Les récriminations fusent au sein du parti de Marine Le Pen suite au résultat des élections françaises


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Un haut responsable du Rassemblement national de Marine Le Pen a démissionné, sur fond de récriminations au sein de l’extrême droite française concernant son résultat électoral pire que prévu.

Gilles Pennelle, l’un des directeurs généraux du RN qui a largement contribué à la sélection des candidats aux récentes élections législatives anticipées, a présenté sa démission du comité national de direction du parti après que plusieurs autres personnalités ont critiqué ses choix.

Pour couronner le tout, le parquet français a annoncé mardi avoir ouvert une enquête sur le financement de la campagne présidentielle infructueuse de Marine Le Pen en 2022. Marine Le Pen et d’autres responsables du RN doivent également être jugés en septembre pour des allégations de fraude concernant des paiements de l’UE.

Après avoir facilement remporté le premier tour le 30 juin, le RN est arrivé troisième au second tour dimanche, en grande partie grâce à une stratégie des centristes du président Emmanuel Macron, coordonnés avec les partis de gauche, pour retirer tactiquement leurs candidats afin de consolider le vote contre l’extrême droite.

Mais le RN a aussi commis des erreurs durant la campagne. Le chef du parti et candidat au poste de Premier ministre, Jordan Bardella, a notamment avancé l’idée controversée d’interdire aux binationaux d’occuper des postes gouvernementaux « sensibles ». Plusieurs candidats novices du RN, sélectionnés par Pennelle et d’autres, sont également apparus comme mal préparés ou mal informés, tandis que d’autres ont tenu des propos racistes ou xénophobes.

Gilles Pennelle, à droite, qui a largement contribué au choix des candidats du RN aux élections, a présenté sa démission suite aux critiques sur certains de ses choix © Renaud Khanh/ABACA/Reuters

Depuis dimanche, Le Pen et Bardella ont publiquement imputé le résultat des élections aux « alliances contre nature » entre adversaires de gauche et centristes, mais Bardella a également assumé la responsabilité de certains faux pas.

“Il y a eu des erreurs de casting qui ont donné une mauvaise image de notre mouvement”, a déclaré M. Bardella sur TF1. Le soir du scrutin, il a reconnu ses propres erreurs, déclarant aux journalistes qu’il prenait sa “part de responsabilité” en tant que chef de campagne.

Lors d’une réunion du comité exécutif national du RN lundi, certains dirigeants, comme le maire de Perpignan Louis Aliot, ont exprimé leur inquiétude et leur colère face à la présence de personnalités aussi problématiques sur la liste des 577 candidats. Pennelle a présenté sa démission à l’issue de la réunion.

Edwige Diaz, députée de la Gironde qui fait également partie du comité de direction, a déclaré que Pennelle devrait démissionner pour occuper son siège au Parlement européen et que sa décision n’avait rien à voir avec le résultat des élections.

« On présente ça comme si on vivait les législatives comme un échec, alors qu’il s’agit juste des portes de Matignon [the prime minister’s office] « Nous n’avons pas poussé pour ouvrir », a déclaré Diaz.

Une nouvelle candidate au poste de député en Normandie a dû retirer sa candidature la semaine dernière lorsqu’une vieille photo d’elle portant une casquette de la Luftwaffe nazie est apparue.

Une autre candidate du RN a été tournée en dérision lorsqu’elle a affirmé dans une interview télévisée que le RN n’était pas raciste parce qu’il incluait des personnes de tous les horizons. Citant ses origines catalanes, elle a ajouté : « Mon ophtalmologue est juif. Et mon dentiste est musulman. »

Aliot a déclaré lundi sur France Bleu qu’il était “complètement fou” de voir qu’une dizaine de candidats “débiles” nuisaient à l’image du parti.

Bruno Bilde, un allié de longue date de Marine Le Pen originaire de son fief d’Hénin-Beaumont, dans le nord de la France, a déclaré au Monde que le parti « ne pouvait pas continuer comme ça » et devait faire mieux dans la sélection des candidats. « Il faut rassurer, et à la place, nous avons eu des gens avec des antécédents clivants et inquiétants », a-t-il déclaré.

Ces incidents de campagne ont mis à mal la stratégie de Le Pen et Bardella, qui consistait à présenter le RN comme un parti prêt à gouverner. Ils ont également mis à mal les efforts déployés par Le Pen depuis des décennies pour « détoxifier » le mouvement cofondé par son père, condamné pour incitation à la haine pour avoir minimisé l’importance de l’Holocauste.

Les responsables du parti défendent toujours le résultat de dimanche comme étant historique, sachant que le RN est désormais le plus grand parti au Parlement français. Ils resteront cependant dans l’opposition, étant donné que personne n’est prêt à gouverner avec eux.

Le second tour a donné un résultat sans précédent dans la France d’après-guerre, car tous les blocs politiques étaient loin d’avoir atteint une majorité absolue. Macron maintiendra le gouvernement intérimaire et le Premier ministre en place jusqu’à ce que les négociations entre les partis aboutissent.

Dimanche, à l’annonce des résultats des élections, les militants et sympathisants du RN sont restés abasourdis, certains fondant en larmes. Julien Hubert, un sympathisant du RN, a déclaré qu’il espérait que ce revers législatif ne ferait qu’aider le parti à mieux rebondir, peut-être dans un an si Macron est contraint de dissoudre à nouveau un Parlement fracturé.

“J’ai vu [Le Pen] « J’ai été déçue, comme après sa défaite à la présidentielle de 2017. Ce n’était pas pareil », a déclaré Hubert. « Les gens qui ont voté vont avoir le sentiment de ne pas avoir été écoutés. Je trouve donc cela presque porteur d’espoir pour la prochaine fois. »



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