L’allemand Uniper au bord de l’insolvabilité après une perte de 12 milliards d’euros


Le service public allemand Uniper a fait état d’une perte de 12,3 milliards d’euros au premier semestre, affirmant qu’il était devenu un « pion » dans le conflit ukrainien poussé au « bord de l’insolvabilité » par une chute spectaculaire des livraisons de gaz russe.

La perte du plus grand importateur européen de gaz russe est l’une des plus importantes d’une entreprise allemande, éclipsant la perte de 10,5 milliards d’euros de Bayer en 2020.

Le directeur général d’Uniper, Klaus-Dieter Maubach, a averti mercredi que l’Europe était confrontée à de sombres perspectives énergétiques cet hiver, affirmant que la crise de l’approvisionnement en gaz rendait « presque impossible » de prédire les performances du groupe au second semestre.

« Nous supposons que Gazprom, s’il le voulait, pourrait augmenter considérablement ses livraisons de gaz via Nord Stream 1 », a-t-il déclaré, ajoutant que les prix du gaz s’étaient détraqués en raison de « préoccupations concernant la fiabilité de l’approvisionnement énergétique ».

L’Allemagne, qui avant la guerre d’Ukraine achetait 55 % de son gaz à la Russie, essaie d’éviter de rationner l’énergie cet hiver. Malgré le manque de livraisons russes, ses installations de stockage de gaz ont été remplies à 77,3 % de leur capacité, conformément aux plans du gouvernement. Le gouvernement vise à ramener le niveau à 95% d’ici novembre.

Uniper, détenue majoritairement par le service public finlandais Fortum, a reçu le mois dernier un renflouement de 15 milliards d’euros du gouvernement allemand, qui prendra une participation de 30% et fournira également des prêts pour éviter un effondrement. Le cours de l’action Uniper a perdu plus de 81% cette année, ramenant sa capitalisation boursière à 2,8 milliards d’euros.

La société a été pressée par une baisse allant jusqu’à 80% des livraisons de gaz russe depuis juin, l’obligeant à acheter un approvisionnement coûteux sur le marché au comptant pour respecter ses obligations contractuelles de fournir du gaz à des clients en Allemagne, dont 100 services publics régionaux appartenant à des municipalités.

À partir d’octobre, Uniper pourra répercuter 90 % de la hausse des coûts sur les consommateurs. La société a averti qu’elle continuerait néanmoins à générer des pertes d’exploitation pour les 18 prochains mois, mais espérait pouvoir « revenir en territoire positif » en 2024.

Au cours des 12 derniers mois, les prix du gaz en Allemagne ont plus que quintuplé pour atteindre 200 € par mégawattheure. Uniper a déclaré que depuis que l’approvisionnement en gaz russe via le gazoduc Nord Stream 1 a commencé à diminuer à la mi-juin, il a subi une perte quotidienne moyenne de 60 millions d’euros. Il a également pris une dépréciation de 2,7 milliards d’euros sur sa participation dans l’ancien projet de gazoduc russe Nord Stream 2 et une perte de 4,9 milliards d’euros sur sa position sur dérivés.

« En Allemagne . . . il n’y a pas une seule entreprise énergétique qu’un tel développement ne mettrait à genoux », a déclaré Maubach, ajoutant qu’Uniper avait déjà tiré plus de la moitié d’une ligne de crédit de 9 milliards d’euros auprès du prêteur public allemand KfW.

Dans le cadre du plan de sauvetage d’Uniper, l’entreprise pourra accéder à jusqu’à 7,7 milliards d’euros de soutien gouvernemental. L’agence de notation Standard & Poor’s a qualifié Uniper d’« entité liée au gouvernement » depuis le sauvetage.



ttn-fr-56