La diaspora européenne joue le jeu


Le meilleur attaquant de Stuttgart, Serhou Yadaly Guirassy, ​​est né à Arles. Il a été plusieurs fois joueur de l’équipe de France juniors et porte aujourd’hui le maillot national de Guinée. (IMAGO / Newscom Monde / IMAGO / Kim Price)

La ville portuaire de Marseille, dans le sud de la France, a été façonnée pendant des siècles par l’immigration en provenance d’Afrique du Nord. Cela se voit au Stade Vélodrome, dans le stade du club de football de l’Olympique de Marseille. Lors des matchs à domicile, des dizaines de supporters portent les maillots nationaux d’Algérie, de Tunisie ou du Sénégal, pays où ont grandi leurs ancêtres.

Certains supporters brandissent des drapeaux de pays africains, rapporte le journaliste canado-algérien Maher Mezahi. Il a vécu à Marseille et s’implique depuis des années dans le football en Afrique du Nord : « Le club de Marseille met à l’honneur la diversité de la ville et organise régulièrement une ‘Journée de l’Afrique’. Ensuite, il y a les événements qui célèbrent le continent africain, avec par exemple d’anciens joueurs méritants. L’Olympique sort également des maillots africains et présente des chorégraphies avec le drapeau algérien.

Un portrait du journaliste canado-algérien Maher Mezahi.  Il est situé dans le stade de l'Olympique de Marseille, le Stade Vélodrome.

Le journaliste canado-algérien Maher Mezahi s’intéresse depuis longtemps au football en Afrique. (Deutschlandradio / Ronny Blaschke)

Des chercheurs de talents parcourent l’Europe

La Coupe d’Afrique des Nations se déroule actuellement en Côte d’Ivoire. A Marseille, des centaines de personnes se rassemblent à nouveau dans les bars, restaurants et clubs-houses pour regarder ensemble les matchs. Il apparaît alors clairement que ce tournoi est aussi une célébration de la diaspora. Pour les supporters – et pour les joueurs : 24 nations participent à la Coupe d’Afrique, avec un total de 630 joueurs. 200 de ces joueurs, soit près d’un tiers, ne sont pas nés dans le pays pour lequel ils concourent désormais. C’est ce que rapporte le journal sud-africain « The Citizen ».

Le professionnel du football Amine Gouiri du club français du Stade rennais porte le ballon lors du match contre l'Olympique de Marseille

Amine Gouiri, né en France et qui joue pour le club français du Stade rennais, jouera pour l’Algérie à la Coupe d’Afrique des Nations. (IMAGO / PanoramiC / IMAGO / Valentina Claret)

Lors de la Coupe d’Afrique des Nations 2019, il y avait moins de joueurs ayant grandi à l’étranger : 129. Les associations africaines de football ont apparemment élargi leur système de sélection, explique le journaliste Maher Mezahi : « L’association marocaine est bien organisée et emploie six ou sept recruteurs de talents dans Europe : deux en France, un en Espagne, un en Belgique et un aux Pays-Bas. Leur objectif principal est de sélectionner et de recruter de jeunes joueurs. L’Algérie travaille depuis longtemps avec des agents de joueurs qui disposent de bons réseaux en France. L’objectif est de renforcer les équipes nationales de jeunes en Afrique.

Heures de couvre-feu pour les matchs importants

Sur les 200 joueurs de la diaspora actuellement actifs dans les équipes nationales africaines, plus de la moitié sont nés en France : 104. L’Espagne est loin derrière, où ont grandi 24 participants à la Coupe d’Afrique. Viennent ensuite l’Angleterre, les Pays-Bas et le Portugal. La présence de la diaspora à la Coupe d’Afrique des nations met en lumière les liens entre les anciennes puissances coloniales et leurs colonies, estime le journaliste Maher Mezahi, qui consacre un podcast au football africain. Sur les 27 joueurs de l’équipe nationale marocaine, 18 ont grandi à l’étranger. Dans la sélection algérienne, 14 sont issus de la diaspora, en grande majorité française.

«En France, la jeune génération d’origine algérienne puise dans les deux pans de son identité», explique Mezahi. «Mais de nombreux politiciens de droite leur rendent la tâche difficile. Lorsque l’Algérie disputera des matchs cruciaux de la Coupe d’Afrique des Nations, des couvre-feux seront imposés dans certaines villes françaises. L’objectif est d’empêcher les supporters franco-algériens de faire la fête dans les rues ou de former des cortèges.»

La « banlieue » façonne la perception

Pendant plus de 130 ans, l’Algérie était sous contrôle français. Même après le colonialisme, des centaines de milliers de personnes originaires d’Afrique du Nord ont immigré en France. A cette époque, ils travaillaient dans les zones industrielles et soutenaient le boom économique. De nombreux travailleurs doivent encore se contenter des bidonvilles des banlieues, appelés banlieues. Aujourd’hui encore, ces quartiers façonnent la perception de nombreux Français en matière d’immigration, d’identité et de sécurité.

« Pendant longtemps, la société a eu l’idée que la France serait au centre du monde », explique Constance Rivière, qui dirige le Musée de l’Histoire de l’immigration à Paris. « C’est un sujet relativement nouveau que de poser un regard critique sur le colonialisme. Mais nous devons faire face à ce passé. Rares sont les sujets qui suscitent autant de controverses et de polémiques en France que la migration. Nous souhaitons fournir une information sobre afin que nos visiteurs puissent se faire une opinion éclairée. Et le sport peut y contribuer.

Exposition spéciale pour les Jeux olympiques

Le Musée des Migrations est installé au Palais de la Porte Dorée, au sud-est de la capitale. L’Exposition coloniale de Paris a eu lieu dans cet impressionnant bâtiment en 1931, une romantisation de l’exploitation et du racisme à l’époque. Près de cent ans plus tard, la nouvelle exposition permanente pose désormais un regard différencié sur l’histoire migratoire de la France. Également sur les liens du football avec l’Afrique. Et une exposition spéciale ouvrira prochainement pour les Jeux Olympiques de Paris cet été. Sur l’importance de la migration, qui va bien au-delà du sport.



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