Le fait que CD&V s’enfonce si profondément dans le sable suggère que quelque chose d’autre est en jeu ici

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Bart Eeckhout26 septembre 202218h30

Une crise politique se manifeste généralement là où on s’y attend le moins. Alors que certains analystes comptent depuis un an environ le moment où le gouvernement fédéral s’effondrerait, c’est le gouvernement flamand qui frappe sur la toile. Et au moment où elle voulait célébrer son propre triomphe : la déclaration annuelle de septembre, dans laquelle on apprendrait enfin comment le gouvernement Jambon soutiendrait le pouvoir d’achat des Flamands.

Non seulement le moment et le lieu de cette crise politique sont surprenants. C’est aussi un curieux conflit en termes de contenu. Un bon point de départ est qu’il vaut mieux atténuer une crise de pouvoir d’achat provoquée par le choc énergétique en ne subventionnant pas directement la consommation d’énergie, mais en compensant la perte ailleurs. Les allocations familiales offrent une option attrayante. Mais si vous donnez un peu à tout le monde, vous perdez beaucoup d’argent sans que personne n’en profite. Il est donc remarquable que CD&v en fasse un point de rupture. Un soutien plus axé sur ceux qui en ont le plus besoin est plus efficace et social.

Le fait que cd&v s’enfonce si profondément dans le sable suggère que quelque chose d’autre est en jeu ici. Depuis son élection à la présidence du CD&V, Sammy Mahdi a opté pour un profil fort, quel que soit l’impact sur les gouvernements dans lesquels se trouve son parti. La comparaison avec le président du MR Georges-Louis Bouchez est fréquente. Mahdi prend cela comme un compliment. Il a trouvé un dossier symbole par excellence dans les allocations familiales, après que le parti a autorisé la réduction de l’indexation l’an dernier. Jan Jambon et en fait l’ensemble de la N-VA et de l’Open Vld ont mal évalué ce changement de position. Ce que Mahdi veut vraiment dire, c’est : le profilage sur le capot de la coalition n’est pas le privilège exclusif de la N-VA ou de Zuhal Demir.

Les considérations tactiques de Mahdi sont donc la règle plutôt que l’exception dans la politique belge contemporaine. Avec un profil affûté, des partis intermédiaires comme CD&V, mais aussi Open Vld et Vooruit (et PS et MR en Belgique francophone) tentent de sortir de la crise existentielle.

Tout cela n’est pas vraiment nouveau. En avril 2010, un président de parti tout aussi jeune et nouveau a coupé la prise du gouvernement fédéral, même alors par inquiétude un peu trop enthousiaste au sujet de son propre profil. C’était Alexander De Croo à Open Vld. La manœuvre plaît mal aux libéraux. Aux élections qui ont suivi, ils ont pris un coup dur.

Nous ne sommes pas encore si loin. Des élections anticipées sont impossibles au niveau flamand, ce qui freine fortement la volonté de renverser le gouvernement. Cela pourrait être une bonne chose pour les parties concernées. Car bien sûr la page blanche qu’il a dû présenter au Parlement flamand fait honte à Jan Jambon et à la N-VA. Mais ce Sammy Mahdi ne doit pas se tromper dans les applaudissements qu’il reçoit désormais dans son propre cercle. Malgré toute l’attention, de nombreux électeurs n’auront également aucune pitié pour un parti qui ajoute une crise gouvernementale à une crise économique.



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