Il y a quelques jours, Myke Towers a pris un bain de masse lors de son concert à Cadix, l’un de ceux qu’il a cet été en Espagne. Le portoricain connaît un succès de plus en plus international, et notre pays ne fait pas exception, comme en témoignent les numéros de ‘PLAYA DEL INGLÉS’ (le duo avec Quevedo) et, récemment, ‘LALA’. Ce dernier est l’un des morceaux inclus dans ‘LA VIDA ES UNA’, son nouvel album et un album dans lequel, sans renoncer à la partie la plus brute de son rap, il s’ouvre clairement à la pop.
Dans cette démarche, en plus de son inséparable Fara, Myke Towers a voulu s’entourer de la production d’anciennes connaissances du générique reggaeton, comme Tainy (qui vient de sortir ‘Data’) et son frère Mvsis, Sky Rompiendo (bras droit de J Balvin), SubeloNEO (collaborateur de Bad Bunny ou Karol G), Taiko (Paloma Mami, Mora), YannC El Armónico (Ozuna) ; et aussi des noms plus liés au rap, comme Ambezza (Future ou collaborateur de Drake), Benjamin Lasnier (Megan Thee Stallion, DaBaby), Play-N-Skillz (Lil Wayne) ou Rvssian (Juice WRLD), parmi tant d’autres. Avec tous, Towers monte un album avec lequel, si on l’aborde à cause du succès de ‘LALA’, on peut être positivement surpris. Mais c’est ce qui se passe avec ‘LALA’ elle-même.
Évidemment, le succès d’une chanson n’a rien à voir avec sa qualité, encore moins avec le fait qu’elle vous plaise, mais ‘LALA’ fait partie de ces cas où il n’est pas étonnant qu’elle fonctionne si bien. La vérité est que c’est un bon thème et, si vous me pressez, même avec un certain point classique dans sa composition, un exemple en est la cadence des phrases du refrain. C’est aussi sexuel que d’autres chansons portoricaines (et le mantra avec le “lala-lala-lala” renforce cela), ajoutant un peu plus de romantisme et d’intimité. Et, bien sûr, ça colle plus que de la gomme. Paradoxalement, ‘LALA’ apparaît dans la séquence comme l’avant-dernier ! chanson sur l’album, juste avant ‘LO GRE’ – très significative, car ‘LALA’ est en passe d’être leur plus grand succès à ce jour.
Mais, bien que ce soit probablement la meilleure chanson, ce n’est pas le seul succès de ‘LA VIDA ES UNA’. Dans ce groupe, il y a aussi ‘EN ALTA’, avec un entracte de “vieux reggaeton” et des phrases comme “tu es la tentation des hommes et des femmes” qui pas étonnant si vous avez lu vos relevés ; ‘CAMA KING’, le duo sensuel avec Chita (une artiste argentine intéressante qui rapproche le reggaeton du r&b) ; ‘SUPPLÉMENTAIRE‘, qui mélange trap avec quelques synthés sporadiques qui lui vont très bien et un clin d’oeil-presque-sample de Maná; ou les amusants ‘FLOW JAMAICAN’, ‘MÁS ALLÁ’ et ‘MI DROGA’.
L’une des forces de Myke Towers réside dans ce dernier qui, en sauvant la distance, peut nous rappeler La Dani : son usage de l’humour pour parler de sexe. Car ‘LA VIDA ES UNA’ est un album qui fuit généralement la fausse gravité des autres artistes et opte pour une aura de « good vibes », si l’on peut dire, assez appréciée parmi tant de poses de bad fucker. Des couplets comme “il ne sait pas tout ce qu’il te ferait, tu es belle même avec un masque (…) aller à la salle de sport est un cauchemar, je t’imagine faire des squats” peut sembler horrifiant pour certains, mais pour d’autres c’est un instantané “excusez-moi ? Cliquez sur.”. Comme rimer dans “EXTRA EXTRA” Jimi Hendrix avec Ben & Jerry’s (espérons-le avec Ana Mena).
Towers dit qu’il a rétrogradé cet album de 50 coupes initiales, mais peut-être aurait-il dû mettre plus de ciseaux, car “LA VIDA ES UNA” serait bien meilleur s’il contenait les chansons que nous avons mentionnées, et quelques autres. Malgré ses moments, il finit par être assez long, avec de nombreuses chansons assez inférieures, telles que ‘CENIZAS QUEDAN’, ‘NO SALGO’, ‘SÁBADO’, ‘EL CALENTÓN’, ‘BELLA KYAL’ (bien que la partie “booty pal north and put your hands in the south” soit amusante), ‘LO QUE PIDE’ ou les collaborations avec Ozuna (‘CONOCERTE’), Balvin (‘CELOS’), Arcangel (‘DON & TEGO’) et même celle de Daddy Yankee (‘ULALA’), bien plus faible que celle évoquée avec Chita. La moitié de ‘LA VIDA ES UNA’ est une agréable surprise, mais l’autre moitié pèse trop lourd. Dans tous les cas, cette marge d’amélioration signifie que le prochain travail de Towers pourrait être quelque chose à surveiller.