Le mime Dik Boutkan considérait son corps comme son instrument


Le mime Dik Boutkan était l’un des fondateurs du collectif amstellodamois Nieuw West à la fin des années 1970. Ils ont fait du théâtre indiscipliné, « expérimental » comme on l’appelait à l’époque, brut aussi, pour autant qu’il allait à l’encontre de l’ordre théâtral établi. Boutkan était un excellent acteur qui, avec sa silhouette grande et élancée, avait une présence naturelle sur scène. Lundi 29 janvier dernier, Boutkan est décédé dans sa ville natale d’Amsterdam.

Boutkan est né le 29 mars 1950 et a grandi dans le quartier Nieuw-West. À l’école de théâtre d’Amsterdam, il rencontre le mime Marien Jongewaard et l’auteur Rob de Graaf ; tous les trois interpréteront un nombre sans précédent de performances récalcitrantes, voire controversées, dont une version révolutionnaire de Pygmalion (1989) et le légendaire En dessous de zéro (1987) dans lequel le vrai whisky et le vrai vin (et non le faux) coulaient à flots.

Dévotion contrôlée

Bien que Boutkan ait été formé comme mime, il a pu jouer tranquillement plus tard dans sa carrière. Il considérait son corps comme « son instrument » et, selon ses propres mots, s’intéressait peu au théâtre de texte. Au début des années 1990, il se fait néanmoins remarquer dans des performances comme Cela s’est passé à Turin (1991), une adaptation par l’actrice Marlies Heuer du roman C’est comme ça que c’est arrivé par Natalia Ginzburg, et Ammorbidire II (1992) de Rob de Graaf. Le rôle de Boutkan ici, avec beaucoup de jeu silencieux, une diction musicale et un dévouement maîtrisé, était diamétralement opposé à la période du New West, avec agressivité et saccades.

La colère a laissé place à la mélancolie et à la réflexion, comme dans ces mots de Boutkan : « Dans une pièce exposée à l’est en hiver/ Une pièce où la lumière n’est pas allumée et où il n’y a pas de chauffage/ Que je suis heureux dans cette paix glacée. » Le rôle de Boutkan était formidable lorsqu’il prononçait ces mots : un mime comme un acteur de texte accompli. Son dernier rôle fut celui de Maïakovski dans Maïakovski : octobre (2017) de De Warme Winkel sur la mort du poète russe. La pièce s’ouvre avec Maïakovski lisant sa lettre d’adieu. Dans le style. Comme seul Boutkan pouvait le faire, un mime inspiré du texte.

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