Karim Benzema prie pour les victimes de Gaza. LeBron James qualifie d’inacceptable l’attaque contre Israël. Le conflit au Moyen-Orient divise également le monde du sport et donne lieu à des discours de haine sur les réseaux sociaux. Une raison suffisante, estiment les experts, pour surveiller les publications des joueurs.
Le premier grand nom du sport à exprimer son soutien à Israël fut Thibaut Courtois. Sur ses réseaux sociaux, le gardien du Real Madrid s’est dit attristé par la situation et a exprimé son espoir de voir une fin rapide au « cauchemar ». Après quoi, son compte a failli exploser de commentaires haineux. Trois jours plus tard, la star du basket LeBron James a fermement condamné le terrorisme du Hamas. Les réactions furent tout aussi massives et dévastatrices.
De nombreux athlètes ont désormais également exprimé leur soutien à la cause palestinienne, parmi lesquels l’ancien international français Karim Benzema. « Toutes nos prières pour la population de Gaza, qui est une fois de plus victime de ces bombardements injustes, dans lesquels aucune femme ni aucun enfant n’est épargné. »
La politicienne française Nadine Morano s’est prononcée sur le tweet de Benzema sur la chaîne CNews. « Rien qu’en écrivant cela, il se fait un agent de la propagande du Hamas », a-t-il déclaré. Selon Gérald Darmanin, ministre français de l’Intérieur, Benzema entretient des contacts étroits avec les Frères musulmans. Il s’agit d’un mouvement islamique conservateur qualifié d’organisation terroriste dans plusieurs pays.
Anwar El Ghazi, attaquant du club de football allemand de Mayence, a parlé de génocide du peuple palestinien, tandis que l’international algérien Youcef Atal de Nice a retweeté une vidéo d’un prédicateur appelant à la violence avec des slogans antisémites. Et l’ancien footballeur Mesut Özil s’interroge sur l’humanité. El Ghazi et Atal ont déjà été suspendus par leurs clubs et ont dû supprimer leurs posts.
Supervision de l’équipe RP
C’est bien sûr une question épineuse, car comme tout autre être humain, un sportif a le droit d’exprimer son opinion. Seulement : plus ils sont célèbres, plus ils sont suivis sur les réseaux sociaux et plus leurs propos ont d’impact.
“Même si vous publiez quelque chose avec les meilleures intentions, vous devez quand même être mentalement fort pour faire face à la vague de messages haineux ou même de menaces de mort”, explique Steven Van Belleghem, expert des médias sociaux et professeur de marketing à la Vlerick Business School. « Cette partie est encore sous-estimée. Et si les médias traditionnels le mettent également en lumière, l’attention s’en trouvera encore accrue.»
Selon Van Belleghem, la plupart des athlètes sont désormais conscients que leurs tweets ou posts ne passent pas inaperçus. «Ils sont généralement guidés dans cette démarche par leur propre équipe de relations publiques ou leur direction. Justement pour éviter qu’ils postent un message dans un état d’émotion qui entraînerait des réactions négatives. Il est important de faire d’abord une analyse approfondie : qu’est-ce que je veux réaliser avec ? Le message me convient-il ? Et quelles sont les conséquences possibles ?
Pour cette raison, Van Belleghem semble recommander aux clubs de surveiller les réseaux sociaux de leurs joueurs. « Il est judicieux pour chaque employeur d’écouter de manière proactive les préoccupations d’un employé si vous savez qu’il ou elle est émotionnellement impliqué dans un conflit, comme dans la question palestino-israélienne ou dans l’invasion russe de l’Ukraine. Cela fait partie du bien-être de votre collaborateur, que vous soyez enseignant, facteur ou footballeur.
En Belgique
Les clubs de la Jupiler Pro League le font-ils aussi ? Scannent-ils les publications de leurs joueurs sur les réseaux sociaux ? La réponse est en grande partie oui. Ils contrôlent mais ne censurent pas, à condition qu’aucune limite ne soit franchie, précise le porte-parole d’Anderlecht, Mathias Declercq. « Les joueurs ont droit à leurs propres convictions. Nous n’allons pas leur interdire de s’exprimer. Mais nous agissons en cas de discrimination ou d’incitation à la haine et à la violence, ce qui n’est pas conforme aux valeurs du club.
Même ténor au Club de Bruges. “Nous accordons aux joueurs autant de liberté que possible sur leurs chaînes, à condition que cela ne nuise pas à eux-mêmes, aux autres ou au club”, déclare l’attachée de presse Kirsten Willem. «Contrôler leurs messages ne représente pas beaucoup de travail», ajoute son collègue Tom Vandenbulcke de AA Gent. « La plupart ne sont pas non plus très actifs sur les réseaux sociaux. »
Le fait que les clubs soient rarement ou jamais obligés d’intervenir est dû en grande partie à la prévention et à la sensibilisation. La plupart des clubs ont une politique en matière de médias sociaux, dans laquelle les joueurs reçoivent des trucs et astuces en début de saison. «Lors de ce briefing, nous indiquons clairement ce qui est possible et ce qui ne l’est pas», explique Maarten Thibaut, attaché de presse à OH Leuven. « Nous soulignons que les thèmes politiques et religieux sont sensibles. Dans l’affaire Sofia Kiyine (qui a percuté sa voiture dans une salle de sport, VH) par exemple, nous avons demandé aux joueurs de ne pas prendre position.
Anderlecht et AA Gent donnent également des directives à leurs joueurs. Vandenbulcke : « Il ne s’agit pas d’un document écrit, mais nous les informons des choses à faire et à ne pas faire. Il arrive rarement que les choses tournent mal. C’est une question de bon sens. » C’est également la règle à l’Antwerp FC, rapporte le chef de presse Erwin Van den Sande. « À tout moment et en tout lieu : faites preuve de bon sens. Et en cas de doute : parlez-en à quelqu’un du club.