«La maîtrise de"faux anglais" (écrit en italien) est devenu incontournable en Italie pour suivre l’actualité. » Le journal londonien raconte notre amour pour une langue que nous connaissons très peu et ses conséquences. Le résultat est un Fake English, qui fait sourire (un peu trop). Sommes-nous tous les enfants de Celentano ?


LLa maîtrise du faux anglais est devenue indispensable, en Italie, pour suivre l’actualité. Amy Kazmin, correspondante à Rome du Financial Times, raconte l’histoire: entre le sérieux et le facétieux, son article suscite le rire mais aussi un peu de honte. Bref, ils nous ont rattrapés : ils ont soudain compris que notre italien est une langue pleine d’anglais « fantaisies » (écrits en italien !). Et le résultat, pour ceux qui ont grandi dans la City, comme le Financial Times, sonne purement charabia. Ce qu’on appelle en Italie Grammelot.

Les Italiens maîtrisent le « faux anglais », écrit le Financial Times

La journaliste évoque sa première rencontre avec la vidéo d’Adriano Celentano chantant PrisencolinensinainciusolIl a chanté. Un torrent verbal absurde mais aux consonances américaines. «Je pense souvent à Celentano en observant l’utilisation répandue par les Italiens d’un vocabulaire qui n’est pas sans rappeler le Prisencolinensinainciusol». Et c’est « Des mots anglais employés de manière exubérante qui n’ont souvent que peu ou pas de sens immédiat pour moi. »

Les exemples ne manquent pas. A partir de auto-bar dans les gares, c’est-à-dire des distributeurs automatiques de boissons et de snacks. En anglais « distributeurs automatiques vendant des boissons et des collations ». « Vous ne les avez pas vus ? », nous raille le journaliste. « C’est peut-être parce que tu as pris le entraîneur – « bus interurbain », en anglais. Ou as-tu fait leauto-stop, « auto-stop ». « Peut-être », poursuit le moqueur, « tu étais occupé avec un levage: pas un entraînement (en anglais to lift, c’est soulever) mais un facelift (mot anglais pour notre facelift) ».

Amoureux de l’anglais mais sans y connaître grand chose

L’engouement des Italiens pour l’anglais, rappelle le Financial Times, a commencé Pendant la Seconde Guerre mondiale, lorsque les troupes américaines ont libéré le pays du fascisme. À l’époque, les écoles se concentraient sur les langues classiques comme le latin et le grec ancien, et peu de ces générations développaient une connaissance approfondie de l’anglais.

Pourtant l’anglais et les englishismes ont une connotation positive, ceux qui les utilisent ont l’impression de « parler moderne ». D’où l’adoption de termes anglais même par des locuteurs qui ne savent pas parler anglais.

« L’anglais véhicule la modernité, la fraîcheur, le progrès technologique et, dans un certain sens, le statut », explique le linguiste, cité par le FT. Licia Corbolante.

Se tenir au courant de l’actualité nécessite donc une bonne connaissance du faux anglais. L’accent est actuellement mis sur point chaud, ou des centres d’accueil pour migrants irréguliers («reception centres for irreguliers migrants», en anglais). La communauté LGBT se révolte contre adoption d’un beau-filsn, le processus italien compliqué permettant aux couples homosexuels d’établir des droits parentaux partagés. Les employeurs italiens attendent chaque année Jour du clic obtenir des permis pour embaucher des travailleurs étrangers.

Politiciens contre l’anglomanie. Et encore…

Certains membres de Fratelli d’Italia voudraient, il est vrai, interdire l’anglais dans toute communication publique (Le député Fabio Rampelli a demandé des amendes pouvant aller jusqu’à 100 000 euros pour les fonctionnaires de l’administration publique qui utilisent des anglicismes excessifs). Mais le faux anglais ne semble pas être affecté. Après la victoire électorale de l’année dernière, Giorgia Meloni elle-même s’est définie comme uneoutsider», et les pages des journaux ont été remplies d’explications sur ce que cela signifie.

Il y en a pour tous les goûts et tous les secteurs, du confinement au propagé. D’autres exemples ? Pendant le Covid, les Italiens l’ont adopté travail intelligent – le « travail à domicile », ou travail agile, que les Italiens Italianisent au point de dire «aujourd’hui je travaille intelligemment ».

Le jargon des jeunes est traditionnellement plein d’hybrides. Ccomme le boomerang (quelque chose que font les baby-boomers). Également à la mode est grincer des dentsItalianisé comme cringiata, quelque chose de dérangeant ou d’embarrassant.

Les puristes anglais (ainsi que les Italiens qui connaissent l’anglais) auront probablement de l’urticaire. Mais Corbolante apaise les âmes : c’est le dynamisme linguistique, la beauté. Parce que «l’italien est une langue vitale», déclare-t-il au Financial Times. «Nous prenons des composants étrangers et les adaptons à nos besoins». D’accord. Tout va bien. Regarde comment il a chanté, Celentano.

iO Donna © TOUS DROITS RÉSERVÉS





ttn-fr-13