Mais comme cela s’est déjà produit pour Sissi, Maria Sofia est également fiancée au futur roi d’un pays lointain : il s’agit de Francesco II des Deux-Siciles, surnommé sans gloire Franceschiello.


Sil ressemble beaucoup au légendaire Princesse Sissi : grande, élancée, cheveux magnifiques, yeux bleu foncé. De force: Maria Sofia de Bavière est la sœur cadette de l’impératrice d’Autriche, celui immortalisé par les films avec Romy Schneider. Et son histoire fictive n’a rien à envier au mythe de son plus célèbre parent. Un historien expert, le professeur Aurelio Musi, nous en parle dans un livre qui vient d’être publié par Neri Pozza. Marie Sophie. La dernière reine du Sud reconstruit toute l’histoire passionnante.

Marie-Sophie de Bavière, reine du Royaume des Deux-Siciles.

Élevée (comme Sissi) au château de Possenhofen, Maria Sofia est aussi un charmant garçon manqué: chevauche comme une Amazone, chasse dans les bois, pratique l’escrime, la natation, la gymnastique et la danse, connaît la musique et a beaucoup de goût. Il fume même de petits cigares en public, imitant le père et les frères espiègles. Depuis toute petite, elle est exubérante, indépendante, anticonformiste : dans la famille, malgré les tentatives de sa mère Ludovica pour freiner ses excès, c’est l’air libre que l’on respire.

Comme Sissi, elle se marie avec la couronne sur la tête

Mais comme c’est déjà arrivé pour Sissi, qui à 16 ans épouse l’empereur François-Joseph et se retrouve à vivre dans une cour lointaine, aux prises avec une belle-mère difficile et un mari peu présent, aussi Maria Sofia est fiancée au futur roi d’un pays lointain : il s’agit de Francesco II des Deux-Siciles, surnommé sans gloire Franceschiello, le dernier souverain bourbon avant l’expédition de Garibaldi et l’unification de l’Italie. Lorsqu’elle devient sa femme, Maria Sofia a 18 ans et lui cinq ans de plus. Son père Ferdinand II, qui avait beaucoup de sympathie pour sa belle-fille bavaroise, décède prématurément et les deux jeunes mariés retrouvent une couronne sur la tête. Mais une couronne qui vacille : nous sommes en 1859, pratiquement à la veille du débarquement des Mille…

L’ombre menaçante de la belle-mère sévère

Maria Sofia est aux côtés de un mari plein de problèmes : il a toujours perdu sa mère, Maria Cristina de Savoie étant morte en l’enfantant, Francesco d’Assisi Maria Leopoldo a été élevé plus comme un dévot destiné à la vie religieuse que comme un souverain. « Réprimé, contrôlé par son père, succube de la sévère belle-mère, il se consacre avant tout aux lectures spirituelles et aux pratiques religieuses. Peu d’amis, pas de sport. Il était inexpérimenté dans l’utilisation des armes. Quant aux relations féminines, elles étaient taboues : à la fois pour l’éducation stricte que lui a transmise sa sévère belle-mère, et pour des problèmes physiques, peut-être un phimosis » écrit le professeur Musi.

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La « marâtre sévère » était alors Marie-Thérèse de Habsbourg-Teschen, la seconde épouse du roi Ferdinand, destinée à rendre la vie des deux jeunes souverains encore plus problématique par son ingérence constante. Malgré la situation inconfortable, la jeune Maria Sofia fait de son mieux pour reconquérir avec tout son charme et son charisme l’assentiment des sujets, qui n’aiment pas la faible personnalité du nouveau roiet pendant son temps libre, il se détend en enseignant des mots allemands à ses perroquets bien-aimés (il en possède une douzaine).

Son autre passion est la photographie : narcissique comme presque toutes les belles personnes, il aime utiliser cette technique récente pour se montrer sous son meilleur jour.. « Dans la longue série de portraits de reine, elle est apparue presque comme un mannequin, avec des vêtements à la mode ou comme une cavalière, avec un chapeau, un manteau et des bottes (…) bien consciente du pouvoir perturbateur du nouveau médium, grâce à le très moderne, conscient et très souvent peu scrupuleux qu’elle en a fait, ce qui lui a permis de devenir un véritable mythe médiatique, comme sa sœur Sissi ». Peut-être y a-t-il aussi une certaine compétition entre les deux plus jolies de la famille. Et en tout cas, assez pompeux de portraits à l’huile : la famille royale s’est montrée telle qu’elle était, pour tenter de récupérer à la dernière minute l’assentiment populaire perdu.

La Jeanne d’Arc des Bourbons

Malgré les concessions politiques de dernière minute, décidées par Franceschiello surtout sous la pression de Maria Sofia, la situation s’est aggravée. Lorsque les deux se retrouvent assiégés à Gaeta, la belle souveraine se transforme en Jeanne d’Arc du XIXe siècle. « Pendant les longs mois du siège, la reine était l’âme de la résistance. Abandonnant ses somptueuses crinolines, il se mua en soldat, en amazone. Son image a fait le tour du monde. Les photographes ont diffusé le portrait d’une femme qui passait en revue la troupe, recouverte d’un grand manteau calabrais, avec un chapeau hongrois à plumes, un chemisier avec une ceinture en cuir, un pantalon turc bouffant, des bottes hautes » précise le professeur Musi.

