La Cour internationale de Justice rend son premier jugement dans l’affaire de génocide sud-africaine contre Israël

L’Afrique du Sud estime qu’Israël commet un génocide à Gaza. Il exige un cessez-le-feu devant la Cour internationale de Justice de La Haye. Aujourd’hui, le tribunal rend une décision provisoire dans cette affaire qui a débuté il y a deux semaines.

Rob Vreeken

1. Que peut décider la Cour internationale de Justice ?

Le tribunal peut décider de ne pas entendre l’affaire, par exemple parce qu’il n’est « pas plausible » qu’Israël ait violé la Convention sur le génocide. Ce serait un succès retentissant pour Israël.

Le tribunal peut également décider de prendre des « mesures provisoires » pour éviter que la situation ne s’aggrave pendant que l’affaire est devant les tribunaux. Par une telle décision, le tribunal indique également qu’il a compétence « prima facie ».

Dans ce cas, Israël a la possibilité de contester la compétence du tribunal. Si cela échoue, le traitement de fond peut alors réellement commencer. Les juges doivent alors déterminer si Israël a violé la convention sur le génocide. Autrement dit, a-t-il commis un génocide à Gaza ou n’a-t-il pas fait assez pour empêcher un éventuel génocide ? Une telle procédure peut prendre trois ou quatre ans.

2. Quelles mesures le tribunal peut-il imposer ?

L’Afrique du Sud a demandé neuf mesures provisoires. Le plus ambitieux est qu’Israël suspende tous les combats à Gaza. Israël doit également permettre aux habitants de Gaza de recevoir de la nourriture, de l’eau et des médicaments. Expulser des gens de leurs maisons est inacceptable.

Il est possible que le tribunal ne considère que certaines des mesures justifiées. En particulier, un ordre de cesser toutes les opérations de combat pourrait constituer un pont trop loin pour les juges. Par exemple, ils pourraient exhorter Israël à autoriser davantage d’aide aux Gazaouis, à autoriser des missions d’enquête dans la bande de Gaza ou à prendre des mesures contre les appels au génocide. Le tribunal israélien peut également exiger qu’il adhère aux lois de la guerre – ce qui en soi est une porte ouverte.

Même si les décisions de la Cour internationale de Justice sont contraignantes, on s’attend généralement à ce qu’Israël ignore l’interdiction générale des combats. Dans un tel cas, Israël est (encore) accusé de ne pas respecter le droit international.

Cela pourrait être possible avec un ensemble de mesures moins ambitieux. C’est ainsi qu’Israël évite de perdre la face. Ce qui reste, bien sûr, c’est la perte de la face qui résulterait si Israël était soupçonné de génocide pendant des années, quelle que soit l’issue du procès.

3. Israël sera-t-il totalement libre d’un point de vue juridique si le tribunal rejette la demande de l’Afrique du Sud ?

Non. Le fait qu’Israël ait pu violer les lois de la guerre, par exemple en causant inutilement la mort de civils, n’est en réalité pas pertinent dans cette affaire, aussi étrange que cela puisse paraître. La barre est bien plus haute dans cette affaire : il s’agit du génocide, le crime de tous les crimes.

S’il n’y a pas de génocide, il est toujours possible qu’Israël ait violé les lois de la guerre. Toutefois, la Cour internationale de Justice n’a pas compétence pour se prononcer sur cette question. La Cour pénale internationale (également située à La Haye) enquête sur les crimes commis à Gaza et en Cisjordanie. Cela concerne les auteurs individuels. Outre les Israéliens, le procureur en chef Karim Khan a également dans sa ligne de mire des membres du Hamas comme auteurs possibles.

4. La réputation de la Cour internationale de Justice est-elle en jeu ?

Selon certains, c’est effectivement le cas. Par exemple, l’avocat Peter Berkowitz, ancien haut fonctionnaire du Département d’État américain, écrit sur le site Real Clear Politics sous le titre « La Cour internationale de Justice est en procès » : « Si elle ne rejette pas les accusations grossières de l’Afrique du Sud, la Cour internationale de Justice devrait perdre la légitimité qu’elle possède, du moins parmi les hommes et les femmes du monde entier qui respectent les faits, l’État de droit et le droit des États-nations à se défendre contre une agression barbare.

Parmi ceux qui soutiennent la demande sud-africaine, il semble y avoir confiance dans une décision favorable à l’Afrique du Sud. Nous saurons si cela est exact vendredi après-midi à 13 heures.



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