Pourquoi les messages WhatsApp divulgués ont frappé le Premier ministre De Croo là où ça fait mal

Une conversation WhatsApp divulguée suggère que le cabinet du Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld) a effectivement accepté le budget contesté qui a coûté son mandat à l’ancienne secrétaire d’État Eva De Bleeker (Open Vld). La révélation donne au Premier ministre juste assez de place pour l’interprétation, mais expose une fois de plus sa vulnérabilité.

Bart Eeckhout

« Donc ça va pour nous » et « merci pour les ajustements ! » Par exemple, le 9 novembre, un expert du cabinet du Premier ministre De Croo a mis fin à la discussion avec un collègue du cabinet du secrétaire d’Etat De Bleeker sur les ajustements à apporter aux textes budgétaires. Truc a publié la conversation WhatsApp et, avec l’opposition, en a déduit que le Premier ministre avait menti. Après tout, le « okay » confirmerait que son cabinet a bien lu et approuvé le budget qui a été soumis à la Chambre, ce que le Premier ministre a toujours démenti.

Le projet de budget a été contesté car il s’écarte du texte officiel présenté par le gouvernement à la Commission européenne. La différence réside principalement dans le calcul des coûts de la réduction de TVA pour le gaz et l’électricité, sans tenir compte d’éventuelles compensations. En conséquence, le budget va encore plus loin dans le rouge.

Mais le Premier ministre affirme n’avoir jamais donné son aval à ce texte amendé. Il a qualifié l’intervention à la Chambre d' »erreur matérielle » de De Bleeker. Il a dû partir, sous la pression de De Croo et du président de l’Open Vld, Egbert Lachaert, lorsqu’il s’est avéré par la suite que d’autres erreurs de calcul s’étaient glissées dans les tableaux.

Plus compliqué qu’il n’y parait

Mais le Premier ministre, ou son cabinet, n’était-il pas au courant des ajustements au budget qui ont coûté son mandat à De Bleeker ? Un dialogue WhatsApp entre experts du cabinet semble montrer que c’est le cas. Mais la question est plus compliquée que cela.

L’ensemble de la conversation montre que des commentaires ont bien été faits lors d’un précédent comité de lecture, la réunion des experts qui contrôlent le budget, sur la manière dont le cabinet du budget a inclus le règlement TVA dans le budget. Le texte a ensuite été légèrement modifié, mais les tableaux numériques ne l’ont pas été. Selon le cabinet De Croo, le « d’accord » de la conversation WhatsApp ne ferait référence qu’à quelques derniers détails, qui étaient encore en discussion.

Ces messages WhatsApp font l’objet de conversations dans la Wetstraat depuis plusieurs semaines. Selon un ancien employé de De Bleeker, qui a sonné sur le site de médias sociaux LinkedIn, ils prouvent que le cabinet De Croo a « explicitement » approuvé le budget ajusté.

Lorsque le député N-VA Sander Loones a demandé à la commission parlementaire d’inspecter la conversation mercredi dernier, le Premier ministre De Croo l’a rejeté. Littéralement, il dit : « Dans la discussion sur les autres formes de communication, M. Loones demande la preuve de quelque chose qui n’a pas eu lieu. Ce n’est pas évident. » Vous pouvez interpréter cela comme un déni de l’existence des applications, mais ce n’est, encore une fois, pas littéralement ce que dit le Premier ministre.

Convoqué sur la question, De Croo a refusé de venir mardi à l’hémicycle pour plus d’explications, avec le soutien de la majorité. Alexia Bertrand, la nouvelle secrétaire d’Etat au Budget d’Open Vld, a défendu la position du gouvernement.

Elle a accusé l’opposition d’une interprétation malveillante d’une conversation, alors qu’elle estime que la version du Premier ministre est confirmée : il y a eu un comité de lecture qui a fait des commentaires sur le passage à la TVA et les messages WhatsApp portent sur autre chose.

«Vous faites de la politique à un niveau différent. En fait, vous auriez dû vous excuser auprès du Premier ministre », a-t-elle déclaré. « Vous auriez dû dire : ‘Vous aviez raison Premier ministre’. »

C’est la fin de l’affaire pour l’équipe du gouvernement fédéral. Que le Premier ministre ait ou non approuvé le projet de budget contesté reste un jeu de oui ou non. Sur la base de ce qui vient d’être révélé, il semble que les experts du comité de lecture se soient effectivement prononcés sur la question de la TVA, que le texte budgétaire ait été en partie amendé, mais que les tableaux chiffrés n’aient pas été modifiés. Ce serait alors « l’erreur matérielle » qui annonçait la fin du secrétariat d’État d’Eva De Bleeker.

Nulle part plus rouge qu’ici

Pourtant, le nouveau remue-ménage frappe le Premier ministre là où ça fait mal : le budget fragile. Par coïncidence, mardi a traversé Le temps On sait que la Cour des comptes s’est abstenue de discuter des comptes annuels 2021 du gouvernement fédéral car trop de facteurs incertains ont été inclus dans les calculs. L’amélioration n’est pas immédiatement en vue.

Tous les gouvernements européens gémissent sous la guerre en Ukraine, la rareté de l’énergie et l’inflation des prix, mais nulle part le budget ne plonge aussi profondément dans le rouge qu’en Belgique. Le gouvernement fédéral a puisé dans ses poches pour protéger une grande partie de la population contre le choc des prix, mais les économistes posent des questions de plus en plus critiques sur l’efficacité de cette politique de crise.

Chaque nouvelle discussion sur l’image d’un sou enfonce le couteau encore plus profondément dans la plaie budgétaire. Là où un gouvernement a rarement des ennuis à cause d’un déficit budgétaire, les choses sont différentes maintenant. La démission de De Bleeker en tant que secrétaire d’État a transformé les préoccupations budgétaires en une «histoire». L’impression a été créée que la secrétaire d’État n’a pas été victime parce qu’elle a commis une erreur, mais précisément parce qu’elle voulait établir un budget avec prudence et honnêteté. Il est très probable que les coûts qu’elle a déjà prévus seront bientôt réalité.



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