Les militants britanniques pour le climat d’Extinction Rebellion suspendent leurs actions perturbatrices


Plus de blocages de routes de transit, plus de faux sang au Trésor britannique, plus d’occupations des sièges sociaux de banques comme Barclays ou de compagnies d’assurance comme Lloyd’s. WE QUIT, we stop, les militants pour le climat d’Extinction Rebellion au Royaume-Uni écrivent en grosses lettres sur leur site internet. Il semble que la branche britannique de XR ne souhaite pas mener d’actions perturbatrices pour le moment.

Ce serait un changement de stratégie saisissant. Parce que depuis sa création en 2018 la désobéissance civile était la marque de fabrique d’Extinction Rebellion – également connue sous le nom de XR. Avec leurs actions perturbatrices, l’organisation a provoqué un glissement de terrain au sein du mouvement climatique. « Mais peu importe à quel point les sonnettes d’alarme ont été sonnées, peu de choses ont changé », dit-il dans le message sur le site. Les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter et « la planète meurt » à un rythme toujours plus rapide.

1 Pourquoi ce virage stratégique maintenant ?

Extinction Rebellion considère également qu’il s’agit d’une décision « controversée ». Parce qu’en tant qu’organisation, elle croit au pouvoir des actions perturbatrices. Dans le même temps, les militants du climat appellent à changer de tactique de temps en temps. Bref, on peut être radical pour être un peu moins radical.

L’accent est donc déplacé sur « cette année ». Les militants de XR veulent travailler à la croissance de leur organisation et à la création d’une base plus large : « Nous préférons la participation aux arrestations et les bonnes relations aux barrages. » Ils espèrent faire plus avec des actions accessibles et ils veulent devenir une force que personne ne peut ignorer.

Jelle de Graaf, impliquée dans la branche néerlandaise d’Extinction Rebellion, pointe la situation britannique spécifique dans une réponse téléphonique. L’organisation Just Stop Oil a quelque peu repris l’élan de XR après la crise corona. L’année dernière, Just Stop Oil s’est surtout fait connaître pour ses campagnes de « climatisation » dans les musées, où les manifestants se sont collés à des peintures.

2 La recherche d’une base plus large est-elle la seule raison de ce revirement ?

Probablement pas. Le message sur le site Web fait explicitement référence aux tentatives du gouvernement de criminaliser ceux qui « s’expriment et agissent ». En mai de l’année dernière, le gouvernement britannique a annoncé une loi qui rendrait la paralysie de parties importantes de l’infrastructure nationale passible d’un an de prison. Si la loi, qui a été renforcée et attend d’être examinée par la Chambre des Lords, est adoptée, ce sera un délit de s’accrocher à un bâtiment ou à une voie ferrée. Même ceux qui, pour ainsi dire, se rendent à une manifestation avec un tube de colle risquent une peine de prison pouvant aller jusqu’à six mois.

De Graaf, qui s’est collé à la table de discussion dans l’émission télévisée de Beau van Erven Dorens l’année dernière, ne s’attend pas à ce qu’une telle loi effraie tout le monde. «Des militants courageux ont montré qu’ils étaient prêts à accepter des sanctions sévères dans leur combat pour préserver la vie sur Terre», dit-il. « Une telle loi pourrait réaliser le contraire de ce qui est prévu. Plus le gouvernement réagit vigoureusement, plus la contre-force qu’il évoque est grande.

3 Que fera ensuite Extinction Rebellion au Royaume-Uni ?

Pour l’instant, l’accent est mis sur « The Big One ». Le 21 avril, Extinction Rebellion veut mobiliser 100 000 personnes pour une manifestation au Parlement britannique. À la suite des grèves climatiques internationales de 2019, la Chambre des communes a déclaré une « urgence climatique ». Après cela, selon Extinction Rebellion, tout s’est calmé. Il n’y avait pratiquement pas de nouvelles politiques. En descendant massivement dans la rue ce printemps, l’organisation espère faire bouger le gouvernement britannique.

4 Cela met-il fin aux actions climatiques perturbatrices de XR au Royaume-Uni ?

C’est juste la question. Extinction Rebellion n’a pas de structure hiérarchique. C’est un mouvement décentralisé sans direction officielle et sans possibilité d’en devenir membre.

De Graaf dit qu’un de ses amis britanniques, qui est impliqué dans un chapitre XR local, n’était même pas au courant de la décision. Un tel groupe local pourrait bien faire une évaluation différente dans un proche avenir. De plus, dans le message sur le site, malgré le titre ‘Nous quittons‘, mentionne seulement ‘se distancier temporairement des troubles publics comme tactique principale’. Cela ne semble pas très ferme.

5 Cette décision a-t-elle des conséquences pour la filiale néerlandaise de XR ?

Non, dit De Graaf. XR aux Pays-Bas sait séduire les grands groupes, selon lui. « Aux Pays-Bas, vous voyez même des célébrités qui défendent nos objectifs », dit-il. « On le remarque aussi dans les nombreuses inscriptions aux formations actions et à la newsletter. »

De Graaf pointe également l’intérêt de l’action à Schiphol, où des manifestants se sont enchaînés à des avions privés l’an dernier, et des blocages de l’A12, qui attirent de plus en plus de participants.

Selon De Graaf, XR aux Pays-Bas travaille sur une nouvelle stratégie avec des promotions à plus long terme dans lesquelles la pression est de plus en plus accrue.

« Nous nous concentrons sur un certain nombre de points de basculement », explique-t-il. « Les subventions aux fossiles doivent cesser, des banques telles que Rabo et ING doivent changer leurs politiques et les Pays-Bas doivent arrêter de nouveaux projets d’extraction de combustibles fossiles. Cela n’arrivera pas, alors que selon l’Agence internationale de l’énergie, cela est nécessaire pour maintenir le réchauffement en dessous d’un degré et demi.

Le 11 mars, dans la semaine précédant les élections provinciales, Extinction Rebellion veut bloquer l’Afsluitdijk. « On y va à vélo, ça ne pourrait pas être plus néerlandais », annonce De Graaf. « Nous optons pour l’Afsluitdijk – un endroit qui montre très bien la vulnérabilité des Pays-Bas. »

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