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Les règles de la FIFA sur les transferts de footballeurs professionnels enfreignent les règles de l’UE sur la libre circulation, a déclaré le plus haut tribunal de Bruxelles, dans un verdict qui pourrait perturber le système de vente de joueurs entre clubs du jeu européen.
La décision de la Cour européenne de justice intervient après que Lassana Diarra, ancien joueur international français, a contesté les règles dans le cadre d’un litige qui dure depuis dix ans avec son ancien club, le Lokomotiv Moscou. Diarra a affirmé que sa recherche d’un nouveau club était entravée par les règles de la Fifa, l’instance dirigeante du football.
L’arrêt Diarra est le dernier d’une série d’arrêts de la CJCE qui ont remis en question le statu quo juridique dans le sport et pourrait ouvrir la porte à des changements majeurs dans le marché des transferts de plusieurs milliards de dollars qui sous-tend le modèle économique du football professionnel, ont déclaré des analystes.
« Le jugement a de larges implications sur le système des transferts mais aussi sur la gouvernance de la Fifa et sa capacité à réguler le football », a déclaré Alfonso Lamadrid, associé chez Garrigues Bruxelles et expert en droit de la concurrence. « C’est un autre exemple de la volonté des tribunaux européens de contrôler les excès réglementaires de la Fifa et son manque de bonne gouvernance. »
En 2014, Diarra quitte le Lokomotiv Moscou avant la fin de son contrat, ce qui conduit le club russe à porter plainte auprès de la Fifa pour rupture de contrat. Après que la Fifa ait ordonné à Diarra de payer 10 millions d’euros de dommages et intérêts au Lokomotiv, l’ancien joueur de Chelsea, d’Arsenal et du Real Madrid a poursuivi la Fifa et la Fédération belge pour avoir bloqué son transfert à Charleroi.
Invoquant les risques financiers, juridiques et sportifs pour les joueurs, le tribunal a estimé vendredi : « Les règles en cause sont de nature à entraver la libre circulation des footballeurs professionnels souhaitant développer leur activité en allant travailler dans un nouveau club ».
Les avocats de Diarra ont déclaré que l’arrêt de la CJCE était une « victoire totale » pour leur client et « ouvrait la voie à une modernisation de la gouvernance » du football, « notamment à travers la négociation collective entre salariés et employeurs ».
Son équipe juridique était dirigée par Jean-Louis Dupont, l’avocat qui a contesté avec succès les règles de la Fifa en 1995 au nom du footballeur belge Jean-Marc Bosman. Cette décision de la CJUE permettait aux joueurs de circuler librement entre les clubs à la fin de leur contrat. Dupont a également affronté l’UEFA et la Fifa pour leur gestion de la Super League européenne séparatiste.
Yasin Patel, avocat sportif au sein de Church Court Chambers, basé à Londres, a déclaré que la dernière décision pourrait avoir « des conséquences considérables sur le système de transfert ».
« Les joueurs peuvent désormais être en mesure de se déplacer plus librement vers d’autres clubs en rompant un contrat plutôt qu’en étant liés au club et au contrat. De plus, les clubs acheteurs n’auront peut-être pas à payer d’indemnisation ou de réclamation », a-t-il déclaré.
Le syndicat mondial des joueurs, la Fifpro, a salué cette décision. Dans une déclaration sur X il disait : « La CJUE vient de rendre un arrêt majeur sur la régulation du marché du travail dans le football. . . ce qui va changer le paysage du football professionnel.
Simon Leaf, responsable du sport au sein du cabinet d’avocats Mishcon de Reya, a déclaré que cette décision n’était que la dernière d’une série de « défaites embarrassantes » pour la Fifa et qu’elle créerait « une incertitude significative sur le marché mondial des transferts de football ».
La dernière décision intervient alors que les régulateurs du football et les opérateurs de ligues décident de resserrer les restrictions en matière de dépenses pour les clubs, ce qui, selon les syndicats de joueurs, pourrait en fait créer un plafond salarial à certains niveaux du jeu.
La Fifa s’est dite « satisfaite que la légalité des principes clés du système de transfert ait été reconfirmée dans la décision d’aujourd’hui. L’arrêt ne remet en cause que deux paragraphes de deux articles du Règlement de la Ffifa relatif au statut et au transfert des joueurs, que la juridiction nationale est désormais invitée à examiner.
« La Fifa analysera la décision en coordination avec d’autres parties prenantes avant de commenter davantage. »
En juillet, la Fifpro et les ligues européennes ont également uni leurs forces pour déposer une plainte officielle concernant le bien-être des footballeurs, augmentant ainsi la pression sur la Fifa en raison du calendrier chargé des matches. Ils ont déclaré : « Les décisions de la FIFA au cours des dernières années ont favorisé à plusieurs reprises ses propres compétitions et intérêts commerciaux, négligé ses responsabilités en tant qu’instance dirigeante et porté atteinte aux intérêts économiques des ligues nationales et au bien-être des joueurs. »
Au cœur de ce débat se trouve la décision de la Fifa de faire passer la Coupe du monde des clubs de sept équipes à 32 équipes lors du tournoi qui se déroulera aux États-Unis en 2025.