La demande d’extradition dans l’affaire Lassoued est restée non seulement au placard, mais aussi sous forme numérique. Verlinden tient la police à l’abri du vent


La demande d’extradition de la Tunisie concernant Abdesalem Lassoued est non seulement restée physiquement dans le placard, mais l’enregistrement numérique auprès du parquet n’a pas non plus déclenché de sonnette d’alarme. C’est ce qui ressort mercredi des explications du ministre de la Justice Paul Van Tigchelt (Open Vld) au Parlement. La ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden (CD&V) a indiqué lors de la commission parlementaire qu’elle conservait « une pleine confiance dans la police et dans l’OCAD (organisme d’analyse des menaces) ». Une chronologie fournie par Verlinden devrait montrer que la police a partagé les informations nécessaires avec la justice sur l’homme et a contacté la Tunisie à plusieurs reprises pour plus d’informations.

Verlinden a été interrogé mercredi après-midi par la commission parlementaire mixte de l’Intérieur et de la Justice au sujet de l’attentat perpétré à Bruxelles lundi dernier. Après la démission du ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne à la fin de la semaine dernière parce qu’une demande d’extradition de l’auteur tunisien de l’attentat était restée en instance au parquet de Bruxelles, le fonctionnement de la police et donc de Verlinden a également été mis en lumière. Différents services de police ont eu affaire à Abdesalem Lassoued à plusieurs reprises ces dernières années, comme cela a été révélé au Parlement la semaine dernière.

« Notice rouge »

À partir du calendrier que Verlinden a présenté au Parlement mercredi, elle a conclu que la soi-disant « notice rouge » distribuée par Interpol à la demande de la Tunisie et l’éventuelle demande d’extradition n’ont été faites qu’après que la police belge ait demandé de manière proactive à la Tunisie elle-même information.

Chronologie fournie par la ministre Annelies Verlinden lors du comité de la Chambre. © RV

De plus, la notice rouge – une sorte de demande internationale d’arrestation – ne contenait que des informations sur une évasion de prison du Tunisien, ce qui n’est pas punissable en Belgique. « Ce n’est que vendredi que l’agresseur nous a confirmé pour la première fois qu’il s’agissait d’infractions pénales. »

Transféré

Elle a admis que la demande d’extradition avait non seulement été soumise au ministère de la Justice en août 2022, mais également à la police fédérale une semaine plus tard. Mais la police fédérale l’a reçu via Interpol le 22 août à 12h45 et l’a transmis au Service public fédéral Justice, chargé des demandes d’extradition, à 13h01, a-t-elle précisé. Un accusé de réception a également été reçu 39 minutes plus tard. La Direction de la coopération policière internationale (CGI) a également remis le même jour la notice rouge au parquet de Bruxelles, a précisé Verlinden.


On ne peut pas conclure à l’heure actuelle que la négligence de la police aurait conduit à l’arrestation tardive de l’agresseur.

La ministre conserve donc « pleine confiance dans la police et dans l’OCAD », a-t-elle déclaré, même si elle s’exprime avec quelques réserves car l’information judiciaire est toujours en cours et donc « il reste encore des questions sans réponse ». « On ne peut pas conclure à l’heure actuelle que la négligence de la police aurait conduit à l’arrestation tardive de l’auteur. »

« Rien à voir avec le manque de personnel, c’est une erreur »

Volgens de kersverse minister van Justitie Paul Van Tigchelt (Open Vld), die ook in de Kamercommissie werd ondervraagd over de aanslag, is het feit dat het uitleveringsverzoek voor de Tunesische terrorist bleef liggen op het Brusselse parket niet het gevolg van een tekort aan mensen en ressources. « Cela n’a rien à voir avec un manque de personnel, c’est une erreur », a-t-il souligné.

REGARDER. Van Tigchelt : « L’erreur ne peut pas être attribuée à un manque de ressources »

« 31 demandes d’extradition ont été transférées au service de coopération internationale du parquet de Bruxelles, 30 ont été traitées », a-t-il précisé. « Je ne suis pas d’accord avec l’affirmation selon laquelle tout ce qui ne va pas est le résultat d’un manque de personnes et de ressources, bien au contraire. » Par ailleurs, le parquet de Bruxelles a déjà reçu 3,1 millions d’euros d’investissements au cours des deux dernières années et emploie plus d’une cinquantaine de procureurs, a précisé le ministre.

Il est vrai que sur les 119 procureurs, seuls 95 sièges ont été pourvus en raison d’un exode ces dernières années, selon Van Tigchelt, et que 13 autres sont absents pour cause de maladie. Mais même dans ce cas, « vous et un ministre pouvez attendre d’un ministère public que la politique pénale soit menée de manière dynamique et créative », a-t-il conclu.

