La France nouvelle : « En quelques semaines, nous sommes passés d’une époque à l’autre »


Le 24 avril, Emmanuel Macron remporte l’élection présidentielle française. Il est devenu le premier président français en vingt ans à être réélu. Pourtant, la victoire de Macron était moins belle qu’on ne le pense au premier coup d’œil. L’écart entre Macron et sa rivale d’extrême droite Marine Le Pen s’était considérablement réduit en cinq ans. De plus, beaucoup plus de Français mécontents sont restés à l’écart des urnes.

Les chercheurs ont calculé qu’en fin de compte, seuls 38,5 % des 48 millions d’électeurs français éligibles ont voté pour Macron. Donc une minorité. Cela a tenté le candidat d’extrême gauche Jean-Luc Mélenchon de qualifier Macron de président français « le plus faible élu » depuis Georges Pompidou en 1969.

Huit semaines plus tard, la position de Macron ne semble pas s’être améliorée. Il a perdu sa majorité au parlement. Sa coalition de parti Ensemble a atteint 245 sièges, bien loin des 289 sièges nécessaires pour une majorité absolue au parlement français. Macron devra donc tenir compte des autres partis dans les années à venir pour pouvoir réaliser sa politique intérieure.

Que signifie ce résultat électoral pour l’efficacité du président et la stabilité de la France ?

Rudi Wester a étudié la langue et la littérature françaises, a été critique de littérature française pendant de nombreuses années et directeur de l’Institut Néerlandais à Paris. Emmanuel Macron a dû très mal dormir dimanche soir. les raisons? Le taux de participation historiquement bas pour un nouveau parlement (46 %) signifie une grande méfiance à l’égard de la politique. De plus, il est sa majorité absolue à l’Assemblée nationale de sorte qu’il ne peut plus régner comme un Jupiter seul.

Pour aggraver les choses, la coalition d’extrême gauche Nupes de Jean-Luc Mélenchon et le parti d’extrême droite de Marine Le Pen ont fait des gains significatifs au parlement. Tous deux sont favorables à la sortie de l’OTAN et de l’Union européenne, ce qui est exactement ce que ne veut pas le Macron opérant à l’international. Un certain nombre de ministres nouvellement nommés ont également été rejetés, obligeant Macron à faire un grand ménage au sein du gouvernement.

« Bref, le désordre et le chaos augmenteront dans les rues comme au parlement. Il restera encore longtemps en suspens dans ma France bien-aimée.

Niek Pas est professeur adjoint d’histoire contemporaine française à l’Université d’Amsterdam et a écrit sur Macron et la nouvelle révolution française. « Avec la perte de la majorité absolue de Macron au parlement, la France va virer à droite. La coalition de gauche en carton de Mélenchon a fait trop peu de gains territoriaux. Avec autant de perdants, il n’y a qu’un (surprenant) vainqueur : le Rassemblement National de Marine Le Pen. La nomination de dizaines de nouveaux parlementaires de gauche radicale et d’extrême droite n’est qu’un gain démocratique optique.

« Le terme ‘compromis’ n’existe pas dans le dictionnaire de la culture politique française. Cependant, le gouvernement devra faire des compromis. Les majorités parlementaires ne sont possibles que par le biais du centre droit (Les Républicains). Le soutien républicain a un prix politique élevé.

« D’autres solutions sont envisageables. Macron peut gouverner par décret : l’illustre article français 49.3. D’un point de vue politique, cette option nucléaire est très efficace, mais politiquement indésirable. Il est plus probable que le président laisse les choses s’enliser et convoque ensuite de nouvelles élections législatives dans environ un ou deux ans.

Marine Le Pen du parti d’extrême droite Rassemblement National s’adresse à la presse française. Le parti de Le Pen a réalisé le gain de sièges le plus important, passant de 8 à 89 sièges.Point d’accès d’image

Laurent Chambon est un politologue français qui étudie les minorités en politique aux Pays-Bas et en France. «Emmanuel Macron est le plus détesté de tous les présidents français, mais le système électoral français est juste en deçà de la majorité des sièges au parlement français. Assemblée nationale Préoccupé.

« Il y a deux mois, il a été élu pour la deuxième fois. Egalement en masse par les électeurs de gauche, qui s’étaient mobilisés contre Marine Le Pen comme un soi-disant barrage républicain (barrage républicain). Mais dans ces élections législatives, les macronistes des circonscriptions où trois candidats ont obtenu plus de 20 % au premier tour et se sont donc qualifiés pour le second tour, ont choisi de rester dans la course. Sachant qu’ils assureraient une grande victoire à l’extrême droite. Le Pen a en effet remporté 89 sièges, soit 11 fois plus que ce qu’elle a remporté aux élections législatives de 2017.

« L’anthropologue Emmanuel Todd, qui peut parfois être brutal dans l’articulation de la situation, a dit que les classes inférieures devaient clairement choisir entre leurs intérêts de classe (leur retraite et l’avenir de leurs enfants) et leur haine des Arabes. Tant de Français détestent les Arabes plus qu’ils n’aiment leurs enfants.

« Avec La République En Marche ! (Macron, droite), Les Républicains (extrême droite) et Rassemblement National (Le Pen, extrême droite) il y a désormais une immense majorité qui est très active contre les classes moyennes et populaires et va lutter contre les migrants et l’environnement. C’est une très mauvaise nouvelle pour la France, pour l’Europe et pour le monde.

Frederik Dhondt est maître de conférences en histoire du droit à la Vrije Universiteit Brussel et expert français. « Ce résultat électoral est une grande déception pour le président. La République en marche de Macron ! ne va certainement pas bien : au début, il semblait que le jeu serait divisé par deux. Les partenaires de la coalition MoDem et Horizons exigeront certainement une plus grande part du gâteau. Sans parler des négociations avec les Républicains de centre-droit et les éventuels dissidents de gauche.

« Il y a un écart de 40 à 50 sièges pour une majorité au parlement. Bien sûr, Macron peut Assemblage ingouvernable les renvoyer chez eux si aucun accord n’est trouvé, mais c’est un gros risque. Les électeurs savent que le président sera parti d’ici 2027 de toute façon. En quelques semaines, nous avons changé d’époque en dormant.



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