La plupart des Belges sont toujours bloqués à Gaza : « A terme, l’évacuation ne sera plus nécessaire »


Une vingtaine de Belges de Gaza sont désormais rentrés dans notre pays. Les 158 autres demandeurs qui se sont présentés aux autorités belges pour évacuation sont toujours en détention. Maintenant que la frontière est temporairement fermée, leur sort est à nouveau incertain.

Ans Boersma

Une vingtaine de Belges sont arrivés samedi soir à la base aérienne d’Eindhoven. Ils prenaient un vol en provenance d’Égypte avec des Néerlandais évacués. L’un d’eux était Ahmed, un Belge palestinien qui se trouvait à Gaza avec sa famille, a-t-il déclaré lors d’une conversation avec de Volkskrant. Mercredi soir, il a appris qu’il figurait sur la liste des étrangers autorisés à partir jeudi. Il a désormais retrouvé sa femme et ses enfants en Belgique, mais a dû laisser derrière lui sa mère, ses frères et sœurs.

Lui et les dix-neuf autres personnes ont été transférés en bus à l’hôpital militaire de Neder-over-Heembeek et accueillis par des volontaires de la Croix-Rouge flamande. La ministre des Affaires étrangères Hadja Lahbib (MR) était également présente.

Les bénévoles ont enregistré autant d’informations que possible afin d’assurer le suivi. Des besoins psychosociaux, médicaux, matériels et financiers ont été identifiés, précise Walter Wybauw, qui a coordonné le rapatriement des Belges de Gaza pour la Croix-Rouge à Neder-over-Heembeek. « Il est clair qu’il existe un grand besoin d’accompagnement psychologique. Vous entendez une histoire d’horreur après l’autre. Ce qui m’a également frappé, ce sont les dommages auditifs que les gens ont subis à cause des explosions.»

Les conversations étaient courtes, dit-il. « Ces gens sont sur la route depuis des jours et sont arrivés les bras chargés d’enfants et de bagages. Ils ont vu et entendu beaucoup de choses ce mois-ci. Ils étaient cassés. Ils voulaient surtout s’endormir rapidement. L’ambiance à l’hôpital militaire était calme samedi. Tout s’est bien passé, selon Wybauw. « Mais il y avait aussi de l’indignation, de la colère et un sentiment d’impuissance. Des émotions humaines très compréhensibles dans cette situation.

Fermé hermétiquement

Les Belges arrivés ne représentent qu’une fraction des Belges qui doivent encore être évacués. Au total, 178 personnes se sont présentées jusqu’à présent aux autorités belges (84 Belges et 94 personnes ayant droit à l’évacuation).

Les postes frontières de Gaza ont été hermétiquement fermés ces dernières semaines. Cela a changé mercredi : un accord a été conclu entre l’Égypte, Israël et le Hamas, et les premières personnes possédant un passeport étranger ont pu quitter la bande de Gaza via le poste frontière de Rafah avec l’Égypte. L’un d’eux était Matthias Kennes, employé de Médecins sans frontières.

La liste a été publiée en ligne quatre jours de suite, contenant les noms complets, la nationalité et les numéros de passeport des personnes pouvant se présenter au poste frontière. Les autorités qui gèrent la frontière déterminent qui figure sur cette liste. Cela concerne principalement les familles avec enfants et les personnes de nationalité américaine ou britannique.

Seuls des Belges figuraient sur la liste jeudi : 50 au total, dont 29 enfants. Une trentaine d’entre eux n’ont pas encore pu s’enfuir. L’une d’elles est la poète et journaliste belgo-palestinienne Fatena Al-Ghorra, qui se trouve à Gaza. Être autorisé à traverser la frontière est une chose, mais atteindre ce poste frontière n’est pas facile : l’itinéraire est tout sauf sûr. Il n’y a aucune aide des autorités belges à Gaza même.

La journaliste Fatena Al-Ghorra est à Gaza avec ses parents âgés.Image VR

Le poste frontière a de nouveau fermé samedi. La raison en est l’attaque israélienne contre une ambulance, selon des sources de sécurité égyptiennes. Tant que le passage en toute sécurité des patients blessés n’est pas garanti, personne d’autre ne sera autorisé à traverser la frontière, a déclaré le Hamas.

Silence radio

Pendant ce temps, les Palestiniens détenteurs de passeports étrangers et qui ne figurent pas encore sur la liste tentent fébrilement de clarifier leur statut. Ils sont soutenus par des familles et des amis concernés à l’étranger.

Fatma, qui a fui vers la Belgique en 2016, en fait partie. Elle tente depuis des semaines d’avoir des éclaircissements sur le sort de son frère Yahya et de leurs parents. Son frère vit à Bruxelles et a la nationalité belge, ses parents ont le droit de séjour aux Emirats Arabes Unis. Fatma tente de les inscrire sur la liste d’évacuation pour des raisons humanitaires : ils sont âgés et dépendants de médicaments qui s’épuisent petit à petit.

Son frère s’est rendu à Gaza pour une visite familiale début octobre. Lorsque les bombardements israéliens ont commencé, Yahya a immédiatement contacté les services consulaires belges et s’est rendu à plusieurs reprises à la frontière égyptienne pour voir si lui et sa famille pouvaient repartir. Sans résultat. La famille de Fatma vit à Khan Younis, au sud de la bande de Gaza. Il y a aussi des bombardements aléatoires là-bas, dit le Palestinien. Un autre hier à côté de la maison de sa tante, dans lequel sa nièce a été blessée.

Fatma appelle et envoie des emails tous les jours au consulat de Belgique à Jérusalem et à l’ambassade de Belgique au Caire. Mais les lignes d’urgence sont inaccessibles, dit-elle. « Un groupe WhatsApp a été créé par les autorités belges pour les Belges à Gaza, mais personne ne répond. » Vendredi soir, elle a reçu un message de l’ambassade de Belgique au Caire l’informant qu’on essayait de faire partir son frère. Mais tant que son nom n’apparaît pas sur la liste au poste frontière, il ne peut pas repartir.

Selon elle, il existe encore une chance de faire sortir les Belges vivants de Gaza. « La Belgique doit accroître la pression sur les autorités égyptiennes. À long terme, l’évacuation ne sera plus nécessaire.» Le SPF Affaires étrangères affirme « poursuivre les efforts pour que les Belges puissent quitter Gaza le plus rapidement possible ».



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