La KU Leuven en proie à un énième scandale : mauvaise communication, ou y a-t-il plus ?

Nouveau scandale à la KU Leuven. À cela s’ajoute une autre réponse tardive et cool de l’université, des services qui se cachent derrière des procédures et un agresseur qui a pu continuer son chemin malgré les signalements de son comportement. Dans quelle mesure cela nuit-il à la KU Leuven et au recteur Luc Sels ?

Dimitri Thijskens26 octobre 202220:20

Rien n’indique que la KU Leuven ait tenté d’étouffer l’affaire contre le professeur FD, qui a violé une étudiante en juillet 2016 lors d’un voyage à un congrès à Barcelone. C’est la conclusion du commissaire du gouvernement qui a été nommé par le gouvernement flamand. Il souligne « que la protection de la victime était un fil conducteur dans ce dossier. La victime voulait éviter l’attention des médias et l’université a fait tout ce qu’elle pouvait et était autorisée à faire selon la victime.

Un coup de pouce pour la KU Leuven, pourrait-on penser. Mais cela n’a pas semblé être le cas lors de la discussion animée qui s’est tenue ensuite en session plénière du Parlement flamand. La raison en était les propos de la ministre de la Justice Zuhal Demir (N-VA) : elle a menacé dimanche d’annuler une subvention de 1,4 million d’euros pour la célébration du 600e anniversaire de la KU Leuven.

Gwendolyn Rutten (Open Vld) a voulu savoir sur quelle base cette décision avait été prise. « Ce que la Flandre ne mérite pas, c’est un ministre qui dit comme un empereur romain : ‘Un instant je pense que c’est possible et l’instant d’après je pense que ce n’est pas possible.' » Sam van Rooy (Vlaams Belang) a ensuite ajouté : « On entend vous avez fait un autre soi-disant ‘Zuhalleke’. Bénéficiez-vous du soutien du reste du gouvernement ? »

Demir n’a pas pris ça. « Nous avons un problème dans notre société. Si faire un ‘Zuhalleke’ signifie que vous ne haussez pas les épaules et décidez cyniquement que ce n’est pas votre problème quand vous voyez une injustice flagrante, alors je suis fier que ça s’appelle comme ça.

Réponse froide et mesurée

Il illustre parfaitement le clivage avec lequel la KU Leuven se débat également, le clivage entre le juridique et l’émotionnel. Car ce n’est pas la première fois que l’institut et le recteur Luc Sels sont discrédités. En février, il y avait déjà le professeur JP, qui a ensuite été expulsé pour comportement transgressif : pendant des années, il a bombardé ses collègues d’e-mails pleins de pornographie, d’islamophobie et d’homophobie. Lors d’un voyage à Rome, il aurait enlevé son alliance parmi les étudiants et aurait crié : « Est-ce qu’on se fait encore baiser ici ce soir ? » Et il y avait Sanda Dia, l’étudiant de 20 ans décédé en 2018 à la suite des violences physiques qu’il a subies lors du baptême de 30 heures au club étudiant Reuzegom.

Trois choses à première vue complètement différentes, mais le résultat sonne toujours le même : une réponse cool, tardive et mesurée de la KU Leuven. Beaucoup reprochent à l’université de n’avoir aucune empathie pour les victimes et de se cacher derrière la lourdeur des procédures. Que Sels a indiqué dans son discours d’ouverture l’année scolaire dernière qu’il avait des difficultés avec « la faction extrême du mouvement éveillé, qui devient de plus en plus dominante. Et cela devient militant voire intolérant, et s’accompagne d’une teinte de pureté morale », ne fait que renforcer cette image.

Le toxicologue Jan Tytgat, qui était toujours le challenger de Sels lors des élections du recteur en mai de l’année dernière, attribue en partie bon nombre de ces problèmes au comportement machiste du monde universitaire. « C’est un environnement très difficile avec une concurrence rude, où il faut souvent aller très loin pour performer et subventions apporter. Cela conduit parfois à des comportements qui vont beaucoup trop loin, même s’il ne faut pas généraliser. D’où mon plaidoyer pour un financement de base, qui réduit la pression concurrentielle et donne à l’université un visage plus humain.

Point de rapport central

Dans tous les cas de comportement transgressif, il est clair que la barrière pour que les victimes portent plainte est extrêmement élevée. Les raisons sont évidentes : le rapport de force, le rapport de dépendance et la peur qu’on ne les croie pas faute de preuves. Ce sont également ces raisons qui ont été citées par les étudiants qui ont tiré la première fois la sonnette d’alarme en 2010 dans l’affaire FD avec le médiateur de la KU Leuven. Qui pourrait alors faire un peu plus que taper FD sur les doigts.

« Pour réduire cet obstacle, la mise en place d’un point central de rapport pour toutes les universités pourrait être une bonne solution », déclare Tytgat. « Et cela est mieux fait sans que les universités elles-mêmes soient impliquées : vous ne pouvez pas être juge et partie en même temps. Je soutiendrais cela. Une telle hotline peut être mise en place très rapidement, afin que toute victime puisse raconter son histoire sans risque de représailles.

La KU Leuven elle-même annonce déjà un certain nombre d’actions. Par exemple, de nouveaux règlements disciplinaires sont en cours d’élaboration et devraient être prêts d’ici la fin de cette année, la politique actuelle est en cours d’évaluation et une formation est dispensée. Mais que les choses peu recommandables donnent à l’université une mauvaise réputation, c’est certain. « Je ne peux pas nier que ce sont des temps sombres pour notre université », conclut Tytgat. « Et j’imagine que beaucoup pensent que ça va trop loin maintenant et qu’il faut en rattacher les conséquences au recteur. Mais je ne veux certainement pas aller aussi loin. Je ne connais pas assez le dossier pour ça. »



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