Les fonctionnaires avec des pensions plus élevées devront égaler cela. Ils recevront désormais une majoration forfaitaire qui sera calculée de manière à ne pas dépasser le plafond. La limite exacte entre pensions « basses » et « hautes » reste à déterminer.
Une question cruciale est avant tout : qu’en pense l’Europe ? La Belgique s’était vu donner par la Commission européenne jusqu’à fin juillet pour finaliser ses plans de retraite. La réforme est une condition pour réclamer une partie du budget européen de la relance. Si les plans s’avèrent trop légers, la Belgique menace de rater une cagnotte de plus de 2 milliards d’euros. La Commission aimerait voir des économies de 1 à 1,2 % du PIB. Cet accord de retraite est alors logiquement trop maigre. Néanmoins, De Croo est convaincu que notre pays peut convaincre l’Europe : la Commission veut surtout que la Belgique se réforme pas à pas, dit-il
Quant à la réforme fiscale tant attendue, les négociations restent difficiles. Samedi, un blocage menaçant a été le signal pour le Premier ministre De Croo d’essayer de boucler le dossier des retraites. Donc avec succès.