Nous parlons, nous regardons, nous protégeons. On démasque, on signale, on signale. Chaque fois qu’il y a une femme discriminée, avilie, dénigrée, offensée, limitée, humiliée, moquée, réduite au silence, c’est déjà de la violence. Faire connaitre.


P.Pourquoi l’ancien système patriarcal marque-t-il encore nos vies avec une violence sans précédent ? Nous en avons parlé à l’occasion de Journée pour l’élimination de la violence contre les femmeslors d’une soirée intense voulue par la maison Pomellato pour soutenir TOMBE-MOIle premier foyer pour femmes maltraitées en Italie.

Pomellato pour le CADMI 2023. La soirée événement

Nous avons retracé les origines du patriarcatné d’un « commandement du père de famille » d’abord, puis devenant un système social où les hommes détiennent le pouvoir.

Nous avons identifié la date de naissanceil y a dix mille ans, lorsque l’humanité atteignait la phase agricole, elle observait les animaux et associait pour la première fois l’acte sexuel à la naissance des enfants.

Danda Santini réalisateur de « iO Donna » (photo de Carlo Furgeri Gilbert).

Ayant découvert l’origine de la vie, l’homme prend immédiatement le contrôle du corps des femmes: veiller à la reproduction de la famille, être sûr d’être le père, transmettre le patrimoine familial aux héritiers légitimes.

L’appareil philosophique occidental valide cette forme sociale: d’Aristote à Hegel, les femmes sont psychiquement et émotionnellement inférieures, destinées au monde domestique, tandis que le rôle politique appartient à l’homme, détenteur de la rationalité.

Ce système social est unique et incontesté depuis dix mille ansexcluant dès la naissance certaines voix insoumises ou privilégiées et au prix du silence de la moitié de la population.

Quand cette moitié accède au vote et donc à la citoyenneté politique, le système collectivement commence à grincer. Les femmes l’ont bien compris et quittent massivement la maison en tenue de fête, leur premier bulletin de vote à la main.

Illustration de Cinzia Zenocchini

Elle met du rouge à lèvres pour voter Rosa Maravigliaqui a grandi dans une famille au début du siècle (« une femme est une cloche qu’il faut sonner »), l’héroïne de « Nom de famille » de Aurore Tamise qui a reçu le prix littéraire ce mois-ci Je femme.

Delia de Paola Cortellesi met du rouge à lèvresmarquée par des bleus causés par son mari, lors de ses débuts en tant que réalisatrice avec Il y a encore demain. La première poussée forte et collective est donnée.

Et si Rosa a toujours encaissé les coups en silence, si Délia n’a eu que le réconfort de ses amis, c’est parce que Les coups de poing, gifles, coups de pied et ceintures étaient autorisés par la loi italienne jusqu’en 1956: le droit de corriger et de punir la femme, comme si elle était une enfant indisciplinée, était appelé « jus corrigendi ».

Dès lors, ce fut une longue marche pour démanteler les préjugés, redéfinir les rôles et les fardeaux.restaurer l’identité, les droits, le respect, l’égalité et la liberté des femmes.

Mais c’est encore une accélération cahoteuse, partiellement inachevée, à deux vitesses : toujours d’un côté des jeunes hommes rongés par l’angoisse de contrôler leurs pairs, qu’il s’agisse de traces collectives de l’histoire passée ou de signes de fragilité individuelle ; de l’autre la détermination des filles, de plus en plus en colère.

Ils ont défié le silence à coups de clés et de sifflets dans les écoles, dans les rues, dans les bureaux, en criant « plus nous sommes, plus nous faisons du bruit », même ici, sur la place devant la cantine de l’entreprise. Et pour la première fois, les hommes sont aussi présents dans le débat politique. Partie active du même consortium de paix.

« Soyons tous des sentinelles sociales », telle était l’invitation qui a clôturé notre événement. Nous parlons, nous regardons, nous protégeons. On démasque, on signale, on signale. Chaque fois qu’il y a une femme discriminée, avilie, dénigrée, offensée, limitée, humiliée, moquée, réduite au silence, c’est déjà de la violence. Faire connaitre.

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