L’ordre politique établi a tenu bon lors des élections roumaines de dimanche. Les deux partis au pouvoir, le PDS social-démocrate et le PNL démocrate-chrétien, ensemble, ils ont atteint 36,5 pour cent des voix et poursuivront probablement leur coalition, avec ou sans un troisième ou un quatrième parti.
Cela signifie que la ligne pro-européenne de la Roumanie est maintenue. Un changement de cap dû à une éventuelle victoire du parti d’extrême droite AUR, peu intéressé par l’UE, est hors de question. Après le choc du week-end dernier, lorsque le candidat d’extrême droite, ultranationaliste et sans parti, Calin Georgescu, a remporté de manière inattendue le premier tour des élections présidentielles, c’est un soulagement pour les forces pro-européennes à l’intérieur et à l’extérieur de la Roumanie.
Dans le même temps, l’extrême droite s’est solidement implantée dans la société roumaine et désormais aussi au Parlement. L’AUR du chef du parti George Simion a obtenu 18 pour cent des près de 9,5 millions de suffrages exprimés – sur une population de 19 millions d’habitants – et est ainsi devenu le deuxième parti, après le PSD social-démocrate avec 22 pour cent.
Les acquis de deux autres jeunes partis d’extrême droite sont remarquables. SOS RO, dirigé par la députée européenne controversée Diana Sosoaca et fondé en 2021 en raison de déclarations antisémites, a obtenu 7,8 pour cent des voix. POT (Parti des jeunesfondée en 2024) a atteint 6,4 pour cent.
Ensemble, AUR, SOS RO et POT représentent 32,5 pour cent des voix. Les trois partis sont qualifiés d’extrême droite et très nationalistes. Ils préfèrent se qualifier de « souverains », plutôt que de « mondialistes ».
Corruption et pauvreté
Les deux élections, présidentielle et parlementaire, témoignent d’un grand mécontentement à l’égard de la politique actuelle. Les Roumains accusent les partis traditionnels de corruption et de copinage, et de leur incapacité à faire quoi que ce soit contre la pauvreté persistante et le déficit budgétaire vertigineux. Le rôle important que joue la Roumanie dans la défense du flanc oriental de l’OTAN est avant tout dans l’intérêt de l’Europe et n’apporte que peu d’avantages directs à ses habitants.
Après la victoire des partis établis, les troubles politiques ne sont pas encore terminés. Même si la présidence roumaine est essentiellement cérémonielle, la victoire provisoire de Georgescu a bouleversé le pays. Georgescu doit son surnom de « Messie TikTok » à son succès sur la plateforme de médias sociaux et à sa présentation spirituelle et religieuse.
Lire aussi
sur la victoire inattendue de Georgescu
Le rôle perturbateur de TikTok dans la campagne a été confirmé la semaine dernière par le Conseil de sécurité, qui a jugé qu'”un candidat a bénéficié du favoritisme de TikTok en ne le désignant pas comme candidat politique”. Le conseil discute également des cyberattaques visant à influencer le processus électoral.
Non pas à cause de l’influence de TikTok, mais à cause d’une plainte d’un autre candidat à la présidentielle sur une question relativement mineure – les votes d’un candidat écarté auraient abouti indûment à la numéro deux, Elena Lasconi du parti libéral USR – la Cour constitutionnelle a décidé que les votes du premier tour ont dû être recomptés.
Plus tard ce lundi, la Cour constitutionnelle annoncera si le premier tour sera déclaré invalide. Dans ce cas, le premier tour de l’élection présidentielle aura lieu à nouveau le 15 décembre, avec un second tour le 29 décembre. Si le premier tour reste valable, le second aura lieu dimanche prochain, comme prévu.
Choix politique du tribunal
Le point du recomptage n’est pas la première place pour Georgescu, mais la deuxième place. Le candidat libéral Lasconi a étonnamment gagné avec une petite différence sur le candidat du PDS et actuel Premier ministre Marcel Ciolacu. Le second tour oppose les deux premiers candidats et exclut donc Ciolacu. Le recomptage et les nouvelles élections sont en sa faveur.
La décision de la Cour constitutionnelle sera considérée comme un choix politique, surtout si le premier tour est déclaré invalide. C’est dans l’intérêt du PDS, le parti qui a nommé quatre des neuf juges de la Cour. La Cour a fermé ses portes en octobre Le leader de SOS RO, Sosoaca, s’est retiré de l’élection présidentielle parce que cela violerait la constitution et mettrait en danger l’adhésion de la Roumanie à l’OTAN et à l’UE. Cela a également été considéré comme une décision politique et a conduit à beaucoup de critiques.
Si le premier tour est déclaré valide, il sera majoritairement en faveur de Calin Georgescu. Dans un article publié lundi après-midi sondage de l’agence CURS il dispose d’une large avance : il obtiendrait près de 58 pour cent des voix au second tour, contre 42 pour cent pour la candidate pro-européenne Elena Lasconi.