Médecins Sans Frontières intervient auprès des demandeurs d’asile aux Pays-Bas : « Bizarre et honteux »

Pourquoi MSF intervient-il aux Pays-Bas ?

« Vendredi dernier, nous avons envoyé une équipe à Ter Apel pour cartographier l’urgence médicale et évaluer si notre intervention apporterait une valeur ajoutée. Il est vite devenu évident que les conditions de vie y sont inhumaines. Il n’y a pas de douches, les gens ne se sont pas douchés depuis des semaines. Les toilettes sont également très insalubres et débordantes. Vous ne souhaitez vraiment ces circonstances à personne.

« Il y a aussi des personnes atteintes de maladies chroniques comme le diabète. Ils manquent de fournitures et de médicaments. Cela peut entraîner de graves urgences médicales. En concertation avec la Croix-Rouge, qui est ici depuis plusieurs semaines, nous avons décidé que notre aide était également nécessaire. »

En quoi votre aide diffère-t-elle de celle de la Croix-Rouge ?

« La Croix-Rouge dispense principalement les premiers secours en cas de crise. Nous prenons en charge les plaies un peu plus compliquées et complétons le travail de la Croix-Rouge. De plus, la Croix-Rouge offre également une oreille attentive, dont les réfugiés ont souvent besoin après un voyage long et ardu.

Cette intervention n’est-elle pas une gêne pour le gouvernement néerlandais ?

« Sans aucun doute. C’est la première fois en cinquante ans d’existence de l’organisation que MSF offre une assistance médicale aux Pays-Bas. Il est extrêmement bizarre et honteux qu’un pays prospère comme les Pays-Bas ait besoin de notre intervention. La responsabilité incombe au gouvernement néerlandais, et non à une organisation d’urgence médicale. C’est au gouvernement de créer suffisamment d’abris humains pour les gens d’ici qui dorment maintenant dehors.

Pourquoi le gouvernement n’intervient-il pas ?

« Cela est dû à une mauvaise volonté politique. La coalition gouvernementale néerlandaise a déclaré que 200 millions d’euros devaient être structurellement investis dans l’accueil des réfugiés. Ce n’est toujours pas arrivé. Il y a des années, l’Agence centrale pour l’accueil des demandeurs d’asile a également tiré la sonnette d’alarme et averti tout le monde de ce qui nous attendait si nous n’intervenions pas. Le gouvernement n’a pas tenu compte de ces avertissements. Et maintenant nous sommes là, en difficulté.

« Nous pouvons facilement accueillir environ 700 personnes aux Pays-Bas. La volonté n’est tout simplement pas là. Les Ukrainiens sont accueillis à bras ouverts, même les lits sont vides pour cela. Les Syriens et les Afghans, en revanche, croupissent ici sous une bâche. Il faut vouloir investir dans les demandeurs d’asile. C’est là que réside le problème. »

Jamais auparavant autant de demandeurs d’asile n’avaient dormi dans la rue devant le centre de demande. Leur nombre va-t-il continuer à augmenter ?

« Il est loin d’être vrai qu’il y a beaucoup plus de demandeurs d’asile que ces dernières années. Il ne s’agit pas d’une crise de réfugiés, mais d’une crise systémique et de gouvernance. Le gouvernement néerlandais ferme à chaque fois les centres d’accueil et licencie les employés dès qu’il pense que le nombre de réfugiés diminue. Quelque temps plus tard, une autre vague de réfugiés arrive, par exemple en raison de l’évolution de la situation en Afghanistan, puis il y a à nouveau une pénurie.

Les autres pays gèrent-ils mieux ces situations ?

« C’est un problème partout. Regardez la Belgique, les communes ne sont pas prêtes non plus à y créer des lieux d’accueil. Là aussi les gens dorment dans la rue devant le Klein Kasteeltje. Regardez la Grèce, avec la situation à Moria il y a quelques années. Regardez les frontières européennes. Les réfugiés n’ont nulle part où aller. Il y a des refoulements violents, les gens sont littéralement repoussés avec leurs bateaux sur la Méditerranée. L’Union européenne paie même les garde-côtes libyens pour chasser les gens lors de leur traversée vers l’Europe. C’est tout simplement ridicule.



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