Pas étonnant que De Wever et Rousseau semblent s’entendre raisonnablement bien

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Conner Rousseau est un phénomène en politique. Les critiques estiment que le PDG de Vooruit doit principalement son ascension fulgurante à sa communication sur les réseaux sociaux. Réduire l’explication du succès de Rousseau au phénomène médiatique « Conner » est cependant erroné. La stratégie de communication contribue certes au succès, mais elle s’inscrit dans une stratégie plus large et sophistiquée. Comme le président de la N-VA, Bart De Wever via La personne la plus intelligente a réussi à captiver un public «apolitique» plus large pour sa cause à la télévision classique, Rousseau le fait via Instagram ou YouTube.

Il y a plus que les chefs de parti de Vooruit et de N-VA ont en commun. Comme De Wever le lui a montré, Rousseau tente également d’affiner et d’élargir stratégiquement l’offre idéologique de son parti en même temps. De Wever a ajouté des couleurs libérales de droite et conservatrices au parti nationaliste, Rousseau pousse son parti dans une direction à la fois classiquement de gauche sur les questions socio-économiques et éthiquement plus conservatrice que ce à quoi on pourrait s’attendre d’un parti progressiste. Et malgré toutes les critiques : comme pour la N-VA, cela semble aussi porter ses fruits chez Vooruit.

Marque

Il y a autre chose que les présidents des deux partis partagent. La tendance en tant que « marque » politique à être aussi grande ou même plus grande que le parti lui-même. En conséquence, le pouvoir dans ce parti tombe entre leurs genoux, et pratiquement eux seuls. La parole du président fait loi. De même qu’il est encore impossible d’imaginer une N-VA sans De Wever, il devient peu à peu impossible d’imaginer un Vooruit sans Rousseau. Pas étonnant que les deux messieurs s’entendent plutôt bien.

Il y a aussi une différence intéressante. Si Bart De Wever tente de pérenniser le succès du pouvoir associé en ramifiant l’appareil du parti sur toute la région, selon le modèle classique, Conner Rousseau fait tout le contraire. Les structures provinciales sont décomposées, les règles de cumul récemment introduites sont supprimées, les organisations piliers sont tenues à distance. Le résultat est que le pouvoir de la direction nationale est renforcé, sans trop s’embarrasser de « démocratie interne ».

Pêché

Et ainsi Rousseau fait sans trop de mal ce que bien des concurrents espèrent ou prétendent faire : faire du parti un « mouvement », à l’instar d’Emmanuel Macron en France, entre autres. Un congrès national ratifiera cette évolution ce week-end. Cela aussi se produira sans trop de rides.

Conner Rousseau a donc un argument de poids pour lui : le succès. Presque à lui seul, il a repêché les socialistes flamands du fond de la mare électorale. Parlez simplement à quelqu’un comme ça.

Cependant, il y a aussi un grand risque. Les mouvements sans structure ni contenu fixes tiennent ou tombent avec le charisme du leader. Ce qui est aujourd’hui une forme commode pour une prise de décision rapide et un leadership clair pourrait bien se briser comme un château de cartes demain, si le vent politique tourne de l’autre côté.



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