Pas seulement disparu dans le placard

La demande d’extradition de la Tunisie concernant Abdesalem Lassoued est non seulement restée physiquement dans le placard, mais l’enregistrement numérique auprès du parquet n’a pas non plus déclenché de sonnette d’alarme, comme le montre l’explication de Van Tigchelt.


Les systèmes de contrôle n’ont ensuite pas fonctionné, telle est la douloureuse vérité.

Le fichier a également été enregistré numériquement. Le parquet de Bruxelles a reçu la demande d’extradition le 8 septembre 2022 et l’a enregistrée un jour plus tard dans MaCH, le système de gestion des fichiers numériques de la Justice. Un dossier a également été créé à cette époque. Cependant, aucun feu clignotant ne s’est allumé là non plus.

La secrétaire d'État à l'asile et à la migration Nicole de Moor, le ministre de la Justice Paul Van Tigchelt et la ministre de l'Intérieur Annelies Verlinden lors de la commission parlementaire.
La secrétaire d’État à l’asile et à la migration Nicole de Moor, le ministre de la Justice Paul Van Tigchelt et la ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden lors de la commission parlementaire. © BELGA

Par la suite, le 12 septembre, un employé du service de coopération internationale du parquet de Bruxelles a écrit deux autres questions sur un post-it, adressées au magistrat qui allait traiter le dossier : « quelles qualifications ? et « police judiciaire fédérale ou police locale ? », dit-il en français. Il n’y a pas de réponse écrite à ce sujet, et ni le magistrat ni le personnel administratif ne se souviennent d’échanges à ce sujet.

REGARDER. Verlinden conserve toute sa confiance dans la police

« Le fait est qu’aucun traitement ultérieur n’a jamais eu lieu », a conclu Van Tigchelt. « Le dossier est resté dans un placard et y a depuis été retrouvé. Aucune trace n’a été retrouvée indiquant qu’elle était effectivement passée par le bureau du magistrat concerné. Les systèmes de contrôle n’ont ensuite pas fonctionné, c’est la triste vérité.»

« Erreur politique »

Pourtant, l’opposition a encore des questions. Selon Koen Metsu (N-VA), il y a « au moins de la négligence ». « Si nous avions tout répertorié, cela aurait pu et dû être évité. » Son collègue du parti Kristien Van Vaerenbergh a déclaré qu’en plus d’une erreur du magistrat, il y avait aussi une erreur politique, car des promesses telles que la numérisation de la justice mettaient beaucoup trop de temps à se concrétiser.

Mais les nationalistes flamands ne demandent pas la démission de Verlinden. Le Vlaams Belang d’extrême droite l’a fait par l’intermédiaire d’Ortwin Depoortere. Après tout, la demande d’extradition de Lassoued n’a pas seulement été soumise au pouvoir judiciaire mais aussi à la police, voilà le raisonnement. « Il a été dit à plusieurs reprises que l’agresseur était resté sous la ligne de flottaison. C’était l’essentiel ici la semaine dernière. Cela semble désormais grotesquement faux », a-t-il déclaré.

Sofie Merckx (PVDA) a également souligné que l’histoire de la semaine dernière « s’est accompagnée d’embûches ». Elle a notamment accusé Verlinden de ne pas avoir parlé de la « notice rouge » à l’époque. Selon Verlinden, la police ne pouvait prendre aucune mesure sur cette base, car il s’agissait simplement d’une évasion de prison, ce qui n’est pas un délit punissable dans notre pays. Mais Merckx a souligné que la notice rouge mentionne également la violence (« agression avec violences », ndlr). « N’est-ce pas un délit criminel dans notre pays ? » s’est-elle demandée.

Merckx souligne enfin que le parquet de Bruxelles manque de personnel. « Ce qui s’est produit lundi dernier est le résultat d’années de coupes budgétaires », a-t-elle conclu.

« Plus d’excuses »

Au sein de la majorité, Vooruit et Groen se sont montrés particulièrement critiques. « Il (Lassoued, ndlr) aurait pu et dû être sur les radars et aurait dû être derrière les barreaux en Tunisie depuis longtemps », a déclaré le député du Vooruit Ben Segers. La sécurisation des carrefours, réclamée depuis des années et promise par le gouvernement le week-end dernier, doit désormais être mise en œuvre rapidement, a-t-il déclaré. « Il est douloureux de devoir déterminer à nouveau cela en cas de nouvelle attaque (..). Il n’y a plus d’excuse pour ne pas démarrer cette base de données. »

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La secrétaire d'État à l'Asile et à la Migration Nicole de Moor, le ministre de la Justice Paul Van Tigchelt et la ministre de l'Intérieur Annelies Verlinden lors de la commission parlementaire de mercredi.
La secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration Nicole de Moor, le ministre de la Justice Paul Van Tigchelt et la ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden lors de la commission parlementaire de mercredi. © Photo Actualités



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