Le roi Filip exprime des « regrets sincères » au Congo, mais aucune excuse n’a été présentée. Et maintenant?

Le regret que le roi Philippe a exprimé sous forme de lettre il y a deux ans pour les méfaits belges au Congo, il l’a maintenant aussi exprimé haut et fort dans la capitale Kinshasa. Plusieurs milliers de Congolais se sont rassemblés devant le bâtiment du parlement mercredi après-midi pour écouter le discours, le moment le plus attendu de la visite d’Etat de cinq jours du roi Philippe et de la reine Mathilde.

« Bien que beaucoup de Belges aient donné le meilleur d’eux-mêmes au Congo à l’époque (…) le régime colonial en tant que tel était basé sur l’exploitation et la domination », a clairement dit le roi. Il a également reconnu que le régime était « basé sur une relation d’inégalité » et se caractérisait par « le paternalisme, la discrimination et le racisme ».

Le roi Philippe condamna ainsi le règne de Léopold II et la période coloniale avec encore plus de fermeté que dans sa lettre précédente. Cela s’est produit à l’occasion du 60e anniversaire de l’indépendance congolaise, à une époque où le passé colonial belge, sous l’influence du mouvement Black Lives Matter, était lié à une discrimination et un racisme permanents et structurels.

Jalon

Dans le discours, le regret est même devenu « le regret le plus profond et le plus sincère ». Mais il n’y a pas eu d’excuses officielles. « Le roi aurait outrepassé ses limites avec cela », déclare le professeur émérite d’histoire Mark Van den Wijngaert. Le regret est une attitude morale, les excuses peuvent impliquer des réparations ou des remboursements. Une commission parlementaire spéciale se penche actuellement sur cette question.

« Écrivons ensemble ce nouveau chapitre », a lancé le roi au président Félix Tshisekedi. Ce message n’a pas été reçu avec un enthousiasme sans réserve. Que le roi utilise occasionnellement les langues nationales – le lingala, le swahili, le kikongo et le tshiluba – pouvait compter sur des applaudissements. Pendant le discours, cependant, il y avait aussi des huées.

Néanmoins, de nombreux observateurs de la communauté congolaise, comme la politologue Nadia Nsayi et Tracy Bibo-Tansia (11.11.11), considèrent le discours comme un « jalon historique », en partie grâce à des accents saisissants. Pour la première fois, un chef d’Etat belge nomme l’aide des soldats congolais dans les deux guerres mondiales. De plus, il s’adressait spécifiquement à la jeunesse, tant au Congo qu’en Belgique. Ce sont eux qui ont déclenché la discussion il y a deux ans.

Cette même jeunesse – du moins en Belgique – a deux esprits. L’activiste Lieven Miguel Kandolo a encore raté des excuses. « C’est le point de départ d’actions de relance concrètes, qui doivent aller bien au-delà des simples paiements », dit-il. Selon l’animateur de jeunesse Don Pandzou, la diaspora a été écoutée. « Vous pouvez entendre cela dans ses paroles. Maintenant, nous n’avons plus qu’à attendre que les politiciens mettent ces mots en action.

Plus tôt dans la journée, le roi et Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld) a remis un masque rare au Musée national du Congo (MNRDC), en provenance de l’AfricaMuseum. En prêt, cependant, en guise de déclaration d’intention. La semaine dernière, le cadre juridique d’une restitution à grande échelle a été approuvé par le comité de la Chambre. Ce texte doit encore être approuvé au parlement.



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