Les droits de succession ont été réduits à un impôt supplémentaire sur la classe moyenne inférieure

Dimitri Thijskens est journaliste à Le matin.

Dimitri Thijskens

Dans un petit village de Flandre occidentale, 2,7 milliards d’euros ont été collectés l’année dernière, soit deux fois plus que tous les dons de tout Anvers. Une taxe de 3 pour cent doit être payée sur un don. Une aubaine pour le trésor belge, pourrait-on penser, une recette supplémentaire de 80 millions d’euros. Pas du tout, exactement 0,0 euro d’impôt a été payé sur ces 2,7 milliards d’euros. Dans ce cas, il s’agissait d’une entreprise familiale qui pouvait être transmise à la génération suivante en franchise d’impôt.

Ce n’est qu’une des nombreuses méthodes tout à fait légales utilisées pour éviter les droits de succession en Belgique. La donation en elle-même est une formule avantageuse : quiconque fait don de son épargne, de ses obligations ou de ses actions aux enfants ne paiera que 3 pour cent, contre 27 pour cent pour les héritages.

Il est clair que cela encourage les abus. Dans un premier temps, les taux des droits de donation devraient être alignés sur ceux des droits de succession. Aujourd’hui, il arrive souvent que seuls ceux qui ont la malchance de ne pas planifier leur succession doivent apporter une contribution importante. Les droits de succession ont ainsi été réduits à un impôt supplémentaire sur la classe moyenne inférieure. Cela ne dérange pas du tout les Belges les plus riches.

Cela nuit également au trésor. Il passe à côté de nombreux milliards qui auraient pu être utilisés pour le bien commun. L’année dernière, 34,8 milliards d’euros ont été transférés d’une génération à l’autre en Belgique par le biais d’héritages ou de donations : une somme gigantesque, plus que le trou béant de notre budget. Cela a généré 2,1 milliards d’euros pour le Trésor, soit à peine 6 pour cent. Bien inférieur aux plus de 50 pour cent que nous payons sur nos salaires.

Il n’existe pas d’impôt là où l’écart entre la théorie et la pratique est si grand. Presque tous les experts s’accordent à dire que les droits de succession sont l’un des impôts les plus équitables. Politiquement, cela cadrerait également parfaitement avec leur idéologie de socialistes et de libéraux : vous travaillez pour plus d’égalité et vous veillez à ce que chacun puisse commencer sa vie avec plus d’égalité des chances.

De plus, cela garantirait que beaucoup plus d’argent se retrouve dans l’économie réelle. Les gens très riches thésaurisent souvent leur argent, en particulier les milliardaires de ce monde. D’un point de vue économique, il est bien plus rationnel de remettre cet argent entre les mains de ceux qui ont du mal à joindre les deux bouts : ils le réinjecteront immédiatement dans l’économie. Cela peut être réalisé simplement en réduisant considérablement les taux d’imposition du travail et en rendant le travail plus intéressant financièrement. Aujourd’hui, les gens manquent souvent d’argent pour faire les courses indispensables à la famille ou acheter de nouveaux vêtements pour les enfants. Cela pourrait être compensé par une taxe légèrement plus élevée sur les successions et les donations supérieures à environ 10 millions d’euros. Plus de 99 pour cent des Belges ne ressentiraient rien du tout et les plus riches ne ressentiraient que peu.

Aussi logique que cela puisse paraître, cela n’arrivera pas à court terme. Il n’y a aucun soutien en sa faveur et la méfiance à l’égard du gouvernement est trop grande. De plus, ce genre de chose devrait idéalement être réglementé au niveau international pour prévenir l’évasion fiscale.

En attendant, il faut bien savoir qu’une des familles les plus riches de Belgique paie moins d’impôts sur une donation de 2,7 milliards d’euros que quelqu’un qui hérite d’une maison mitoyenne de ses parents. Et l’écart ? Cela devient de plus en plus grand.

Le gouffre

Réussir est-il encore une question de travail acharné, ou est-ce plutôt une question de lieu de naissance ? Quelle est l’ampleur du fossé entre les nantis et les démunis en Flandre ? Et si vous deviez prendre le départ de la course derrière ? Et comment pouvons-nous combler l’écart ? De Morgen s’est penché sur la question.



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