Pour commencer, établissons que la série de thrillers en quatre parties À l’intérieur de l’homme (à ne pas confondre avec le film du même nom de Spike Lee) de l’auteur Steven Moffat est un joli gâchis déraillé. Et est-ce vraiment un thriller, ou est-ce une comédie noire, un drame familial ou une réflexion philosophique sur le mal en l’homme ? On a trouvé qu’on s’était bien amusé à binger les quatre épisodes de cette série de la BBC, non sans crier toutes sortes d’insultes à l’écran, du genre ‘tu plaisantes pas !’ ou “le croyez-vous vous-même ?”
Moffat est l’homme qui travaille pour la BBC Docteur Who et Sherlock Holmes revitalisé et ainsi lancé la carrière de Benedict Cumberbatch, qui jouait Holmes, à la vitesse supérieure. La trouvaille de la série Sherlock situer certaines des aventures classiques de Holmes dans le Londres d’aujourd’hui s’est avéré être une idée en or. Et la belle combinaison du puzzle criminel et des intrigues absurdes a été faite pour Moffat et Cumberbatch.
Le condamné à mort Jefferson Grieff (le toujours fort Stanley Tucci), qui est dans le couloir de la mort en attendant l’exécution de sa peine, présente des similitudes avec Sherlock. Nous apprenons qu’il a horriblement assassiné sa femme, mais avant cela, il a eu une carrière de brillant criminologue avec un œil de faucon et un sens de la logique qui rappelle notre détective de Baker Street. Dans le rôle de Grieff, on retrouve aussi des échos d’Hannibal Lecter, puisqu’il est incarné dans Anthony Hopkins dans Le silence des agneaux, un monstre au goût exquis et au QI élevé. Tant que Grieff est encore sur Terre, il est consulté sur des questions insolubles, démontrant une capacité à voir ce que les autres manquent.
Et puis il y a cette deuxième ligne, qui nous emmène dans la campagne anglaise, où le prédicateur bien-aimé Harry (David Tennant) déjà dans l’épisode 1 avec une intervention bien intentionnée met en branle une série d’événements finalement catastrophiques. On sent que Moffat assemble ici une sorte de puzzle en se demandant jusqu’à quel point on peut moralement comparer l’ecclésiastique du village au meurtrier américain. Cela rejoint la philosophie de Grieff. Pour paraphraser, il y a des moments qui peuvent tous nous transformer en tueurs si vous rencontrez la bonne personne le mauvais jour.
Disons que À l’intérieur de l’homme un très lourd fardeau sur notre capacité à mettre de côté notre sens de la logique dans une histoire (également appelée suspension de l’incrédulité). Dans l’histoire de l’ecclésiastique du village notamment, tous les personnages prennent constamment les décisions les plus irréfléchies à des moments clés, si bien que les dilemmes ressemblent à des questions philosophiques où il faut choisir entre deux scénarios totalement improbables.
Cela ne change rien au fait que Tucci et Tennant sont toujours amusants à regarder et que Moffat peut écrire des scènes fortes. À la fin, plusieurs lignes se rejoignent, mais il y a aussi suffisamment de détails qui semblent annoncer une éventuelle deuxième saison. Si cela ne se produit pas, le spectateur sera laissé dans une structure branlante sans issue.
A voir sur Netflix.