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Et si le gouvernement obligeait les entreprises à reverser une part de leurs bénéfices aux travailleurs ? En Grande-Bretagne et en Amérique, la question est aussi vivante que le pigeon qui a rencontré mon chat. Mais l’idée n’est pas folle. De nombreux gouvernements proposent des allégements fiscaux pour encourager la participation aux bénéfices. Et dans certains pays, comme le Pérou, le Mexique et la France (bien sur), ils vont jusqu’au bout, obligeant les entreprises à partager le butin avec leurs salariés. De nouvelles preuves mettent en lumière les conséquences.
La participation aux bénéfices poursuit deux objectifs principaux. L’idée chantée autour des feux de camp des gauchers est que cela motivera le personnel et améliorera la productivité. (Cela semble charmant, même si l’on ne sait pas très bien pourquoi le gouvernement devrait pousser les entreprises à le faire.) L’autre objectif est plus direct : redistribuer du capital vers le travail.
Il a été difficile d’obtenir la preuve qu’il peut offrir l’un ou l’autre. Universitaires avoir trouvé corrélations entre participation aux bénéfices et productivité, mais peu de preuves concrètes de ce qui cause exactement quoi. Un 2001 étude a constaté qu’après que Continental Airlines ait offert une prime pour atteindre les objectifs à l’échelle de l’entreprise, les performances se sont améliorées. Mais les auteurs ont avancé que cela était dû au fait que le personnel effectuait une « surveillance mutuelle ». Dans d’autres secteurs, il pourrait être plus facile de faire du freeride.
Les actionnaires inquiets d’une ponction sur leurs bénéfices pourraient mettre en garde contre certaines conséquences imprévues et désagréables. Tout avantage fiscal, comme il en existe en France, coûtera cher au Trésor. (Le gouvernement britannique a abandonné un système volontaire de « rémunération liée aux bénéfices » dans les années 1990 après qu’il soit devenu un outil d’évasion fiscale.) Et les entreprises peuvent toujours réduire les salaires, laissant aux employés des revenus plus volatiles mais pas plus élevés. Une baisse des bénéfices non distribués pourrait freiner les investissements. Ou encore, comme pour toute réglementation, les entreprises pourraient se contorsionner pour éviter de payer.
Au Mexique, où le partage des bénéfices est une obligation constitutionnelle, la contorsion est courante. Rafael Avante, un avocat mexicain en droit du travail, explique qu’historiquement, les entreprises ont contourné les réglementations en recourant au travail informel et en embauchant des travailleurs par l’intermédiaire de filiales. Cette dernière protège en effet les bénéfices de la société mère. Le gouvernement a récemment tenté d’interdire la fausse sous-traitance, à la suite de quoi les employeurs ont exigé un plafonnement du partage des bénéfices.
En France, il y a aussi eu des distorsions. Leur programme exige que les grandes entreprises partagent une fraction des bénéfices « excédentaires » avec les travailleurs, définis comme ceux supérieurs à 5 pour cent de la valeur des capitaux propres. En 2019, environ deux cinquièmes de la main-d’œuvre a reçu des indemnités. Mais comme un nouveau brouillon constate qu’à la fin des années 1980, lorsque seules les entreprises de plus de 100 salariés étaient concernées, il existait un groupe suspect d’entreprises autour de ce seuil.
Cette étude évalue également les effets d’une réforme française de 1991, qui a étendu la couverture de la loi aux entreprises de 50 à 99 salariés. Ils comparent les entreprises nouvellement touchées avec celles situées au-dessous et au-dessus des nouveaux et anciens seuils, et peuvent ainsi isoler les effets du transfert forcé de bénéfices.
David Sraer, de l’Université de Californie à Berkeley, l’un des auteurs, a été surpris de constater que les investissements n’ont pas diminué dans les entreprises concernées. Malheureusement, la productivité n’a pas augmenté non plus. Et heureusement, en moyenne, les travailleurs concernés semblent bénéficier de revenus plus élevés. Les quatre cinquièmes de cette somme ont été payés par les actionnaires. Les contribuables ont financé le reste.
Avant que les frères de la finance de l’anglosphère ne commencent à réclamer aux décideurs politiques de revêtir des bérets, ils devraient probablement noter quelques mises en garde. Les résultats pourraient ne pas être valables pour les grandes entreprises ou pourraient s’estomper avec le temps. Plus important encore pour eux, parmi les travailleurs bien rémunérés, l’augmentation des revenus n’était pas statistiquement distinguable de zéro. Au lieu de cela, elle était concentrée parmi les revenus faibles et moyens. Sraer et ses co-auteurs pensent que cela est dû au fait que le salaire minimum rigide rend plus difficile pour les managers de réduire les salaires.
Sraer suggère que le système présente un autre avantage : il transforme les employés en agents chargés de l’application de l’impôt sur les sociétés. En France, les travailleurs engagent des consultants pour s’assurer qu’ils ne sont pas gênés par une comptabilité d’entreprise créative. Cela devrait décourager les entreprises d’essayer de falsifier leurs comptes.
L’expérience française offre un autre enseignement, basé sur une comparaison entre les dispositifs d’intéressement volontaire et leur version obligatoire. Une récente rapport du Conseil français d’analyse économique estime que le type volontaire semble s’accompagner d’une substitution « significative » des salaires. Camille Landais, auteur, estime que les entreprises utilisent la flexibilité qui leur est accordée pour planifier les paiements autour des négociations salariales de manière à ne pas augmenter la rémunération globale. Cela ne vaut pas la peine que l’État subventionne cela.
Pour tout parti politique désireux de mettre le feu à une réputation favorable aux entreprises, les systèmes de participation aux bénéfices constituent une option. Mais s’ils veulent redistribuer efficacement, il semble que le seul moyen soit d’utiliser la main lourde.
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