« Les droits des prisonniers dans les régimes pénitentiaires les plus durs sont sous pression »


Il y a un manque d’approche prudente et réfléchie des nombreuses mesures de sécurité que le ministère de la Justice et de la Sécurité a prises contre les criminels graves en prison ces dernières années. En conséquence, les droits de ces détenus sont sous pression.

C’est ce qu’affirme le Conseil d’administration de la justice pénale et de la protection de la jeunesse (RSJ) dans un avis qui sera publié jeudi sur les mesures de sécurité qui devraient empêcher les actes criminels en prison.

La lutte contre cette activité criminelle continue est une priorité politique depuis le meurtre de Peter R. De Vries et l’arrestation de l’avocat Youssef Taghi, aujourd’hui condamné, qui a envoyé des messages du membre de sa famille Ridouan Taghi de l’établissement extra sécurisé (EBI) en Vught à sortir en contrebande.

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Le RSJ, un organe consultatif indépendant auprès du ministre de la Protection juridique, ne mentionne pas nommément ces questions, mais précise qu’il existe une nouvelle catégorie de détenus avec le pouvoir et les ressources qui menacent les politiciens, les juges, les avocats, les journalistes, mais aussi personnel pénitentiaire et violence.

En raison de la menace accrue de ce groupe de détenus, les mesures de sécurité augmentent rapidement, constate le RSJ. En plus de divers nouveaux projets de construction pour héberger des détenus dangereux – dont la construction d’un deuxième EBI à ​​Vlissingen – une série de mesures juridiques aggravantes ont été introduites au cours de la dernière année et demie. Par exemple, la période de stage standard à l’EBI a été étendue de 6 à 12 mois et un nouveau service de surveillance intensive a été créé avec des garanties légales insuffisantes. Et il y a plus dans le pipeline : des recherches sont menées pour le compte du ministère de la Justice et de la Sécurité sur la façon dont le régime strict de détention de la mafia italienne, dans lequel les détenus sont presque complètement isolés, peut être transposé aux Pays-Bas.

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L’emprisonnement est la punition

La ruée vers les mesures inquiète le RSJ. Cet accent mis sur la sécurité met les trois principes de base du système pénitentiaire sous pression. Ces trois principes, qui découlent du droit néerlandais en tant que lignes directrices européennes, signifient que la liberté d’un détenu ne peut être restreinte plus que nécessaire, que sa détention doit viser à réintégrer la société (resocialisation) et que son traitement doit être humain. . « La prémisse sous-jacente est que la peine est l’emprisonnement », explique le président du RSJ, Han Moraal. « Les conditions de détention ne devraient donc pas être très punitives. » Il note que ce point de départ, qui a été utilisé aux Pays-Bas pendant des décennies, a récemment été « parfois perdu » dans le débat social et politique.

pierre de touche

Dans l’avis, le RSJ énumère à nouveau les trois principes avec l’espoir que le ministre de la Protection juridique Franc Weerwind (D66) les utilisera à l’avenir comme pierre de touche pour de nouvelles mesures de sécurité. Une personnalisation doit être prévue pour chaque détenu. Le RSJ reconnaît la nécessité de mesures de sécurité supplémentaires, mais souligne que la base juridique, la justification politique et la faisabilité pratique doivent être correctement élaborées lors de la prise de ces mesures.

Cela a fait défaut à plusieurs reprises ces derniers temps. La caractéristique du système de détention néerlandais est que les détenus qui ne sont pas d’accord avec une décision – par exemple sur le placement dans un certain régime pénitentiaire – peuvent introduire des objections et faire appel. Ce n’est pas toujours le cas maintenant. Pour les détenus qui sont placés dans un nouveau service de surveillance intensive, il n’est pas précisé quand et dans quelles conditions ils peuvent quitter le service. Cela s’applique également au régime carcéral des détenus ayant des problèmes de gestion.

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Selon le RSJ, des travaux se font à la hâte dans certaines régions. L’organe consultatif souligne l’importance d’une approche prudente et réfléchie et précise que les politiques et l’administration doivent parfois prendre du recul. « Nous pensons que dans un État constitutionnel comme les Pays-Bas, vous devez gérer la coercition gouvernementale avec beaucoup de prudence », déclare Moraal. Le RSJ trouve donc imprudent que le ministre Weerwind ait déjà mis en place diverses mesures en prévision de l’enquête sur le régime mafieux italien. « Il est dommage que le ministre n’ait pas attendu le résultat de l’enquête. Cela aurait été mieux dans le cadre de la diligence raisonnable.

Ingérence politique

Dans son avis, le RSJ note à plusieurs reprises que des mesures de sécurité sont prises sous une pression politique considérable et note que cela ne profite pas à la qualité et aux soins. L’organe consultatif indépendant constate une « ingérence importante » de la part des membres de la Chambre des représentants qui, entre autres, demandent des mesures détaillées dans les prisons par le biais de motions. Le RSJ appelle cela « une évolution inquiétante ».

À titre d’exemple, lorsqu’on lui a demandé, Moraal cite une motion adoptée l’année dernière par le député du VVD Ulysse Ellian dans laquelle, entre autres, le contact téléphonique dans l’EBI est réduit à une fois dix minutes par semaine. « C’est une pression politique inutile. Le Parlement devrait contrôler le ministre. Bien sûr, les députés devraient exprimer leurs préoccupations au sujet de certaines questions et demander au ministre une solution, mais ils devraient laisser la forme exacte de cette solution au ministre – l’exécutif.

L’avis du RSJ concerne un groupe relativement restreint d’environ soixante-dix à quatre-vingts détenus qui séjournent dans les régimes carcéraux les plus durs du pays. Le fait que cela concerne un nombre limité de détenus contre lesquels, de surcroît, il y a un fort appel social à des représailles, est sans importance pour Moraal. « Ils ont aussi des droits. Eux non plus ne devraient pas être punis plus sévèrement que nécessaire », déclare Moraal. Selon lui, cela fait partie de la manière constitutionnelle dont les Pays-Bas traitent les détenus depuis des décennies. « Vous pouvez très bien lire le contenu juridique et la civilité d’un pays dans la façon dont il traite ses prisonniers. »



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