Iconographie presque comme une image : « De l’index de sa main droite il incite les soldats Bourbons« . Et ce n’est pas seulement l’apparence, la situation est très difficile. « Pendant les cinq mois du siège, il y a eu 1500 cas de typhus, de septicémie et de dysenterie qui ont frappé les soldats en masse : Maria Sofia s’est démarquée par son abnégation et son aide affectueuse aux malades et aux blessés« .

Victime d’un photomontage osé

Malheureusement, construire son mythe ne suffit pas : en février 1861, la dernière résistance est gagnée et la famille royale se réfugie à Rome. Et là le penchant de la reine pour la photographie se retournera contre lui, lorsqu’une féroce campagne de diffamation sera développée à travers un photomontage, l’un des premiers de l’histoire, qui la représente nue dans des poses lascives et qui plus est devant un portrait du pape. Ses détracteurs avaient collé son beau visage indubitable autour du cou d’une prostituée non dévoilée. Certes même les libéraux n’ont pas ménagé les coups bas… Et puis il y a un peu de vrai. L’héroïne en miroir de Gaeta, qui a toujours été rejetée par son mari entre les draps, prend ses libertés. Il a des amants, un pour sûr : un officier de l’armée pontificale, Armand de Lawayss, un noble d’origine belge. « Le résultat des rapports sexuels a été une grossesse. Se rendant compte qu’elle était enceinte, Maria Sofia a décidé de quitter Rome et de partir pour la Bavière. Il a allégué des raisons de santé » précise le professeur Musi.

Maria Sofia donne naissance à une petite fille, ou peut-être à des jumeaux, avant de retourner avec discipline aux côtés de son mari en exil. Franceschiello non seulement lui pardonne, mais décide enfin de résoudre son handicap physique et parvient à la mettre enceinte d’un enfant qu’ils appelleront Maria Cristina (comme sa grand-mère paternelle) et aussi Pia (comme Pie IX), mais elle ne vivra que trois mois. Une autre grande douleur pour la reine sans royaume.

A la recherche du royaume perdu

Elle, Maria Sofia, en revanche, survivra à tout le monde. A la belle-mère Maria Teresa, décédée du choléra en 1868. A Franceschiello, tué par le diabète à l’âge de 58 ans en 1894. A sa soeur Carlotta, brûlée vive dans un incendie en 1897. A l’autre soeur Sissi, tragiquement poignardé par un anarchiste en 1898. Après s’être installée à Paris, Maria Sofia continue de faire vivre une petite cour de Bourbon en exil et de travailler dur pour tenter de reconquérir le royaume perdu, au point qu’elle est même accusée d’avoir des relations avec les ennemis de la Savoie, comme celle de Bresci. qui a tué Umberto I. Pendant la Première Guerre mondiale, il a sympathisé avec l’Allemagne et l’Autriche. « L’Aquiletta Bavara », comme l’avait surnommée Gabriele D’Annunzio, admiré, mourut d’une pneumonie à Munich le 19 janvier 1925.

Dans une dernière interview diffusée peu avant de mourir à un jeune Giovanni Ansaldo pour L’empreinte de Turin, elle dira avec coquetterie: «J’ai quatre-vingt-trois ans. Un de plus que l’honorable Giolitti. Je suis très vieux « . Et puis, dans un élan de fierté, il lui montrera deux aquarelles représentant le Vésuve. «Mon roi les a peints. Non, mon roi n’était pas un imbécile… comme on dit ». Et enfin, avec le sourire malicieux de quand elle était petite : « Ça se voit. Je suis pauvre. Et je vis ici avec la permission d’un de mes neveux. Les Savoie n’étaient pas chics avec nous les Bourbons… ».

Sofia, le manque de rôle par Greta Garbo

Les livres, la radio, le film rêvé. Maria Sofia a inspiré des écrivains et des réalisateurs

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Il ne respecte pas l’étiquette de cour, comme sa sœur Sissi, impératrice d’Austra. Marie Sophie. La dernière reine du Sud (Neri Pozza) d’Aurelio Musi raconte le court règne et l’exil d’un souverain exubérant et anticonformiste. Au cours de sa longue vie, Maria Sofia a inspiré des écrivains et des artistes comme Alphonse Daudet (Les rois en exil), Gabriele D’ Annunzio (Les vierges des rocherse), Marcel Prout (La prisonnièredans À la recherche du temps perdutu). Cornelius Rudolph Vietor les dédie Die letzte Königen von Naples (La dernière reine de Naples). Leonardo Sciascia vous donne une belle interview impossible pour Radio Rai. Luchino Visconti caresse l’idée de faire un film sur sa vie, lui donnant le visage de Greta Garbo. L’actrice, absente des plateaux de tournage depuis trente ans, fait savoir qu’elle aimerait ça. Ça n’arrivera pas : Visconti tourne à la place Louis en 1973, avec Romy Schneider dans le rôle de Sissi.

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