Le nouveau gouvernement français envisage une hausse des impôts sur les entreprises et les riches


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Le nouveau gouvernement français étudie des options d’augmentation des impôts sur les riches et les entreprises dans le but de réduire les déficits croissants, sans compromettre le bilan du président Emmanuel Macron en matière de réformes favorables aux entreprises.

Le ministre des Finances Antoine Armand, membre peu connu du parti centriste de Macron avant d’être nommé au cabinet du Premier ministre Michel Barnier ce mois-ci, a déclaré qu’une action décisive était nécessaire pour s’attaquer à « l’un des pires déficits de notre histoire » en dehors de crises exceptionnelles telles que la pandémie de coronavirus.

« Nous allons travailler à la hauteur de la gravité de la situation », a déclaré mardi le jeune homme de 33 ans sur France Inter. « Des prélèvements ciblés sur les ménages les plus aisés sont à l’étude. Des prélèvements ciblés sur les entreprises (…) sont également envisagés. »

Il a poursuivi : « Les gens qui ont des actifs très importants, qui parfois ne paient pas beaucoup d’impôts, peuvent peut-être contribuer davantage. »

Armand et le nouveau ministre du Budget Laurent Saint-Martin esquissent des hausses d’impôts potentielles à soumettre à Barnier en prévision du budget 2025 qui doit être présenté au Parlement le mois prochain. Ce budget sera le premier test politique majeur de Barnier, car les partis d’opposition ont menacé de déposer des motions de censure contre son nouveau gouvernement s’ils n’étaient pas d’accord avec ses choix en matière de dépenses et de fiscalité.

Augmenter les impôts constituerait une rupture majeure avec la politique économique de Macron depuis sa première élection en 2017, qui consiste à réduire les impôts sur les entreprises et les ménages, ce qu’il présente comme essentiel pour stimuler la croissance et l’augmentation des investissements.

Mais les gouvernements successifs de Macron n’ont pas accordé autant d’attention à la maîtrise des dépenses, misant sur le fait qu’une croissance plus forte augmenterait naturellement les recettes fiscales. Même si cette approche s’est avérée payante en termes de réduction du chômage et d’incitation des entreprises à investir, le manque de discipline budgétaire a conduit à de larges déficits.

Bruxelles a placé la France en procédure de déficit excessif et lui a demandé de fournir un plan de réduction de son déficit dans les années à venir. Les agences de notation ont dégradé la note du pays, tandis que le coût de ses emprunts a augmenté.

Le déficit devrait atteindre au moins 5,6 % du PIB en 2024, soit plus que l’objectif de 5,1 % pour l’année et dépassant le niveau de 5,5 % de 2023.

Les coûts d’emprunt français ont convergé mardi vers ceux de l’Espagne pour la première fois depuis la crise financière de 2008, les investisseurs s’inquiétant de la capacité de la France à combler son déficit budgétaire.

Dans son interview, Armand a fait part de son opposition à l’augmentation de la charge fiscale sur « les travailleurs et la classe moyenne au sens large ». Pourtant, son gouvernement a jusqu’à présent éludé les questions sur ce qu’il définit comme classe moyenne ou riche, ce qui laisse planer le doute sur les personnes ciblées par les nouvelles taxes.

Il a également souligné que toute augmentation d’impôt ne devrait pas « freiner la croissance ou la création d’emplois », signe que le gouvernement de Barnier essaierait au moins de se rapprocher de la politique économique de Macron.

Les analystes de Goldman Sachs soulignent que la pression fiscale en France est « déjà l’une des plus élevées parmi ses pairs, laissant peu de place à de nouvelles augmentations ».

« Nous nous attendons à ce que le mix politique soit orienté vers la réduction des dépenses, même si le Premier ministre Barnier s’est montré ouvert à l’idée de s’appuyer sur certaines mesures d’augmentation des recettes », ont-ils écrit dans une note adressée à leurs clients.

Les économistes ont suggéré plusieurs réductions potentielles qui affecteraient les entreprises, comme la réduction des subventions généreuses aux employeurs qui embauchent des apprentis ou celles accordées aux entreprises qui font de la recherche et du développement.

La question politiquement sensible de savoir si la France devrait rétablir un impôt sur la fortune, aboli par Macron et remplacé par un impôt sur la propriété immobilière, est également revenue sur le devant de la scène, dans un contexte où les partis de gauche appellent à forcer les riches à contribuer davantage aux caisses publiques.

Barnier a déclaré ce week-end qu’une « contribution exceptionnelle » pourrait être demandée aux « plus riches » et aux « très grandes entreprises multinationales qui peuvent contribuer à l’effort de relance national ».

Les chefs d’entreprise français commencent à sentir que le vent tourne en faveur d’une hausse des impôts. Patrick Martin, président du Medef, le lobby des entreprises, a déclaré mardi au Parisien qu’il était « prêt à discuter d’une hausse de l’impôt sur les sociétés ». Il a cependant averti le gouvernement que toute hausse ne devrait pas être précédée d’un véritable effort de réduction des dépenses publiques.



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