La commission du Congo échoue, les libéraux s’en vont : « C’est une pure honte »


Il n’y aura aucune excuse pour le passé colonial belge. La Commission Congo n’a pas été en mesure de parvenir à un accord. Les factions Open Vld et MR ont même quitté la séance. « C’est une gifle aux dizaines d’universitaires, d’experts par expérience et d’autres experts qui ont visité le parlement. »

Kelly Van Droogenbroeck et Arseny Pogorilyak

Après plus de 2,5 ans de négociations, d’écoute d’experts et d’une visite de travail dans les anciennes colonies belges, la commission spéciale pour le passé colonial belge n’a pas pu parvenir à un accord. Avant même que le vote sur la conclusion finale ait pu avoir lieu, des membres des groupes libéraux ont quitté la séance.

Le texte présenté comprenait les 128 propositions que le président de la commission Wouter De Vriendt (Ecolo-Groen) avait déjà rendues publiques. Il ne dit pas que la Belgique doit organiser des réparations, mais qu’elle doit s’excuser pour son passé colonial. C’est cet article (numéro 69) qui a finalement conduit à la scission.

Open Vld et MR auraient préféré voir « profonds regrets » ou « repentance » plutôt que « excuses ». Pour le PS, les excuses étaient essentielles. Approuver le texte avec une majorité inversée n’était pas une option pour l’un ou l’autre des partis, de peur de la façon dont cela affecterait la coalition Vivaldi.

« Je suis déçu, mais en fait aussi abasourdi et consterné », répond De Vriendt. Selon lui, il y a eu un accord entre les membres du comité de tous les groupes politiques le 13 octobre. Il a également déclaré que la Belgique s’excuserait pour son passé colonial. trois jours plus tard, l’accord a été rejeté, selon De Vriendt, cela n’avait rien à voir avec les excuses.

Selon De Vriendt, ce sont des forces extérieures au parlement qui ont bloqué l’accord. Il évoque des « intérêts électoraux » qui auraient conduit certains partis à se retirer de l’accord. Tant les présidents de ces partis que la maison royale belge auraient exercé des pressions sur les membres de la majorité. Pour le roi, les excuses et la compensation financière auraient été une ligne rouge.

Wouter De Vriendt (Groen), président du comité : « Je suis déçu, mais aussi abasourdi et consterné. »Photo BELGA

Open Vld nie qu’il y ait déjà eu un accord et qu’il y ait eu ingérence de l’extérieur. Selon la partie, ils ont quitté l’audience parce qu’il n’y a pas suffisamment de certitude juridique que les excuses ne peuvent pas conduire à des réparations. Pour eux, le vote d’hier était tout ou rien. « Une conclusion finale n’est pas un menu dans lequel vous choisissez certaines choses », déclare Goedele Liekens (Open Vld), membre de la commission. Le parti regrette qu’il n’y ait pas d’accord sur des mesures symboliques, mais s’oppose également à de nouvelles négociations, « car c’est déjà le troisième extension du comité », dit Liekens. « N’oubliez pas qu’un tel comité coûte très cher au contribuable.

Sur Twitter, Tom Ruys (UGent), professeur de droit international et l’un des experts de la commission, regrette qu’aucun accord n’ait été trouvé. « Ceci en dépit du fait que plusieurs experts ont souligné que les craintes de réclamations en dommages-intérêts étaient totalement déplacées, et malgré le fait que le projet du président soulignait que les excuses n’impliquaient pas l’admission d’une responsabilité légale. »

excuses néerlandaises

L’échec de la Commission Congo est survenu juste le jour où le Premier ministre néerlandais Mark Rutte s’est excusé au nom de son gouvernement pour le passé esclavagiste du pays. « Pendant des siècles, l’État néerlandais et ses représentants ont permis, encouragé, maintenu et bénéficié de l’esclavage. Pendant des siècles, les gens ont été transformés en marchandises, exploités et maltraités au nom de l’État néerlandais. Pour cela, je m’excuse au nom du gouvernement néerlandais.

Politologue et auteur de Fille de la décolonisation Nadia Nsayi réagit avec indignation à la situation belge : « Ce qui s’est passé est une pure honte. Les représentants du MR et de l’Open Vld, la famille politique de notre premier ministre, ont dit : ce n’est pas assez important pour nous. Peu importe qu’il y ait encore une prolongation de la commission parlementaire ou non. C’est une gifle pour les dizaines d’universitaires, d’experts par expérience et d’autres experts qui ont visité le Parlement.

Selon Nsayi, le résultat décevant indique que la Belgique n’est pas prête pour une reprise sous quelque forme que ce soit : « Nous ne devons pas sous-estimer l’importance du rôle joué par les intérêts financiers. Lorsque vous ouvrez les choses, comme cela s’est produit maintenant, de nombreux secteurs qui étaient très calmes jusqu’à présent commencent à s’impliquer. C’est pourquoi ce sont les libéraux qui sont montés au créneau : ils savent que divers secteurs appartenant à leur électorat sont maintenant obligés de se regarder dans le miroir.

Le travail du comité n’a pas été vain pour De Vriendt. « Aujourd’hui, l’esprit de certains n’était peut-être pas mûr, mais demain sera peut-être différent. Les temps changent. Je suis sûr que dans les années à venir, la politique en Belgique ira encore plus loin.

Entre-temps, Jan Briers, membre du comité CD&V, a proposé de se mettre au travail avec les articles sur lesquels il existe un consensus. « Nous avons tellement investi dans ce comité. Passons maintenant à la commission des affaires étrangères avec le reste des articles pour discuter de ce que nous pouvons faire. Il est également possible pour CD&V de négocier davantage sur l’article 69. Briers n’est pas opposé aux excuses, mais estime également que la formulation actuelle offre trop peu de garanties juridiques.

Congo, 1950. ImageGetty Images

Congo, 1950.ImageGetty Images



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