La Russie condamnée pour le traitement de "prisonniers parias" par la CEDH

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné mardi la Russie pour le traitement inhumain et dégradant des soi-disant « prisonniers parias », qui sont au bas de la hiérarchie carcérale informelle.

L’affaire a été portée par 11 Russes qui purgeaient des peines de prison après avoir été reconnus coupables de divers crimes. Les détenus se sont plaints d’être traités par d’autres détenus parce qu’ils appartenaient à la catégorie des « parias », décrite comme la plus basse des quatre castes qui régissent les relations entre les détenus dans le système pénitentiaire russe.

« Tâches humiliantes »

Ces « parias » étaient accusés de « tâches dégradantes » et exposés à des violences ou à des abus sexuels s’ils « échouaient ». Ils auraient été logés dans des quartiers d’habitation séparés et ont affirmé que ces pratiques étaient tolérées par le personnel pénitentiaire russe.

S’appuyant sur les propos des détenus ainsi que sur des recherches universitaires et sur le fait que le gouvernement russe ne l’a pas démenti, les juges de la CEDH ont jugé que cette hiérarchie informelle des détenus était « établie ».

Ils estimaient que la stigmatisation et l’isolement physique et social des exclus, le déni de leurs besoins élémentaires, les violences et les menaces de violence dont ils étaient l’objet constituaient des traitements inhumains et dégradants qui allaient au-delà des souffrances inévitables inhérentes à la détention.

Défaillance des autorités russes

Ils soulignent que les autorités russes n’ont rien fait pour reconnaître le problème ou pour protéger les détenus, et soutiennent que l’absence de mesures pour prévenir cette situation est un problème structurel du système pénal russe.

La Cour a donc condamné la Russie pour avoir violé l’interdiction des traitements inhumains et dégradants et pour ne pas avoir fourni aux prisonniers de recours effectifs, droits garantis par la Convention européenne des droits de l’homme.
Moscou doit verser à chacun des plaignants jusqu’à 20 000 euros pour « dommages moraux ».

Pas obligé de faire respecter les droits

La Russie a ratifié la Convention européenne des droits de l’homme en 1998. Après l’invasion de l’Ukraine, la Russie a été exclue du Conseil de l’Europe, le club des signataires du traité, en 2022.

Depuis le 16 septembre 2022, les autorités russes ne sont donc plus obligées de faire respecter les droits inscrits dans le traité. Néanmoins, Moscou reste responsable des violations du Traité commises entre 1998 et 2022.



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