Les Birkenstocks et les pompes à chaleur sont également sous surveillance par crainte des Chinois

A partir du 1er juillet, les investisseurs extérieurs à l’Union européenne dans les secteurs sensibles devront s’inscrire auprès du comité de sélection en Belgique. Ces secteurs sont largement définis, donc un déluge d’applications est attendu. « Cela pourrait décourager les entreprises. »

Dimitri Thijskens

En 2016, l’entreprise publique chinoise State Grid a fait une offre pour 14% des actions de la société de distribution Eandis. Après une vague de protestations, cet accord a finalement échoué. Depuis lors, des appels ont été lancés pour davantage de contrôles sur ces investissements dans des secteurs stratégiques. Il existe depuis 2019 un règlement européen qui fixe les conditions d’un tel dépistage.

Le fait qu’il ait fallu encore quatre ans avant qu’un mécanisme de filtrage des investissements non européens soit effectivement introduit dans notre pays – nous ne sommes que le 19e des 27 pays de l’UE – est principalement dû à la complexité de la Belgique : tous les gouvernements ont dû en parler toucher une fois. La Commission interfédérale de filtrage sera en effet active à partir de samedi : les entreprises étrangères qui souhaitent mettre la main sur 10 % ou plus des entreprises belges qui touchent à la défense, à la cybersécurité, aux communications électroniques ou aux infrastructures numériques devront s’y inscrire. Dans un certain nombre de secteurs légèrement moins critiques – tels que les médias ou l’alimentation – ce seuil est de 25 %.

La question est de savoir si ce comité de sélection est tout à fait prêt. « Nous entendons dire que le recrutement bat encore son plein en ce moment », déclare Bart Vanstaen. En tant qu’avocat chez PwC Legal, lui et son collègue Ive Serneels assistent les entreprises étrangères dans leurs investissements et bientôt aussi dans ces demandes. « Le comité traitera-t-il le flux de candidatures ? À notre avis, un filet assez large est en train d’être mis en place pour n’attraper que quelques poissons vraiment pertinents. La plupart des investisseurs viennent du Royaume-Uni, de Suisse ou des États-Unis, eux aussi devront tous passer par cette procédure.

La pratique en Allemagne montre que non seulement géographiquement, mais aussi substantiellement de nombreuses entreprises sont visées. « Un investissement dans Viessmann, producteur de pompes à chaleur, entre autres, a dû être soumis en raison du rôle que l’entreprise joue dans la transition énergétique allemande », explique Vanstaen. « Ou encore plus remarquable était un investissement dans Birkenstock, un producteur de sandales. Il a fallu l’enregistrer car cette chaussure est également largement utilisée par les médecins. Et donc Birkenstock est d’une importance stratégique pour l’économie allemande. Je conseille donc à nos clients d’enregistrer trop plutôt que trop peu, surtout au début car il y a encore beaucoup d’incertitudes sur la façon dont les choses vont se passer en pratique. Si vous oubliez de signaler quelque chose, vous pouvez être condamné à une amende de 30 % du chiffre d’affaires.

Serneels est d’accord avec l’esprit de la loi, mais craint que dans sa forme actuelle, elle puisse effrayer les investisseurs. « Nous sommes une économie ouverte et pourtant nous devons beaucoup aux investissements étrangers. Cela pourrait causer le retard nécessaire et cela pourrait effrayer les investisseurs.

Mais le cabinet du ministre de l’Economie et du Travail Dermagne indique qu’il y aura un contrôle continu et que « des mesures rapides seront prises » si nécessaire.



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