Considéré comme le 6ème album studio de la carrière de Neneh Cherry, c’est un album dans lequel on retrouve l’artiste déconstruite d’une manière très particulière. Le dernier des 10 titres est le seul dans lequel sa voix est créditée, puisqu’il s’agit d’un remix de son ancienne chanson ‘Buddy X’, plus précisément par Honey Dijon. Et dans les 9 autres enregistrements de ce ‘The Versions’ on ne retrouve que Neneh Cherry en charge de la «programmation».

L’idée a été d’inviter d’autres personnes à reprendre des chansons du catalogue de Neneh Cherry. Ce sont toutes des femmes, ce qui inclut aussi les trans et les non-binaires, montrant ainsi de quel côté se situe l’artiste suédoise en ces temps de division et d’éternelle polémique : comme toujours, celui de la révolution. Et ce n’est pas qu’un autocollant à apposer sur l’album sorti le mois de la Pride : il y a une profonde émotion à entendre ANOHNI que « c’est un monde de femmes, donc c’est mon monde », dans cette chanson intitulée « Woman » que Neneh Cerise faite en réponse à ‘C’est le monde des hommes d’un homme‘ de son James Brown par ailleurs très admiré.

C’est aussi drôle d’écouter Robyn -accompagnée de Mapei et produite par Dev Hynes- chanter « No moneyman can win my love » du précurseur du trip hop « Buffalo Stance ». Bien que dans ce cas un remix de la chanson réalisé en 2017 pour une exposition à Stockholm ait inspiré la «Dancehall Queen» et que l’expérience leur ait été plus adaptée de la mettre dans un musée que sur Spotify (ou placer le nom de votre plateforme ici streamer préféré). Comme si elle se disputait le plus grand halo de coolness, Sia -qui se présente comme une amie de la famille dans le communiqué- n’en finit pas de faire de ‘Manchild’ le morceau pop qu’on aurait attendu d’elle, ce qui fait la critique de C’est la chanson de Kelsey Lu plus intéressante, surtout quand on ne sait pas si ça va être plus Massive Attack, plus Suicide ou plus ballade.

Parce que oui, en effet, quelqu’un a considéré comme une bonne idée que quelques chansons du répertoire de Neneh Cherry apparaissent répétées dans ‘The Versions’, comme si l’artiste n’avait pas fait 10 chansons différentes dignes d’être honorées. Il est vrai qu’il a laissé passer 18 ans entre ‘Man’ (1996) et ‘Blank Project’ (2014), mais il est également vrai que cela et ‘Broken Politics’ (2018) méritaient une sorte de justification par un artiste, et qui a participé à de nombreux autres projets. ‘The Versions’ ne contient que des adaptations de chansons de Neneh Cherry entre 1988 et 1996 alors qu’on sait tous que dans cette industrie la difficulté n’est pas de faire 3 albums frais au départ, mais de se maintenir au fil des décennies. ‘Blank Project’, ‘Naked’, ‘Everything’, ‘Kong’ et ‘Soldier’ ​​​​sont également nécessaires pour comprendre la figure de Neneh Cherry, ce n’est pas comme dans tout le 21ème siècle qu’elle n’avait pas pu faire le O avec un joint.

Assumant cette insulte incompréhensible, ‘The Versions’ oscille entre les adaptations agitées et inclassables (ANOHNI, Robyn) et celles que l’on peut qualifier de « belles », situées au centre de l’album. Il y a TYSON, fille de Neneh Cherry elle-même, dans ‘Sassy’; Jamila Woods livrant un R&B fluide sur ‘Kootchie’, et aussi Seinabo Sey sur ‘Kisses on the Wind’ qui semble se terminer tôt. La violoniste Brittney Denise Parks, mieux connue sous le nom de Sudan Archives, interprète l’une des œuvres les plus louables et les plus exotiques pour justifier ‘Heart’, une chanson dansante qui comportait à l’époque un clip vidéo réalisé par David Fincheret qui semble désormais méconnaissable, quoique toujours intrigant avec des percussions complètement différentes.



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