Le Pakistan touché par les inondations devrait suspendre le remboursement de sa dette, selon un document d’orientation de l’ONU


Le Pakistan devrait chercher à suspendre les remboursements de la dette internationale et à restructurer les prêts après que des inondations dévastatrices ont déclenché une urgence humanitaire et mis en péril les finances du pays, selon un mémorandum politique de l’ONU.

Le projet de document du Programme des Nations Unies pour le développement, consulté par le Financial Times, propose que le Pakistan négocie un allégement de la dette avec ses créanciers pour « endiguer la crise alimentée par le changement climatique ».

Les principaux créanciers du Pakistan sont les prêteurs chinois, à qui Islamabad doit plus de 30 milliards de dollars accumulés grâce à l’initiative Ceinture et Route de Pékin, ainsi que des pays comme le Japon et la France, la Banque mondiale et des détenteurs d’obligations commerciales.

Le mémorandum, que le PNUD partagera avec le gouvernement pakistanais cette semaine, soutient que les créanciers devraient envisager un allégement de la dette afin qu’Islamabad puisse donner la priorité au financement de sa réponse à la catastrophe plutôt qu’au remboursement des prêts.

Les paiements du Pakistan pourraient être « suspendus au plus tôt pour libérer de l’espace budgétaire pour les interventions urgentes en cas de catastrophe et le relèvement, la protection sociale et les besoins de développement du pays, qui ont été aggravés par les inondations catastrophiques », indique le projet.

Il propose également des restructurations ou des échanges de dettes, dans le cadre desquels les créanciers renonceraient aux remboursements en échange de l’acceptation par le Pakistan d’investir dans des infrastructures résilientes au changement climatique.

Le Pakistan, dont la dette extérieure totalise environ 100 milliards de dollars, était aux prises avec une crise de la balance des paiements qui a mis à rude épreuve sa capacité à rembourser ses emprunts avant même les récentes inondations sans précédent. Le pays, qui a été particulièrement touché par la flambée mondiale des prix des matières premières, a reçu un renflouement de 1,1 milliard de dollars du FMI le mois dernier.

La catastrophe a amplifié les défis, affectant plus de 30 millions de personnes et causant des dégâts estimés à 30 milliards de dollars.

La note du PNUD soutient qu’Islamabad et ses créanciers devraient trouver une solution à plus long terme qui « impliquerait de réduire les dettes du Pakistan à un niveau soutenable pour permettre au gouvernement de faire passer les besoins de la population en premier ».

Les observateurs disent que la participation à toute négociation sur la dette de la Chine, dont les prêts au monde en développement ont augmenté ces dernières années, sera particulièrement importante alors que l’inflation pousse davantage de pays dans la détresse. Les prêteurs chinois ont convenu cette semaine d’une restructuration de 1,4 milliard de dollars avec l’Équateur.

« Sans la Chine, il n’y aurait pas d’accord », a déclaré Sakib Sherani, directeur de la société de recherche Macro Economic Insights à Islamabad, ajoutant qu’il serait dans l’intérêt de Pékin d’aider le Pakistan. « Lorsqu’un débiteur particulier n’est pas en mesure de payer, cela a parfois du sens pour le prêteur. . . pour aller plus doux pendant un certain temps », a-t-il déclaré.

Le PNUD et le gouvernement pakistanais préparent également conjointement une série d’initiatives pour attirer des financements privés pour le climat, par exemple par le biais d’obligations vertes. L’agence prépare une « facilité d’assistance technique » pour aider le Pakistan à lever des dettes et des fonds propres sur les marchés des capitaux afin d’investir dans la résilience au changement climatique.

Alors que le Pakistan a déjà reçu un allégement de sa dette dans le cadre d’une initiative du G20 pour aider les pays à lutter contre la pandémie de coronavirus, les inondations ont souligné les dangers financiers du changement climatique. Il a également intensifié les appels aux pays riches pollueurs pour qu’ils prennent des mesures pour renforcer la solvabilité et la résilience des pays en développement vulnérables.

Le Pakistan fait partie des 10 pays les plus touchés par les phénomènes météorologiques extrêmes, bien qu’il contribue à moins de 1 % des gaz à effet de serre mondiaux, selon le PNUD. Une étude de ce mois-ci a estimé que le changement climatique avait rendu les inondations au Pakistan jusqu’à 50 % plus intenses.

Lors d’un voyage au Pakistan ce mois-ci, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a préconisé des échanges de dettes pour alléger le fardeau du pays.

Le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif s’adressera vendredi à l’Assemblée générale des Nations Unies à New York, où lui et d’autres dirigeants de pays en développement devraient demander une aide financière aux pays pollueurs.

Les investisseurs restent prudents quant aux perspectives du Pakistan. Après une brève reprise avant que les inondations ne s’intensifient en août, les obligations souveraines à 10 ans du Pakistan ont de nouveau chuté pour se négocier à environ 50 cents par dollar.



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