Le tirage au sort de la Ligue des Champions : Naples, Milan et l’Inter attaquent les meilleurs joueurs d’Europe

Comme en 2006 : trois en quarts de finale. Manchester City, le Bayern et le Real les dangers. Aucun objectif n’est impossible

Fabio Licari

Retour vers le futur. Retour à un football qui semblait irremplaçable dans le nouvel ordre mondial : les « riches » du Qatar et des Emirats ont désormais inondé le système de milliards de l’Etat, creusé l’écart entre les clubs et bouleversé l’histoire. Une élite est née, PSG, City, Chelsea, qui peut se permettre des dépenses folles. Les Italiens n’ont plus gagné de Ligue des champions depuis 2010 : le mouvement est resté à l’âge de pierre en termes d’organisation et de mentalité. Mais quelque chose est en train de changer. Il n’était pas arrivé depuis 2006 que trois de la Serie A, Naples, Milan et l’Inter, figuraient parmi les 8 magnifiques de la Ligue des champions. Avec la Juve et la Roma en Ligue Europa, et la Fiorentina en Conférence, six sur sept sont en lice pour les quarts de finale. Personne n’a réussi. Et aucun objectif n’est impossible, comme au bon vieux temps : en effet, les idées, les inspirations et les modèles gagnants peuvent venir du passé.

Naples : offensif et spectaculaire comme le Milan de Sacchi

Le tirage au sort d’aujourd’hui dessine le chemin jusqu’à la finale comme un tableau d’affichage du tennis : il ne manquera pas d’influencer le destin. La ville effrayante de Haaland est une chose et jouer les cotes avec Chelsea, plus « jouable », en est une autre. Mais il n’y a pas d’imbattable comme le Madrid de Ronaldo ou le Barça de Messi. Napoli est l’équipe la plus spectaculaire et divertissante avec le Benfica de Schmidt. Il n’a rien à perdre, il joue avec légèreté, il combine des énergies apparemment infinies avec des mécanismes d’horlogerie. La référence la plus appropriée est le Milan de Sacchi, également à sa deuxième saison à Milan lorsqu’il a remporté la Coupe des Champions en 1989. Sacchi a été la première révolution depuis le football total, mais Spalletti mène également une petite attaque contre le système : la grandeur a été de réaliser qu’avec un rythme élevé et une mentalité offensive, il créerait un vide en Italie et surprendrait l’Europe. Avant Sacchi, les Italiens dans les coupes partaient du « ne les prends pas ». Ce Milan était un faux 4-4-2, avec Donadoni qui est passé de l’aile au milieu, en tant que milieu offensif, la vraie clé tactique. Que Milan s’est rendu compte qu’ils étaient formidables après avoir balayé le Real Madrid en demi-finale. Ce Napoli, dans un 4-3-3 très mobile comme le foot d’aujourd’hui, et avec le meilleur meneur de jeu du moment, Lobotka, ne fait jamais de calculs : un défi avec le Real d’Ancelotti pourrait donner le dernier saut qualitatif.

Milan : imprévisible et créatif comme Ancelotti

Personne ne cache que Naples donne une image du football italien différente des autres. Glasner lui-même, l’entraîneur de l’Eintracht, a parlé d’une équipe « anti-italienne ». Mais s’il existe un club historiquement européen, il s’appelle Milan. La Ligue des champions, c’est la tradition, c’est la « culture » du football, ça ne s’invente pas du jour au lendemain. Et Milan pourrait retrouver l’ADN de son grand passé dans les coupes. Vaincre la manche avec Tottenham, exorciser le totem anglais, était un exploit qui dépasse la crise des rivaux. Il faut maintenant retrouver la légèreté, la rapidité, l’imagination et l’imprévisibilité du premier Pioli : celui avec Theo latéral-mezzala, avec Leao un prototype plus proche de l’original encore Ronaldo, ou en tout cas un « parent » de Kakà, avec Tonali-Bennacer un combat et un couple gouvernemental… La référence est au dernier Milan réussi, celui d’Ancelotti qui a remporté la Ligue des champions en 2007 avec Kakà et Seedorf derrière Inzaghi, et avec Pirlo, Gattuso et Ambrosini entre les deux : ça pourrait être une suggestion tactique pour Pioli dont les trois arrières récents ressentent «l’appel» des quatre arrières dans différentes situations de jeu. Le Milan le plus beau de Pioli était européen, ils ont un peu perdu le fil mais peuvent le retrouver.

Inter : solide et irréductible comme l’équipe de Mourinho

Cet Inter ne restera pas dans l’histoire pour sa mentalité spectaculaire mais, si vous voulez, celle de Mourinho n’était pas non plus pour les esthètes. Mais c’était excitant, passionnant et réussi. Elle était solide et irréductible. Il a su se défendre comme nul autre, fermant toutes les lignes de dépassement : Chelsea, Barcelone et le Bayern en finale, en 2010, sont des défis dans le mythe de la souffrance et de l’explosion de joie. Équipe fermée et redémarrée, dans la meilleure tradition italienne. Herrera, Rocco et Trapattoni ont ainsi gagné. Le football a changé, l’esthétique n’est plus un accessoire, mais on ne peut pas non plus espérer imposer une seule pensée. La beauté du football réside aussi dans la variété des styles. Et celle d’Inzaghi est liée à un passé qu’il serait hypocrite de nier. Si son Inter commençait à jouer comme Napoli, il monterait dans les airs, n’ayant pas une mentalité et un scénario adéquats. Mais il peut faire autre chose. Il sait comment éloigner Barcelone de la surface puis les frapper avec une vitesse effrayante. Il sait conclure avec Porto, alléger la pression et repartir. Marquer peu, encaisser moins. Avec une attention obsessionnelle et une concentration totale en matchs simples ou en tout cas pendant 180 minutes. Mourinho a eu le courage, ou l’insouciance, de multiplier les attaquants en cas de besoin : c’est ce qui a pu inspirer Inzaghi pour dénouer certaines situations d’enlisement. Et si Lukaku de Conte revoyait…

Le tirage au sort : City, Bayern et Real Madrid injouables (ou peut-être pas)

Tirage gratuit. Derbys possibles, tous carrefours possibles. Quatre entraîneurs italiens (Ancelotti est aussi de la partie) et un classement théorique bien défini : City, le Bayern et le Real Madrid sont les plus forts. mais pas imbattable. Benfica est indéchiffrable comme Napoli. Chelsea physiquement fort et en pleine croissance. Pour Spalletti, par exemple, le « laissez-faire » du Real pourrait être utile. Pioli a perdu contre Chelsea et l’Inter plusieurs fois cette saison, le meilleur Milan pourrait créer des difficultés à Benfica en se regardant dans le miroir. L’Inter sait comment gérer Milan et pourrait répondre physiquement à l’impact compétitif de Chelsea. Rien n’est sûr. Sinon, ce sera un spectacle de rêve.



ttn-fr-4