Alors que le Conseil des ministres discute de nouvelles règles à Cutro pour faciliter la migration régulière, simplifier l’accès et durcir les sanctions pour les passeurs, plus de 50 corps restent au PalaMilone à Crotone. Les proches des victimes du naufrage ont servi de barrière humaine aux premiers corbillards prêts à partir pour le cimetière islamique de Bologne sur décision du ministre de l’Intérieur. Après de longues hésitations, seuls 7 cercueils sont partis tard dans la nuit. Pour les autres, les proches demandent quelques jours pour savoir quoi faire, que ce soit pour transférer les corps vers leur pays d’origine ou vers l’Allemagne où vivent la plupart d’entre eux. Une agence allemande se chargerait des transferts.
Cercueils gardés au PalaMilone
Un seul jeune Afghan a été enterré à Crotone. Deux autres attendent d’être enterrés. Des proches gardent les cercueils, tandis que les pourparlers entre les responsables de la préfecture et le ministère se poursuivent indéfiniment. De nombreuses communes de la zone, Crotone en premier lieu, travaillent également à trouver des solutions adaptées. De nombreux citoyens ont offert une place dans leurs chapelles familiales. Les associations coordonnent sans cesse l’assistance : opérateurs, médiateurs et psychologues prennent en charge tous les rescapés. Douze ont été accueillis dans les centres Sai (Système d’accueil d’intégration), les autres ont été placés dans des hôtels, même si initialement ils avaient été placés dans un hotspot improvisé du Cara (Centre d’accueil pour demandeurs d’asile) d’Isola Capo Rizzuto. Certains, notamment des Pakistanais, sont destinés au Sai de San Benedetto Ullano, une ville albanaise de la province de Cosenza où opère l’association Don Vincenzo Matrangolo, basée à Acquaformosa. Le président est l’ancien maire d’Acquaformosa Giovanni Manoccio, impliqué depuis de nombreuses années dans l’accueil des migrants.
Inhumations et hospitalité aux proches, la Région prend en charge les frais
La bureaucratie ralentit les procédures de transport des cercueils et d’inhumation. Même le président de la Région Roberto Occhiuto, qui a exprimé sa volonté de prendre en charge les frais d’inhumation des corps en Calabre, s’est retrouvé face à l’obstacle de la préfecture. En tout cas, il se déclare prêt « à s’occuper de toutes les tâches, comme nous le faisons déjà pour le logement des familles. Notre région affiche toujours son visage solidaire. Nous disposons d’un terrain à usage de cimetière, mais nous devons attendre l’accord du préfet pour toute décision ». Et il ajoute : « A Tarsia, les travaux ont déjà commencé sur le cimetière international des migrants dans une zone adjacente au camp de Ferramonti. Un projet né en accord avec l’association des droits civiques de Franco Corbelli». C’est un quartier de Cosenza tristement connu pour avoir été un camp de concentration pour étrangers et personnes déplacées.
Manifestation nationale du samedi à Cutro
Pendant ce temps, les travaux sont en cours pour la manifestation nationale de samedi : une grande mobilisation partira de Cutro à 14h30, organisée par des dizaines d’associations de défense des droits de l’homme, d’ActionAid à Amnesty International Italia, de Caritas à Médecins sans frontières, d’Open Arms à Save les enfants, y compris l’Anpi et les syndicats. Parmi les promoteurs, également Rete 26 février qui s’est constituée au lendemain du drame, à l’instigation de l’association Crotone Sabir présidée par Manuelita Sciglian. Ils demandent à l’unisson des éclaircissements sur ce qui s’est passé : la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire sur les massacres aux frontières, la mise en place immédiate d’un programme européen de recherche et de sauvetage dans toute la Méditerranée, l’activation des visas humanitaires, l’élargissement des filières des droits d’entrée. Et enfin stopper toute initiative et programme d’externalisation des frontières, ainsi que la promotion d’accords bilatéraux conditionnés par le respect des droits de l’homme et non par le contrôle des flux migratoires. «Celui de Cutro est un massacre annoncé, causé par des années de politiques erronées. Il est urgent de faire marche arrière», déclare Celeste Logiacco, secrétariat confédéral de la CGIL de la Piana di Gioia Tauro.
#arrêtez le massacre
Dans leur appel, les promoteurs remarquent que « les personnes qui partent de Turquie, de Libye ou de Tunisie sont obligées de le faire au péril de leur vie en raison de l’absence de voies sûres et légales d’accès au territoire européen. Les gouvernements ont concentré leurs efforts uniquement sur l’objectif d’empêcher les départs, obligeant ceux qui fuient la guerre, la persécution et la pauvreté à se tourner vers les trafiquants. Quiconque a des responsabilités politiques, en premier lieu le gouvernement, ne peut renverser la réalité et décharger sur les victimes le poids d’un massacre qui a vu la perte de plus de 70 êtres humains qui auraient pu et auraient dû être sauvés ». Les associations invitent ceux qui ne peuvent pas être à Cutro à rejoindre la mobilisation à distance, en prenant une photo avec un brassard blanc et en la postant sur les réseaux sociaux avec le hashtag #fermarelastrage.