L’ancien ministre MR Jean-Luc Crucke passe aux Engagés. Il ne peut plus franchir une seule porte avec le président Georges-Louis Bouchez. Qu’est-ce que cela signifie pour les libéraux francophones ? “Dans sa circonscription, Crucke est extrêmement populaire.”
« J’ai peut-être pris un risque. D’autres diront : ça nous va. Je continue à défendre le libéralisme social et vert. Je ne trouvais plus ma place dans un parti qui vire à droite sous des impulsions trumpiennes.
Jean-Luc Crucke n’a laissé aucun doute en conférence de presse sur son passage aux Engagés : ça ne clique plus avec le président du MR Georges-Louis Bouchez. L’attitude du parti dans le dossier de la Boucle du Hainaut, pendant wallon de Ventilus, a été l’ultime déclic pour quitter le parti.
En soi, la sortie de Crucke n’est pas une surprise. Il y a un an, Bouchez l’a laissé démissionner de son poste de ministre wallon des Finances et du Budget, officiellement parce qu’il avait une politique budgétaire différente de celle de son parti. Dans les coulisses, le conflit entre les deux s’est amplifié depuis un certain temps. Alors que Bouchez dirigeait le parti dans une direction de plus en plus à droite, Crucke est devenu un libéral social et vert. En raison d’une réforme des statuts du parti, Crucke avait déjà perdu sa vice-présidence. Après son départ en tant que ministre, il s’est vu proposer un poste de juge à la Cour constitutionnelle. Il en a remercié.
Menace?
Crucke deviendra désormais vice-président chez Les Engagés, où il se concentrera sur les questions climatiques et énergétiques. Auparavant, il avait tenté de mettre en place un mouvement centriste avec les chrétiens-démocrates et DéFi à bord, mais cela avait échoué.
Cela n’empêche pas les partis de conclure une alliance après les élections de 2024. Une telle collaboration a-t-elle une chance de dépasser le MR ? “Peut-être à Bruxelles”, estime le politologue Geoffrey Grandjean (Université de Liège). « Mais en Wallonie, ce sera difficile. Certes, DéFi n’y est pas assez fort. La vraie bataille continue entre PS et MR, avec PTB et Ecolo qui peuvent faire la différence.
Alain Gerlache, journaliste wallon et chroniqueur de ce journal, doute également que les deux partis soient assez forts pour constituer une menace pour le MR. « Les Engagés ont un gros problème à Bruxelles. Ils se battent vraiment contre le seuil électoral là-bas. En Wallonie c’est l’inverse, DéFi n’y a pas un seul élu.»
Néanmoins, selon Gerlache, l’arrivée de Crucke est bel et bien une victoire pour Les Engagés. « Crucke est extrêmement populaire dans sa circonscription. En Wallonie, il a marqué dans le récent sondage électoral de RTL et Le Soir même un peu mieux que Bouchez. C’est la première fois depuis l’opération de renouvellement que Les Engagés peuvent faire venir un poids politique aussi lourd.
Relief
Bien que, selon Gerlache, cela dépendra si d’autres personnes suivent Crucke. Grandjean estime que les chances sont faibles. « Pour moi, cela montre que Bouchez a réussi à faire sortir du MR tout l’espace de l’opposition interne. Il a encore derrière lui la plupart des militants du parti. Il vaut mieux pour lui avoir un adversaire externe contre lequel il puisse s’exprimer clairement sur les réseaux sociaux qu’un adversaire interne.
Le MR n’a pas voulu répondre officiellement au départ de Crucke. Mais dans les couloirs, le mot ‘relief’ résonne principalement. « Ces dernières années, il n’était plus un vrai libéral. Il est toujours allé à l’encontre des intérêts du parti. Le choix des Engagés est qualifié d’« étrange » : « Ce parti est favorable au nucléaire, alors qu’il s’est toujours profilé comme écologiste. Soit il a soudainement fait un virage, soit il aura bientôt des problèmes avec le sommet du parti.